L'agression
de Montebourg vis-à-vis de Mittal, et surtout la menace d'une nationalisation,
même provisoire, de l'intégralité du site de Florange met une extraordinaire
pression sur... François Hollande.
En évoquant publiquement, et avec la fougue dont il est coutumier, la
possibilité d'une nationalisation des activités d'ArcelorMittal à Florange,
Arnaud Montebourg a volontairement jeté un lourd pavé dans une mare si profonde
qu'il n'est plus question d'aller l'y récupérer.
En clair, plus de marche arrière possible - ou du moins plus de choix
possible pour François Hollande qui devient dépendant de la
décision que prendra Lakshmi Mittal. Plus vraiment d'alternative, soit il
approuve le principe de privatisation "temporaire" avec tous les risques que
cela suppose, soit il la refuse et dans ce cas, il se le verra reprocher
jusqu'à la fin de son mandat par tous ceux, et ils sont
nombreux, qui trouvent l'idée magnifique. Sarkozy a trainé Gandrange comme
un boulet pendant 4 ans, grâce à Montebourg, Hollande ne peux pas prendre le
risque de trainer Florange derrière lui pendant...4 ans.
Déjà les syndicalistes, les
élus de Moselle, sans compter le Front de Gauche, lui mettent une énorme
pression pour qu'il s'engage dans cette voie. Une bonne petite nationalisation,
symbole de la toute puissance de l'Etat, vous imaginez comme la tentation est
forte.
Pour Hollande, l'annonce tonitruante de son ministre est un piège dont il
aura du mal à sortir car tout cela ressemble furieusement à une fausse bonne
idée ou selon la manière dont veut le voir, à une vraie mauvaise
idée.
Outre le procédé en lui-même tout à fait contestable qui montre encore une
fois que le gouvernement n'a pas tout compris au fonctionnement d'une économie
mondialisée, les conséquences négatives d'une telle nationalisation sont
potentiellement très nombreuses.
Comment espérer attirer des industriels étrangers si la menace du chantage à
la nationalisation pèse sur eux?
Il y a bien évidemment sa complexité et son coût mais également l'impact sur
l'image de la France qui risque d'en prendre un sacré coup. Comment espérer
attirer des industriels étrangers si la menace du chantage à la nationalisation
pèse sur eux dès qu'ils auront la velléité de vouloir rationaliser leurs outils
de production ?
Il y a également les conséquences sur les autres activités d'ArcelorMittal
en France. Le site de Dunkerque serait directement exposé puisqu'il fournit
l'acier transformé à Florange. Plus généralement il m'étonnerait qu'après un
coup comme celui-ci, Mittal, soit dans de très bonnes dispositions vis-à-vis de
la France dans laquelle il emploie 20 000 personnes.
Il y a enfin, le fâcheux précédent qui aura été créé. Déjà on entend les
salariés du chantier Naval de
Saint-Nazaire qui trouvant l'idée excellente, demandent à en "bénéficier"
également. Demain ce seront ceux de Petroplus puisqu'il semble que
l'hypothétique repreneur Libyen fasse faux bon et puis ceux de Peugeot qui vont
demander la nationalisation de l'usine d'Aulnay, pourquoi pas, on serait
exactement dans le même cas de figure!
Comment alors expliquer à tous ces gens que ce que l'Etat a fait ou s'est
dit prêt à faire pour Florange, il n'est pas prêt à le faire pour
eux ?
Jusqu'à présent le Gouvernement pouvait se contenter de ne pas faire de
promesse en laissant sous-entendre que la gestion des entreprises n'était pas
de son ressort. Après la déclaration de Montebourg, il n'aura pas besoin
d'avoir fait une quelconque promesse pour qu'on lui reproche de ne pas avoir
sauvé les emplois en nationalisant. Sur le plan politique c'est évidemment
beaucoup plus difficile à gérer et je ne suis pas certain qu'Hollande ait
vraiment besoin de cela.
Cette menace de nationalisation n'aurait dû rester qu'un énorme mais discret
bluff. Il eût fallut utiliser la menace auprès de Mittal, en espérant paraître
assez convaincant pour que celui-ci fasse marche arrière sur la fermeture des
hauts-fourneaux. Même dans le cas ou Mittal n'aurait pas cédé sur les
hauts-fourneaux, le gouvernement aurait probablement pu obtenir des concessions
sur d'autres points.
Cette menace de nationalisation n'aurait dû rester qu'un énorme mais discret
bluff.
Au lieu de ça, tout à son souci de se mettre en avant, de prouver que l'Etat
est tout puissant et qu'il ne reculera devant rien pour sauver Florange, Arnaud
Montebourg a hyper-médiatisé l'option, s'interdisant par là même de faire
marche arrière. Pire encore, quoi qu'il advienne de ce dossier, il a imposé la
nationalisation sanction comme une option possible et sérieuse. Et ça personne
ne l'oubliera - ni les salariés, ni les investisseurs étrangers.
François Hollande peut remercier son ministre du Redressement Productif: il
l'a mis dans une très mauvaise situation.
L'actualité va vite (Ce billet a été écrit hier avant la décision du Gouvernement de renoncer à la nationalisation) et elle peut très vite contredire les propos du blogueur. En l'occurrence et évidemment en toute modestie
j'aurais tendance à penser que le développement de l'actualité confirme pleinement mon propos. On s'aperçoit que le gouvernement ne tenait absolument pas à nationaliser, pour les raisons que j'ai évoquées, et on s'aperçoit également, comme je l'ai également écrit, que cette idée a fait naitre de faux espoirs qui ont été déçus. Déjà les salariés et les syndicats crient à la trahison et gageons que le Front de Gauche va s'emparer de l'affaire pour répéter que ce gouvernement n'a décidément pas de c......