Esther Benbassa, sénatrice EELV, vient de publier une tribune dans le journal Libération rappelant à Hollande ses devoirs. Elle estime à juste titre que reporter aux calendes grecques un projet de loi attendu et défendu par beaucoup de citoyens de gauche, qui y ont probablement pensé au moment de mettre le bulletin dans l’urne pour Hollande, malgré leur non appartenance au PS, serait déraisonnable. Le texte de la pétition qu’elle nous propose de signer est le suivant :
Lettre ouverte de 50 intellectuels et parlementaires pour le droit de vote des étrangers au Président de la République et à tous les républicains.
Monsieur le Président,
Généreuse, la République se doit de donner de nouveaux moyens d’expression à ceux qui prennent part, au quotidien, à la vie de la Cité, qui contribuent à ses ressources, et qui respectent ses lois. Terre d’accueil, la France se doit de tenir compte des racines créées, par-delà la nationalité, par ceux qui y vivent depuis des années, parfois depuis des décennies. Pluriel, notre pays se doit de reconnaître un nouveau type de citoyenneté, qui ne soit pas uniquement le fruit de la nationalité. L’extension du droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales aux étrangers non européens concernerait environ 2,3 millions d’étrangers, dont 1,8 million y résidant depuis plus de cinq ans. En 1981, François Mitterrand, alors candidat à l’élection présidentielle, la proposait déjà. En 2012, vous-même, à votre tour candidat, vous repreniez cet engagement à votre compte. Ce droit est l’aboutissement du cheminement naturel de la démocratie. Il constitue également un facteur de renforcement de la cohésion sociale. Et il est susceptible d’avoir des effets positifs sur la participation électorale des enfants français de ces étrangers. Son adoption permettrait enfin de mettre un terme à des asymétries choquantes entre les étrangers non européens, qui sont parfois résidents de longue date sur le sol français, et les étrangers communautaires, disposant eux, sans condition de durée de résidence, du droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales. Les étrangers qui y accéderaient ne pourraient pas exercer de fonctions exécutives au sein d’un conseil municipal et les conseillers municipaux étrangers élus ne pourraient pas participer à l’élection des sénateurs. Ce droit, adopté en 2000 à l’Assemblée nationale, a été voté par le Sénat le 8 décembre 2011, un peu plus de deux mois après son basculement à gauche, le 25 septembre 2011. Ces prises de position parlementaires s’inscrivent dans le sillage des appels lancés régulièrement depuis les années 1980 par des associations antiracistes institutionnalisées, tels la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) ou le Mouvement contre le racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP), et de la mise en place, dans de nombreuses municipalités, de dispositifs d’association des résidents étrangers à la vie locale. Des vœux ont également été régulièrement adoptés, en faveur du droit de vote et d’éligibilité des étrangers dans les conseils municipaux, généraux et régionaux, dès 2001. Et des référendums locaux ont enfin été organisés, autorisant la participation des ressortissants étrangers. Sans oublier l’inscription de ce droit dans le programme de plusieurs partis de gauche. Maintenant que la France a en vous un président de la République socialiste, il est temps de reprendre politiquement en main le dossier, et d’engager le processus de révision constitutionnelle. Pour cela, l’option la plus favorable serait la préparation par le gouvernement d’un projet de loi, soumis aux deux chambres séparément, puis au Congrès (députés et sénateurs réunis). Pour que la révision constitutionnelle soit définitivement adoptée, elle devra emporter au moins les trois cinquièmes des voix du Congrès. Il risque pourtant d’en manquer une quarantaine. Lançons donc une campagne pour convaincre les élus hésitants. Allons chercher, au Parlement, les voix manquantes une par une. Montrons que la politique est aussi l’art de convaincre, et que la démocratie ne peut que gagner à un tel combat. Il ne serait pas raisonnable de reporter à 2014 l’éventuel octroi à nos résidents étrangers non européens d’un droit qu’ils attendent depuis si longtemps. Ils méritent de notre part ce geste fraternel, hautement symbolique, mais aussi utile à la société, ne serait-ce que par son caractère résolument inclusif en des temps où les replis religieux, ethniques, communautaires se font de plus en plus visibles. Voter, c’est se responsabiliser, et dire non à l’enfermement dans les marges. Ensemble, députéEs, sénateurs et sénatrices, éluEs de tous rangs, ministres, chef de gouvernement, et jusqu’au plus haut représentant de l’Etat que vous êtes, Monsieur le Président, faisons de notre conquête des voix une mission républicaine. Montrons que nous sommes encore capables de porter haut et fort nos valeurs de gauche pour une société du vivre ensemble. Parlementaires intellectuelLEs, citoyenNEs, c’est aujourd’hui, dès maintenant, que nous avons le devoir de construire la France de demain. Nous comptons sur vous, Monsieur le Président.
Esther BENBASSA, sénatrice (EELV) du Val-de-Marne et rapporteure au Sénat de la proposition de loi sur le droit de vote et d’éligibilité des étrangers, et Sergio CORONADO, député (EELV) des Français établis hors de France.
Premiers signataires: 1. Jean-Christophe ATTIAS, directeur d’études à l’EPHE (Sorbonne) 2. Nicolas BANCEL, historien, professeur à l’Université de Lausanne 3. Esther BENBASSA, sénatrice (EE-LV) du Val-de-Marne 4. Pascal BLANCHARD, historien, LCP, CNRS 5. Pascal BONIFACE, géopolitologue 6. Daniel BORRILLO, maître de conférence à l’Université Paris X 7. Jean-Paul CHAGNOLLAUD, professeur des Universités 8. Marc CHEB SUN, éditorialiste 9. Pascal CHERKI, député (PS) de Paris 10. Sergio CORONADO, député (EE-LV) des Français établis hors de France 11. Denis CROUZET, professeur d’histoire à l’Université Paris-Sorbonne 12. Elisabeth CROUZET-PAVAN, professeur d’histoire à l’Université Paris-Sorbonne 13. Cécile CUKIERMAN, sénatrice (CRC) de la Loire 14. Geoffroy DE LAGASNERIE, philosophe 15. Michel DELEBARRE, maire de Dunkerque, sénateur (PS) du Nord 16. François DE RUGY, député (EE-LV) de Loire-Atlantique, co-président du groupe écologiste à l’Assemblée nationale 17. Christine DELPHY, directrice de recherches au CNRS 18. Didier ERIBON, professeur à l’Université d’Amiens 19. Christian FAVIER, président du Conseil Général et sénateur (CRC) du Val-de- Marne 20. Eric FASSIN, sociologue, Université Paris 8 21. François GEZE, éditeur 22. Jérôme GUEDJ, député (PS) de l’Essonne 23. Razzy HAMMADI, député (PS) de Seine-Saint-Denis 24. Stéphane HESSEL 25. Philippe KALTENBACH, sénateur (PS) des Hauts-de-Seine, maire de Clamart 26. Bariza KHIARI, sénatrice (PS) de Paris 27. Michel KOKOREFF, professeur de sociologie, Université Paris 8 28. Jean-Yves LECONTE, sénateur (PS) des Français établis hors de France 29. Olivier LE COUR GRANDMAISON, universitaire 30. Marie-Noëlle LIENEMANN, sénatrice (PS) de Paris 31. Daniel LINDENBERG, professeur de sciences politiques, écrivain 32. Roger MADEC, sénateur (PS) de Paris, maire du 19ème arrondissement de Paris 33. Noël MAMÈRE, député (EE-LV) de la Gironde 34. Gilles MANCERON, historien 35. Caroline MECARY, avocate au barreau de Paris, co-présidente de la fondation Copernic 36. Michelle MEUNIER, sénatrice (PS) de la Loire-Atlantique 37. Jean-Pierre MICHEL, sénateur (PS) de la Haute-Saône 38. Jean-Vincent PLACÉ, sénateur (EE-LV) de l’Essonne, Président du groupe écologiste du Sénat 39. Barbara POMPILI, députée (EE-LV) de la Somme, co-présidente du groupe écologiste à l’Assemblée nationale 40. Mabrouck RACHEDI, écrivain 41. Richard RECHTMAN, directeur d’études à l’EHESS 42. RIDAN, auteur-compositeur 43. Barbara ROMAGNAN, députée (PS) du Doubs 44. Patrick SIMON, directeur de recherche à l’INED 45. Benjamin STORA, professeur des universités 46. Lilian THURAM, président de la Fondation Education contre le Racisme 47. Vincent TIBERJ, sociologue à Sciences Po 48. Enzo TRAVERSO, professeur de science politique à l’Université d’Amiens 49. Dominique VIDAL, historien et journaliste 50. Sophie WAHNICH, historienne, directrice de recherche au CNRS, IIAC-TRAM de l’EHESS
La pétition est disponible en ligne ici :
http://www.avaaz.org/fr/petition/Appel.
Si vous êtes de gauche, vraiment – après l’avoir signée évidemment – faites le savoir le plus largement possible autour de vous. Cela permettra ainsi à notre cher Président de notre chère république française de respecter ses promesses… C’est une question de salubrité publique.