En France, 23% des jeunes sont pauvres

Publié le 04 décembre 2012 par Eldon

La Honte continue. Non pas pour  l’Europe, mais pour la France. 23% des jeunes sont pauvres. Génération sacrifiée. Quel espoir pour demain?

Le taux de pauvreté des 18-24 ans atteint 22,5 %. Depuis 2004, il a progressé de 5 points. Au total, plus d’un million de jeunes sont désormais confrontés à une situation de grande précarité.

Le Monde a consacré une entrevue à Olivier Galland, sociologue et directeur de recherche au CNRS qui préside le conseil scientifique de l’Injep, établissement public (créé en 1953, repensé en 2010) qui a notamment pour mission de dresser tous les deux ans un état des lieux de la situation des jeunes en France. Il évoque les conclusions du rapport auquel il a contribué.

Pourquoi avoir choisi le thème des inégalités au sein de la jeunesse ?

Ces dernières années, l’accent a surtout été mis sur les inégalités intergénérationnelles. Or je ne crois pas à la théorie de la « génération sacrifiée ». C’est faire l’hypothèse que la génération des jeunes forme un tout qui s’oppose aux générations aînées. Mais au sein même de la jeunesse, l’hétérogénéité grandit. Dans les enquêtes et sondages, ni les adultes ni encore moins les jeunes ne reconnaissent ce clivage intergénérationnel. Les jeunes ne se sentent pas discriminés en tant que génération. Sans doute parce qu’existent de très fortes solidarités intergénérationnelles informelles à l’intérieur des familles – ce qui renforce les inégalités entre jeunes selon qu’ils peuvent, ou non, être aidés.

La famille demeure un soutien de poids ?

Les parents font des efforts extraordinaires pour les jeunes adultes, qui ne sont pas les « Tanguy » que l’on décrit. Depuis quinze ans, l’âge moyen de décohabitation n’a pas évolué significativement, il demeure aux alentours de 20 ans. Contrairement au modèle nordique, où l’on part tôt mais en étant ensuite très soutenu par la puissance publique, et au modèle méditerranéen où l’on reste jusqu’à 30 ans chez les parents pour accumuler des ressources, le modèle français est intermédiaire : on part assez tôt mais en restant à proximité géographique, affective, matérielle de la famille, dans un apprentissage progressif de l’autonomie.

Le rapport montre de grandes inégalités d’insertion dans l’emploi…

En France, s’exprime une sorte de préférence collective pour les « insiders » déjà en emploi, très protégés par rapport à ceux qui sont aux portes et subissent les à-coups de la conjoncture. A l’instar des jeunes. Dans les pays où l’apprentissage est très développé, ou le marché du travail est plus flexible, il y a partage de la flexibilité entre les générations.

En France, la variable d’ajustement de l’économie, ce sont les jeunes : 22 % de la population active mais 40 % des chômeurs, indiquons-nous dans le rapport. Sur six millions de jeunes actifs, un million est au chômage au sens du BIT. Et l’augmentation du chômage de longue durée est particulièrement préoccupante chez ces jeunes (+ 5,6 % entre 2008 et 2010). Mais toutes les jeunesses ne souffrent pas de la même façon. Le clivage se creuse, dans l’accès à l’emploi, entre diplômés et non-diplômés.

Plus que jamais en temps de crise, les diplômes protègent du chômage ?

Selon les chiffres Insee cités dans le rapport, le taux de chômage (2011) des 15-29 ans est de 9 % pour les diplômés du supérieur, de 22 % pour les titulaires d’un bac, CAP ou BEP. Mais de 46 % pour les non-diplômés. Le taux de pauvreté (disposer de revenus inférieurs à 964 euros mensuels, en 2010) est de 30 % pour les non-diplômés, contre 10 % pour les diplômés du supérieur. Dans l’insertion professionnelle, le diplôme est devenu un avantage relatif plus important qu’il ne l’était il y a vingt ou trente ans. Il reste une protection extraordinaire contre le chômage. Les diplômés continuent, même si c’est plus tardivement, de décrocher le Graal, le CDI. 80 % l’obtiennent entre 25 et 30 ans. Sur dix, vingt ans, le phénomène de dévaluation des diplômes n’est pas si marqué que cela. Et tous les diplômes protègent. Certes, davantage à mesure que leur niveau monte. Mais l’insertion professionnelle d’un titulaire de CAP ou de BEP est plus proche de celle d’un diplômé du supérieur que de celle d’un non-diplômé.

Le Monde