Syrie - Pierre Piccinin en direct d'Alep :
les rebelles syriens en grosse difficulté
(Le Soir.be, 31 octobre 2012)
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Depuis quelques jours, l'armée syrienne a intensifié ses bombardements sur la grande métropole du nord du pays, Alep, tenue en partie par les rebelles.
En direct d'Alep, Pierre Piccinin témoigne : il explique se trouver dans un champ de ruines, une situation quasiment intenable pour l'Armée syrienne libre (ASL).
propos recuellis par Baudouin LOOS
[Photo : avec une katiba à Alep, dans le quartier de Karm al-Jabal, octobre 2012 - © Benoit De Freine]
Les reporters des grandes agences internationales de presse sur place l’avaient signalé depuis plusieurs jours : les bombardements de l’aviation syrienne contre les quartiers d’Alep tenus par les rebelles n’ont jamais été aussi massifs. Nous avons joint par téléphone en début d’après-midi l’enseignant et historien belge Pierre Piccinin, retourné à Alep après deux précédents voyages du côté rebelle, fin juillet et mi-août.
Selon lui, les nouvelles sont mauvaises.
« Je suis pour l’instant dans le quartier de Midan, une zone chrétienne sur la ligne de front ; on entend les combats. La situation s’est fort dégradée depuis août. Des quartiers entiers ne sont plus que des champs de ruines ; cela fait penser aux images de Stalingrad pendant la dernière guerre. Pour avancer, nous avons suivi deux snipers qui progressaient d’immeuble en immeuble, uniquement à travers des trous pratiqués dans les murs. Ce que j’ai vu dans la ville : des ruines à perte de vue ! L’hôpital Dar al-Shifaa, où je logeais en août, est inutilisable : tous les étages ont été bombardés ; mon ami, le docteur Yasser Darwish, travaille pour le moment ailleurs, dans un petit dispensaire tenu secret. »
Pour autant, les rebelles n’ont pas abandonné leur espoir de succès.
« Hier, il y a eu une attaque rebelle contre l’aéroport international, au sud-est d’Alep. Mais elle a échoué et les insurgés ont dû reculer devant la réplique des forces gouvernementales : des bombardements très violents. J’étais présent au quartier général de l’ASL et je dois dire qu’il y régnait un désordre complet… Les rebelles perdent du terrain, perdent des positions. C’est très dur pour eux. »
L’historien belge tente d’aller à la rencontre d’éléments ultra-radicaux proches d’Al-Qaïda, une mission quasi impossible.
« Il ne faut pas parler de ces gens-là aux combattants de l’ASL, ça les rend nerveux ! Je suis sur la ligne de front avec une katiba de Liwa al-Towheed, une organisatuion propre à Alep. Je n’ai pas pu parler avec leur chef, gravement blessé et soigné en Turquie. Ce sont des gens de milieux populaires, très religieux, mais simples, en aucun cas des salafistes ; eux, ils ont respecté la trêve lors de l’Aïd, contrairement, par exemple, à la fameuse milice Jahbet al-Nosra. Je dois dire que, si l’ASL encaisse le coup pour le moment et se révèle bien déprimée, les islamistes que je côtoie, par contre, se battent avec acharnement et restent le fer de lance de la révolution sur le front.
Lien(s) utile(s) : Le Soir.be
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