Que celui ou celle qui n'a jamais eu à se défendre d'un sentiment de culpabilité me jette la première pierre !
C'est à un fort intéressant voyage dans les méandres des relations de culpabilisation que nous invite le psychanalyste et thérapeute familial Robert Neuburger. Son petit essai, qui donne une large place à la clinique, est fort bien conçu. Ce n'est pas une indigeste somme universitaire, non plus qu'un tissu de lieux communs et de poncifs mis bout à bout, comme il arrive lorsque les éditeurs publient à la chaîne des livres de développement personnel insipides, en faisant fi de la qualité des textes.
On peut juger de l'actualité de son projet à cette propension, aujourd'hui, à toujours se défendre en endossant le statut de la victime. Si je suis victime, c'est que l'autre est coupable, donc méchant, n'est-ce pas ? La dialectique de la culpabilité est redoutable, multiforme, sans arrêt réversible. La victime pourrait bien se révéler bourreau, si l'on y regardait de près. Et vice-versa. Et d'ailleurs l'un des outils les plus simples, en coaching, pour faire prendre conscience de certains effets systémiques n'est-il pas le célèbre triangle dramatique, persécuteur-victime-sauveur ? Une affaire qui tourne rond, et même souvent en rond. Et qui peut causer des dégâts, en même temps qu'un immobilisme frustrant, ou de véritables escalades mimétiques. Savoir le repérer et s'en extraire est toujours un grand pas en avant vers des relations plus saines.
Bien sûr, en choisissant cet angle de vue, le risque serait d'envisager tout conflit, désaccord ou tentative d'influence et de manipulation comme une forme de culpabilisation. C'est une grille de lecture qui a ses limites, mais qui opère parfaitement dans ce texte court et bien écrit, que l'on peut recommander. Parce qu'à bien y réfléchir, un grand nombre de nos interactions sont marquées par le recours, conscient ou inconscient, aux différents registres de la culpabilisation, le plus souvent structurés dans l'enfance. Il est intéressant d'en prendre conscience, première étape vers la libération et une affirmation tranquille de soi.