Petit guide pour attaquer le nouveau millénaire du bon pied.
Nous, les Français, avons la sinistrose facile. Le pessimisme est dans nos gênes. Si râler était une profession, gageons que le taux de chômage s’écroulerait sous le poids des vocations. Parce que voyez-vous ma brave Dame, « c’était mieux avant » et si vraiment on voulait entrer dans les détails du mal qui gangrène notre société, « il n’y a plus de jeunesse ». Bref, « où va le monde » mon brave Monsieur.
Derrière l’anecdote se cache une réalité bien peu glorieuse : on a gagné en libertés individuelles ce que nos vies ont perdu en sens. Ce constat est d’une telle évidence que Jean-Louis Servan-Schreiber nous épargne la triste démonstration que le vide a envahi nos existences, depuis que nous avons perdu de nombreux repères après la deuxième Guerre Mondiale.
Et c’est tant mieux! Est-il vraiment utile de s’appesantir sur les malheurs qui nous frappent en ce début de nouveau millénaire? Évidemment la réponse est non, se plaindre ne résoudra pas les problèmes. Et c’est avec son ton alerte et sa plume pétillante que Jean-Louis Servan-Schreiber nous propose une analyse un peu décalée de la société.
Ainsi, Facebook, est-ce vraiment le mal incarné? Pas forcément si c’est une alternative à une morne soirée solitaire devant son poste de télévision. La violence envahit le monde? Au contraire, les taux de criminalités connaissent des baisses sans précédent dans les pays développés. Les liens entre individus se distendent, même au sein des familles? Et si, grâce aux nouvelles technologies, l’augmentation du nombre d’amis venait compenser ces « liens faibles »?
Et cette jolie leçon de positivisme, c’est un homme de 75 ans ayant connu la guerre puis la belle période des Trente Glorieuses qui la distille. Non, ce n’était pas mieux avant : c’était différent. Et de rappeler la formidable capacité d’adaptation des êtres humains : nous avons toujours surmonté les pires périodes, va-t-on se laisser démonter alors que nous avons, plus qu’auparavant, les clés en main pour inventer nos vies et l’avenir de nos enfants? Libre à nous de saisir la chance que nous offre cette nouvelle Renaissance.
139 pages d’optimisme et de pistes de réflexions qui tranchent avec la morosité ambiante : Aimer (quand même) le XXIè siècle est un livre qui fait du bien.
JE VOUS LE CONSEILLE SI…
… pour vous, Internet est le Diable, Facebook son bras droit, la télévision la pire invention pour l’humanité. C’est à peu près ce que je pensais avant de lire ce petit essai.
… vous vous demandez quel avenir s’offre aux jeunes du XXIè siècle… les pauvres. Disons que la problématique de cette jeunesse n’est pas de panser les blessures de la guerre, de reconstruire un pays et de vivre avec des tickets de rationnement. Pas si mal, non?
DEUX PETITS EXTRAITS POUR VOUS DONNER ENVIE:
Le lourd héritage de mai 68…
[...] une autre grande braderie de repères avait suivi les émotions libertaires de Mai 68 et de ses équivalents ailleurs dans le monde. Le rejet de l’autorité-carcan, la soif de réalisation de soi ont alors fait considérer toute discipline comme une entrave, toute règle comme une férule. Une libération sans doute salutaire, mais aussi une mise en doute des principes de base du vivre ensemble. [...] « Mai 68 a créé une prime à la critique gratuite, à la radicalité dérisoire, qui veut que l’on s’indigne en bloc, mais que l’on ne réponde à aucune question, que l’on ne traite aucun problème et que, au final, on se lave les mains de tout. Une prime à l’individualisme extrême. »
En réponse à celles et ceux qui affirment « ne pas avoir le temps de… (lire, cuisiner, méditer) »:
Nous disposons en fait de plus de temps que nous n’en avons conscience. C’est nous qui choisissons de le consacrer, par exemple, à regarder un écran. Rien de répréhensible à ça, mais ne finissons-nous pas par oublier qu’en fait nous pourrions préférer lire, nous promener ou méditer? Au XXIè siècle, nous avons plus de marge dans nos horaires que nous ne nous l’avouons. [...] Dans ce domaine, comme dans tant d’autres, cette époque nous offre plus de libertés que nous n’en avons conscience. A nous de choisir d’en profiter avec discernement.