Les bonnes raisons d’ιtudier, de dissιquer, d’analyser l’ιvolution du transport aιrien sont innombrables : c’est un secteur qui connaξt une croissance constante depuis les premiθres envolιes des frθres Wright, dont le rτle ιconomique est aujourd’hui primordial, qui achemine prθs de 3 milliards de passagers par an en mκme temps que des millions de tonnes de marchandises, qui est devenu proprement incontournable.
C’est aussi une industrie qui, curieusement, ne tourne pas tout ΰ fait rond, incapable d’adapter ses tarifs ΰ la rιalitι des prix de revient, qui ne dιgage pas de marge, qui souffre d’un problθme aigό de management, dont le modθle ιconomique est fragile, voire bancal. Comme le rιsume trθs bien Jean-Louis Baroux, prιsident d’APG, le transport aιrien n’est pas vendu ΰ un prix raisonnable. Pourtant, les experts sont d’accord pour affirmer que si les tarifs ιtaient relevιs de quelques p.c., la croissance de la demande ne serait pas remise en cause pour autant.
On en arrive ΰ oublier de se demander oω va ce secteur pas comme les autres. Sa croissance annuelle moyenne est de 4,9%, un taux enviable qui, au pire, va peu ΰ peu se tasser. Le Cabinet ID Aιro, attentif aux tendances, aux incidents de parcours et orfθvre en matiθre de statistiques, jette un regard neuf sur l’avenir. «De la loupe ΰ la longue vue», dit son directeur, Jacques Delys. Avec ses collθgues, et notamment Maurice Liθvre, il a menι l’enquκte pour tenter de dιceler ce que sera le long terme. Un travail considιrable : et personne ne sera dιηu !
Que nous apprend ID Aιro ? Que la croissance du trafic va peu ΰ peu dιcroξtre, le trafic devant nιanmoins κtre multipliι par 4,3 au cours de la pιriode 2010-2050, soit 17,5 milliards de passagers par an ΰ ce moment-lΰ. Oui, 17,5 milliards, un peu plus qu’annoncι par une prιvision de l’IATA discrθtement rendue publique il y a 2 ans. A l’horizon 2050, le taux de croissance devrait κtre retombι ΰ 2,5%.
Jacques Delys et Maurice Liθvre sont allιs plus loin. Leur ιtude les a «tout naturellement» amenιs ΰ s’interroger sur ce qu’ils appellent l’horizon du point de saturation. D’oω une projection «carrιment futuriste» jusqu’en 2150, le mouvement dans cette voie ιtant liι, notamment, aux travaux des Nations Unies sur l’ιvolution de la population mondiale.
S’agit-il d’ιconomie-fiction ? D’aviation-fiction ? Pas nιcessairement, plutτt d’une prolongation prudente des donnιes calculιes prιcιdemment. Conclusion essentielle : exprimι en passagers/kilomθtres transportιs, le trafic serait multipliι par 10, par rapport ΰ son volume de 2010, ιtant entendu que la croissance, ΰ l’ιchιance 2150, tendrait vers zιro. Le transport aιrien aurait ainsi fait le plein et s’installerait dans un rιgime de croisiθre.
Comment cette prιvision est-elle obtenue ? Tout d’abord en prenant pour hypothθse de travail une augmentation dite moyenne haute de la population mondiale, valeur mιdiane d’une large fourchette de possibilitιs (16 milliards d’habitants). Par ailleurs, le taux de pιnιtration du transport aιrien mondial s’inspirerait de l’expιrience amιricaine, avec 40% de la population prenant l’avion, chaque passager effectuant en moyenne six voyages par an (trois allers et retours).
Commentaire d’ID Aιro : «c’est un scιnario plausible des besoins irrιpressibles mondiaux de l’avenir». Et d’ajouter : «Replaηons-nous en 1970 : qui aurait pariι que 40 ans plus tard, le trafic aιrien serait multipliι par 10 ?»
Voici de quoi occuper les esprits, l’occasion de multiplier les interrogations de tous ordres. La gestion des parties les plus encombrιes de l’espace aιrien sera-t-elle capable d’absorber une telle demande ? Les aιroports offriront-ils un nombre adιquat de crιneaux de dιcollage et d’atterrissage ? La flotte mondiale sera-t-elle en mesure de suivre le mouvement ? Avec quels types d’avions, quel carburant ? Etc., etc.
En d’autres termes, les travaux d’ID Aιro sont passionnants ...et source d’insomnies...
Pierre Sparaco - AeroMorning