Interview Swann

Swann, une voix grave aux touches de velours, enveloppante et sensuelle pour cette jeune parisienne de 23 ans. Un coup de coeur pour BulleSonore et une rencontre, à quelques mois de la sortie de son album prévue en 2013. Une rencontre toute en élégance comme son univers…
On vous laisse le découvrir.

Neverending, un titre très spirituel et nostalgique en même temps. Peux-tu nous en dire plus sur ce choix pour un premier album ?
Neverending est un choix qui s’est imposé un peu avant d’enregistrer l’album, je ne voulais pas que ce soit un titre de chanson qui représente l’album. Neverending car cet album est hanté par ma peur de la fin de ce qui se fini, fin de la vie, fin de l’amour et le désir que l’on a tous de vouloir passer au delà, d’aller outre cette destinée ; donc Neverending est comme un pied de nez à toutes mes peurs. C’est assez spirituel, comme un appel aux forces supérieures.

Sa signification, ton nom de scène en rapport à Proust, finalement beaucoup de références au temps. T’es tu appuyée sur cette thématique pour composer ? ou sur d’autres ?
Sans le savoir, je pense que le temps fait partie de mes thématiques, ainsi que tous les thèmes qui peuvent y être associés : la mémoire, le souvenir, volontaire ou involontaire comme dans Proust. Il y a également le pouvoir de la musique qui est là pour nous faire remonter ou avancer dans le temps. C’est effectivement un thème assez crucial, et le thème de la fin y est finalement lié. Je parle aussi beaucoup d’amour, mais d’amour au sens large, l’amour, ce sentiment positif qui lie les humains entre eux. Et encore une fois c’est assez religieux, ce sont des valeurs fondamentales et que je reprends parce qu’elles m’inspirent et auxquelles j’aspire, c’est un peu un biais pour idéaliser le monde.

Dans ce que tu dis, est ce que tu as cherché à exorciser tes peurs, par le biais de la musique ?
Clairement oui, mes chansons je les écris souvent quand ca ne va pas, en effet cela me sert à exorciser mes peurs, à exprimer mes doutes, dont parfois moi-même je ne connais pas l’existence, et qui ressortent lorsque j’écris ; c’est un peu comme une thérapie ! (rires)

Ton album, une œuvre filée ou plutôt des univers différents ?
Je ne me suis pas vraiment posé la question et je pense qu’au final, c’est un peu les deux. Je n’avais pas envie de poser les choses, de me dire je vais faire telle ou telle chanson, ce n’est pas mon style.

Mon album suit plutôt suivi mon évolution personnelle, mes pérégrinations, ma vie. J’aime des styles de musique variés et tout cela m’inspire. Je dirais que ce sont plusieurs petits mondes mais qui sont tous liés, et dans lesquels transparait ce que j’aime et ce que je ressens. Et puis évidemment j’ai fais un tri pour assurer la continuité de l’album.

A l’écoute des titres qui vont composer ton album, on se retrouve plongé dans une certaine élégance à la française, mais avec des textes dans la langue de Shakespeare, tu as une explication à cette ambivalence ?
Je n’y ai pas vraiment réfléchi non plus et la première chanson que j’ai écrite était en anglais. L’anglais s’est imposé naturellement. J’ai tenté d’écrire en français, à l’adolescence, mais je me sentais moins libre, moins à l’aise pour dire ce que j’avais envie de dire, j’avais l’impression de me mettre dans la peau d’un autre personnage. Très courte expérience donc, et je suis revenue à l’anglais très rapidement, langue que j’affectionne particulièrement, et sur laquelle j’ai travaillé pour aboutir à des textes qui se tiennent. C’est également une langue très musicale, les pieds sont bien marqués et en même temps cela coule, je me sens vraiment plus libre.

Via tes textes, que cherches-tu à faire partager aux auditeurs ?
J’essaie de ne pas me baser uniquement sur mon expérience et d’élargir les horizons afin que cela touche un grand nombre de personne.
J’aimerais accompagner les personnes dans leur vie de tous les jours, comme une sorte de médecine parallèle, les accompagner dans des moments plus difficiles ou heureux, c’est de cette manière là que je conçois la musique.
Pour moi la musique n’est pas un faire valoir, plutôt une chose que l’on fait pour se divertir et passer un bon moment.

On trouve un certain rythme, blues, pop, folk très intimiste qui nous amène à la question de tes influences : sur ta platine ou ton lecteur CD, plus jeune, tu écoutais quoi ?
Sur mon lecteur CD, j’écoutais ceux de mes parents, mon père était fan des Stones, ma mère de Leonard Cohen ; on écoutait beaucoup Lou Reed, Les Velvet , Neil Young.
Sur la platine de mon père, j’ai découvert beaucoup de choses qui m’ont marquées comme les Roxy Music ou Bowie et je suis rapidement devenue adepte. Oui, la musique permet de construire quelqu’un et cela m’a nourri c’est sur.

Tu cites souvent Bowie comme référence, lui-même, qui a écrit ses plus beaux albums avant 30 ans, toi tu es jeune 23 ans et déjà mature, dans ton parcours qu’est ce qui t’a forgé, quelles expériences fortes t’ont amenées jusqu’ici ? Des rencontres ?
Il y a deux types d’expériences et c’est intéressant. Il y a d’une part, les expériences qui sont liées à ce que je suis devenue aujourd’hui en tant que musicienne et de l’autre les expériences qui sont liées à ce que j’ai besoin de dire. Côté parcours, j’ai ressenti le besoin de continuer mes études jusqu’en Master c’était important pour moi, d’assoir mes connaissances et cela m’a permis d’avoir un recul sur le monde de la musique et de continuer à la voir comme un hobby et de garder ce goût de la musique intact.
Ensuite ce qui m’a permis d’aller jusque là, après la rencontre avec la guitare, petite, et bien il y a eu la rencontre en 2009 avec Stephen Manson, mon manager qui joue dans le groupe.
A partir de là on a commencé à travailler ensemble, il m’a présenté des musiciens avec qui je joue toujours, et c’est comme cela que l’on a construit le projet ensemble.

Rob Ellis, quelques mots sur votre rencontre et la manière dont vous avez travaillé ensemble et enregistré au Pays de Galle ?
C’était génial et sur le coup j’étais très anxieuse et stressée. Avec le recul, j’aimerais y retourné. Avec Rob on s’est rencontré d’abord à Londres, c’est ma maison de disque qui nous a présenté. Je connaissais déjà son travail car il avait travaillé en musique classique et avais déjà travaillé avec des femmes. Et ce dernier aspect pour moi est très important : c’est très différent de travailler avec une femme ou un homme, les sensibilités sont différentes et je préfère travailler en musique avec des hommes. Rob a su canaliser les énergies, il m’emmenait tous les matins dans les montagnes au Pays de Galle pour prendre l’air pour me faire décompresser. Et musicalement son intégration dans le groupe à été plus que providentielles. Cet album est vraiment le résultat d’un échange autant humain que musical et puis il est vrai que le lieu était vraiment magnifique et grandiose.

Je pense que Rob et Tom l’ingénieur son resteront des personnes très particulières et importantes pour moi très longtemps.

Il me semble que tu viens d’enregistrer une cover, à laquelle a participé ton papa au saxo, sans vouloir la dévoiler, as-tu réorchestré l’original ?
Je n’aurais pas pu garder le style original, enfin pas exactement mais comment dire (ce n’est pas facile comme exercice !) Disons que l’original est plutôt comique en tout cas c’est ce qu’elle laisse entendre et je l’ai tourné dans le sens dramatique.
Cela faisait tellement longtemps que je la jouais, je la jouais beaucoup quand je faisais des concerts toute seule ado, elle fait partie de ma vie cette chanson. J’ai réorchestré toutes les voix et on l’a produite à 3 avec Stephen et David qui sont dans le groupe. C’était un moment incroyable, là pour le coup, pas de stress beaucoup d’éclate, et puis mon père est venu, suite à la proposition de Stephen. Je n’aurais pas cru faire cela un jour.

Avec quel artiste aimerais-tu travailler sur un projet commun ou partager une scène ?
Il y a les rêves irréalisables et les réalisables.
Dans les irréalisables, le premier qui me vient à l’esprit est Bowie, ne serait ce que le rencontrer serait déjà parfait ! et il y a aussi John Cale du Velvet underground et Brian Eno que j’aime aussi.

Dans les réalisables, c’est une chose que j’ai déjà faite et que j’aimerais poursuivre c’est avec Bill Ryder-Jones, qui chante aussi sur 2 chansons l’album on a fait cette collaboration à distance et j’aimerais faire une vraie collaboration sur un album ou une chanson faite à 2, c‘est vraiment quelqu’un avec qui j’aimerais travailler, son univers est très riche et sa vison m’intéresse énormément.

Quand aura-t-on le plaisir de te retrouver sur scène à Paris ?
Ce sera en janvier normalement : soirée pour un magazine qui se tiendra au Divan du monde et ensuite à la sortie de l’album. Et puis j’ai déjà tellement joué à Paris dans les petites salles étant jeune, j’aimerais que mon prochain concert soit quelque chose de marquant, une salle pas trop grande, intimiste que je puisse y intégrer des visuels intéressants.

Remerciements : Maël Esnault / Atmosphériques