Quatre statuts et surtout quatre manières de vivre. Que l’on soit salarié, fonctionnaire, patron ou actionnaire notre manière d’appréhender le monde varie considérablement. Les préoccupations de certains de ces rôles peuvent en effet paraître dérisoires aux autres. Voyons de manière synthétique quels sont les avantages et inconvénients de chacun. Bien entendu cette typologie est quelque peu arbitraire, ces rôles pouvant différer assez fortement en fonction des régions, des métiers et des secteurs d’activité. De plus certaines personnes cumulent plusieurs de ces statuts en même temps.
Pour différencier ces quatre rôles, je vais m’appuyer sur la pyramide des besoins de Maslov, déjà utilisée dans cet article. Pour rappel celle-ci détaille la hiérarchie des différents besoins de l’être humain, commençant par la survie, suivie de la sécurité, de l’appartenance, de l’estime et enfin la réalisation de soi.
La classification utilisée ci-dessous ne repose que sur des considérations générales, sans validation par des données empiriques. Comme déjà mentionné en début d’article ces quatre statuts peuvent considérablement varier en fonction des circonstances. Les notes vont de 1 (la plus mauvaise) à 5 (la meilleure). Chaque besoin de Maslov est détaillé par trois à quatre critères.
Du point de vue des besoins fondamentaux de survie, c’est l’actionnaire qui sort gagnant, celui-ci étant couvert par un revenu normalement suffisant (mais qui peut varier en fonction de sa fortune et de ses placements). L’actionnaire bénéficie surtout de beaucoup plus de repos (vacances, temps libre, horaires peu contraignants) que les autres statuts, ce qui explique aussi qu’il est soumis à moins de stress (sauf si ses placements sont précaires et peu diversifiés). Le fonctionnaire est pas trop mal placé, avec passablement de temps de repos et peu de stress. Le patron peut s’appuyer sur un bon revenu, mais au détriment d’une charge de travail très importante et beaucoup de pression. Enfin le salarié ferme la marche, avec un stress important, qui n’est compensé ni par du temps de repos, ni par un revenu intéressant.
Du point de vue des besoins de sécurité, la donne est presque similaire. L’actionnaire sort gagnant, avec presque tous les critères au vert. Il est au dessus de la norme pour la croissance de son revenu, la richesse et la stabilité de son emploi. Par contre il est largement en dessous du point de vue du soutien social, ce qui est un peu normal tout de même… Le patron est à la même enseigne pour la croissance de son revenu et sa richesse, par contre son emploi est nettement moins stable puisqu’il peut faire faillite ou être remercié par les actionnaires. Il bénéfice d’un tout petit plus de soutien de la société que l’actionnaire, mais ça reste très modeste. Le fonctionnaire quant à lui bénéficie d’un fort soutien social et de la stabilité de l’emploi, mais par contre d’une richesse moindre et d’une croissance des revenus léthargique. Le salarié arrive une nouvelle fois en queue de peloton, avec également une stagnation de ses revenus, un patrimoine modeste, un soutien social moyen et pour combler le tout une stabilité précaire de son emploi.
En ce qui concerne le comblement des besoins d’appartenance, la donne est un peu différente. Le patron arrive en tête, avec un statut social important, des échanges en termes de communication également bien présents, mais néanmoins aussi un lien social un peu faible, avec la fameuse solitude du patron. Les fonctionnaires et les salariés sont sur pied d’égalité, avec un lien social fort, une communication moyenne mais un statut social moindre. Enfin l’actionnaire arrive sur la dernière marche, avec les trois critères mal pourvus, en particulier le lien social.
Pour la satisfaction des besoins de reconnaissance, ce sont le salarié et le patron qui arrivent en tête. L’utilité du travail du premier lui vaut l’estime de la société, par contre il ne bénéficie que de très peu de pouvoir. Au contraire le patron a une grande emprise sur la société, son travail est aussi reconnu comme utile, car pourvoyeur de places de travail, mais il n’est guère estimé par les classes sociales inférieures, surtout en France. Le fonctionnaire arrive en 3e position, avec très peu de pouvoir, un travail qui est considéré comme peu utile et une reconnaissance sociale moyenne. L’actionnaire ferme la marche, avec une utilité considérée comme insignifiante, une estime de la société nulle (surtout depuis 2008) et un pouvoir qui est assez faible, car dissolu parmi la masse des actionnaires. Seuls les grands actionnaires majoritaires bénéficient en effet d’une rélle influence.
Concernant la réalisation de soi, les actionnaires et les patrons arrivent nettement devant les salariés et les fonctionnaires. Les deux premiers bénéficient en effet d’une large autonomie, de capacité de co-décider et peuvent s’épanouir dans leur quotidien, au contraire des deux activités dépendantes.
De manière globale, nous avons deux entités distinctes, les « décideurs » (patrons et actionnaires), qui arrivent loin devant les salariés et les fonctionnaires. Les patrons sont assez bons dans tous les domaines, avec un petit bémol au niveau qualité de vie (manque de temps de repos et stress). Les actionnaires ont des besoins qui sont plus que satisfaits au niveau survie, sécurité et réalisation de soi, par contre ils ont beaucoup de problèmes au niveau de l’appartenance à un groupe et à la reconnaissance sociale qui va souvent de pair. Les fonctionnaires ont des besoins qui sont moyennement satisfaits de manière générale. Cela se passe pas trop mal au niveau de la survie, sécurité, appartenance sociale, mais un peu moins bien au niveau de la reconnaissance sociale et de la réalisation de soi. Pour les salariés enfin, c’est assez médiocre sur tout, sauf au niveau de l’estime que la société leur porte, notamment grâce à l’utilité de leur travail.
Bref, il n’y a pas de statut miracle, qui verrait tous ses besoins comblés. Néanmoins, même s’il y a des zones d’ombre, il vaut mieux être patron ou actionnaire, que fonctionnaire ou salarié. Mais ça vous le saviez déjà.