Une sinistre apparition de rats morts dans la ville d’Oran marque le début du roman. Cette présence macabre génère des réactions diverses d’inquiétude chez les uns ou d’indifférence chez les autres. L’un des personnages, nommé Grand, décrète par exemple : « J’ai d’autres soucis ». Puis les rats disparaissent et des formes inquiétantes d’épidémie (bubons sous les aisselles, sur le cou et à l’aine) se déclenchent alors chez certains patients du docteur Rieux (personnage principal de cette « chronique » dont il se déclarera le narrateur à la fin du roman).
Dés lors, il faut définitivement admettre l’inadmissible : la maladie, dont les signes avant-coureurs se multiplient, est la peste, cette maladie quasi « légendaire », dont on connaît la réputation, les ravages, mais dont on ne supporte par la réalité. Et pourtant, jusqu’au dernier moment, beaucoup refusent encore l’évidence, cherchent à se rassurer, à gagner du temps et c’est tout le sens du chapitre consacré à la réunion de la « commission sanitaire » qui réunit les autorités civiles et médicales et qui montre les ultimes tergiversations. En 1947, date de la parution de cette œuvre qui vaudra à Camus le prix Nobel de littérature, cet épisode résonne particulièrement dans la mémoire de ceux qui ont assisté à l’irrésistible montée de la « peste brune » et constaté la lâcheté des pays d’Europe face à la montée du nazisme.
Alors que la peste s’installe, chacun est renvoyé à lui-même et à sa propre liberté d’agir face au fléau. Le marchand de vin Cottard (qui voit dans les conditions nouvelles l’occasion d’un commerce juteux), l’écrivain Grand (qui travaille inlassablement ses phrases pour trouver la meilleure), le journaliste Rambert (qui décide de rester « au combat » plutôt que de rejoindre sa femme dont il est éperdument amoureux), le prêtre Paneloux (qui insiste sur la malédiction du ciel et qui invite les hommes à se repentir), le docteur Rieux (qui ne croit pas en Dieu et qui affirme face à Paneloux que la meilleure miséricorde consiste à assumer sa fonction de médecin et de résister).
Avec Tarrou, autre résistant dont il partage les idées et en plus des soins qu’il dispense comme il peut, Rieux organise par exemple de nouvelles « commissions sanitaires » pour lutter à l’aide de bénévoles. Avec acharnement, il se lance dans cette « bonne action » qui lui vient naturellement et au sujet de laquelle il ne souhaite tirer aucune gloriole : il affirme que le fait de parler d’héroïsme à propos de ceux qui ont choisi le combat, ce serait rendre hommage au Mal. Mieux vaut mettre cette force de conviction au service de la lutte contre cet ennemi barbare, qui frappe aveuglément l’humanité. Le combat peut sembler dérisoire, déséquilibré, mais, même s’il est absurde, il trouve tout son sens dans l’affirmation de la grandeur humaine.
Alors qu’en est-il de la réflexion sur le nazisme ? La Peste, roman allégorique sur le nazisme et sur l’Occupation ? Oran, mise en quarantaine, est le théâtre unique de cette tragédie. Ceux qui ont fait le choix de la lucidité et de la résistance, montrent la présence horrible de la peste, à travers l’abjection de la maladie et la mort (certains passages qu’on a cités comme ceux relatifs au nombre de cadavres et aux mesures radicales prises pour faire disparaitre les corps évoquent explicitement le souvenir des camps de concentration), ou aussi à travers l’abjection morale de collaborateurs qui se frottent les mains de la présence de l’Ennemi ! (Cottard ne supportera pas l’arrêt de l’épidémie et se mettra à tirer sur la foule).
Mais il ne faudrait pas réduire la force du roman à cette évocation à peine voilée du nazisme. Toute sa dimension tragique tient aussi à ces multiples moments de réflexion au sujet de la condition humaine... Chemin faisant, à bord de ce vaisseau empesté, de cette ville de lamentation, Camus ne cesse de s’interroger sur l’homme, sa grandeur et ses limites. Il interroge les rêves, les aspirations, les angoisses... La mort est toujours à l’horizon de la ville, elle établit une frontière, une quarantaine, et conduit l’écrivain (et le lecteur) à s’interroger sur sa propre fin, ou, plus largement sur cette habitude du désespoir à laquelle se résigne la ville. Toute la ville ressemblait à une salle d’attente. Avec la précision et la lucidité du médecin, Camus nous amène aussi à réfléchir sur la meilleure façon dont il nous faut, en tant qu’homme libre, utiliser cette attente.
Dans la version théâtrale moins connue de la Peste, Francis Huster est seul en scène, seul devant l’œil des caméras. Caméras qui, par la force des choses, imposent une vision au spectateur, un cadre, un geste, un regard, bref, un point de vue. Dans un décor qui ressemble à celui d’une salle d’attente, l’acteur se lance dans un numéro d’interprétation. Au début, on entend la voix de Camus qui avait commencé à travailler le texte sous la direction de Jean-Louis Barrault...
Et puis le défilé des personnages commence : tous, petits et grands, héros et salauds, tous plongés dans la peste, vaille que vaille, le concierge, dégoûté par ces rats qui envahissent son immeuble et qui salissent sa réputation, le docteur Rieux, Rambert, Tarrou, Paneloux, Cottard, Grand, la mère de Rieux, sa femme, et toute la foule des anonymes, hallucinés, épouvantés, courant dans l’espace clos de la ville bouclée comme au fond d’une trappe.
La peste est un incendie qui consume Oran, une rafale de cendre. Homme de cinéma ou de théâtre, ou les deux à la fois, Francis Huster souffle les braises de ce texte qui s’insinue dans les consciences, passe, brule, fouille, réveille les vieux tourments, ceux de la Peste brune et de l’Occupation, des tortures, des bassesses, des grandeurs. Par bribes, le texte du roman émerge, monte, revient à la mémoire du spectateur. Le discours de Paneloux, les ganglions sur le corps, l’agonie des rats, les tramways de la mort, les fosses improvisées... Au bout du compte, le texte est l’acteur magistral. La victoire ultime d’un Grand qui serait arrivé au bout de sa nuit et de son entreprise romanesque. Huster l’a ressuscité, lui qui l’a joué pas loin de mille fois. Pour reprendre la belle définition de Diderot : Le comédien s’est démené sans rien sentir et vous avez senti sans vous démener.
L’histoire progresse à toute allure. Signes avant-coureurs, épidémie, contagion des rats, contagion des hommes, lutte, défilades, hésitations... Puis un jour le rideau se lève sur Oran, cette ville « qui tourne le dos à la mer », et la peste s’en va. Tonnerre et frénésie. Immense soulagement, musique, feux d’artifices. La mise en scène se referme sur l’air que chante Montand : « les feuilles mortes se ramassent à la pelle ». Mais les derniers mots du roman résonnent encore dans les esprits quand le comédien abandonne le banc de salle d’attente : « Écoutant, en effet, les cris d'allégresse qui montaient de la ville, Rieux se souvenait que cette allégresse était toujours menacée. Car il savait ce que cette foule en joie ignorait, et qu'on peut lire dans les livres, que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu'il peut rester pendant des dizaines d'années endormi dans les meubles et le linge, qu'il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses, et que, peut-être, le jour viendrait où, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrait mourir dans une cité heureuse ».
Vient le moment de l’échange. Dans le noir où, faute de projecteur, il se détache à peine, Francis Huster est-il sorti tout net de l’écran pour venir à la rencontre du public ? Effet d’optique ou cinématographique ? Mieux que la 3D ? Comme dans le film de Woody Allen, « la Rose pourpre du Caire », où l’on voit le personnage sortir de l’écran, le comédien n’est plus dans la toile. Après le générique de fin, il est là, en chair et en os... sauf que le défaut d’éclairage (pénombre du plateau) dissimule un peu son visage. La voix est la même, on croirait entendre parler le docteur Rieux.
Il évoque Camus, les origines de la pièce, les différentes versions du texte. Il cite des anecdotes, évoque d’autres noms, Christian Dior, Voltaire, Racine, Molière... indique qu’il y a deux types d’écrivains, ceux qui « créent des ponts » avec le lecteur, « ceux qui n’en créent pas ». Il parle du personnage de Tarrou qu’il préfère, parce qu’il est l’Homme, à la différence de Rieux, qui, lui, est une sorte d’automate qui traverse la vie, qui survit à la peste mais qui ne « se salit pas les mains ». On s’attendrait à le voir changer de voix, à le voir redevenir Tarrou, le concierge, Paneloux, Grand... Mais le temps du jeu est terminé et il faut libérer la salle, tout à l’heure, il y a James Bond au CGR.
Pour terminer cette série, je livre au lecteur trois extraits qui m’ont paru particulièrement forts et riches à exploiter dans « la Peste ».
Extrait 1 : le discours de Paneloux
Paneloux tendit ici ses deux bras courts dans la direction du parvis, comme s'il montrait quelque chose derrière le rideau mouvant de la pluie : « Mes frères, dit-il avec force, c'est la même chasse mortelle qui court aujourd'hui dans nos rues. Voyez-le, cet ange de la peste, beau comme Lucifer et brillant comme le mal lui-même, dressé au-dessus de vos toits, la main droite portant l'épieu rouge à hauteur de sa tête, la main gauche désignant l'une de vos maisons. À l'instant, peut-être, son doigt se tend vers votre porte, l'épieu résonne sur le bois ; à l'instant encore, la peste entre chez vous, s'assied dans votre chambre et attend votre retour. Elle est là, patiente et attentive, assurée comme l'ordre même du monde. Cette main qu'elle vous tendra, nulle puissance terrestre et pas même, sachez-le bien, la vaine science humaine, ne peut faire que vous l'évitiez. Et battus sur l'aire sanglante de la douleur, vous serez rejetés avec la paille. » Ici, le Père reprit avec plus d'ampleur encore l'image pathétique du fléau. Il évoqua l'immense pièce de bois tournoyant au-dessus de la ville, frappant au hasard et se relevant ensanglantée, éparpillant enfin le sang et la douleur humaine « pour des semailles qui prépareraient les moissons de la vérité ».
Au bout de sa longue période, le Père Paneloux s'arrêta, les cheveux sur le front, le corps agité d'un tremblement que ses mains communiquaient à la chaire et reprit, plus sourdement, mais sur un ton accusateur : « Oui, l'heure est venue de réfléchir. Vous avez cru qu'il vous suffirait de visiter Dieu le dimanche pour être libres de vos journées. Vous avez pensé que quelques génuflexions le paieraient bien assez de votre insouciance criminelle. Mais Dieu n'est pas tiède. Ces rapports espacés ne suffisaient pas à sa dévorante tendresse. Il voulait vous voir plus longtemps, c'est sa manière de vous aimer et, à vrai dire, c'est la seule manière d'aimer. Voilà pourquoi, fatigué d'attendre votre venue, il a laissé le fléau vous visiter comme il a visité toutes les villes du péché depuis que les hommes ont une histoire. Vous savez maintenant ce qu'est le péché, comme l'ont su Caïn et ses fils, ceux d'avant le déluge, ceux de Sodome et de Gomorrhe, Pharaon et Job et aussi tous les maudits. Et comme tous ceux-là l'ont fait, c'est un regard neuf que vous portez sur les êtres et sur les choses depuis le jour où cette ville a refermé ses murs autour de vous et du fléau. Vous savez maintenant et enfin qu'il faut venir à l'essentiel. »
Un vent humide s'engouffrait à présent sous la nef et les flammes des cierges se courbèrent en grésillant. Une odeur épaisse de cire, des toux, un éternuement montèrent vers le Père Paneloux qui, revenant sur son exposé avec une subtilité qui fut très appréciée, reprit d'une voix calme : « Beaucoup d'entre vous, je le sais, se demandent justement où je veux en venir. Je veux vous faire venir à la vérité et vous apprendre à vous réjouir, malgré tout ce que j'ai dit. Le temps n'est plus où des conseils, une main fraternelle étaient les moyens de vous pousser vers le bien. Aujourd'hui, la vérité est un ordre. Et le chemin du salut, c'est un épieu rouge qui vous le montre et vous y pousse. C'est ici, mes frères, que se manifeste enfin la miséricorde divine qui a mis en toute chose le bien et le mal, la colère et la pitié, la peste et le salut. Ce fléau même qui vous meurtrit, il vous élève et vous montre la voie.
« Il y a bien longtemps, les chrétiens d'Abyssinie voyaient dans la peste un moyen efficace, d'origine divine, de gagner l'éternité. Ceux qui n'étaient pas atteints s'enroulaient dans les draps des pestiférés afin de mourir certainement. Sans doute, cette fureur de salut n'est-elle pas recommandable. Elle marque une précipitation regrettable, bien proche de l'orgueil. Il ne faut pas être plus pressé que Dieu et tout ce qui prétend accélérer l'ordre immuable, qu'il a établi une fois pour toutes, conduit à l'hérésie. Mais, du moins, cet exemple comporte sa leçon. À nos esprits plus clairvoyants, il fait valoir seulement cette lueur exquise d'éternité qui gît au fond de toute souffrance. Elle éclaire, cette lueur, les chemins crépusculaires qui mènent vers la délivrance. Elle manifeste la volonté divine qui, sans défaillance, transforme le mal en bien. Aujourd'hui encore, à travers ce cheminement de mort, d'angoisses et de clameurs, elle nous guide vers le silence essentiel et vers le principe de toute vie. Voilà, mes frères, l'immense consolation que je voulais vous apporter pour que ce ne soient pas seulement des paroles qui châtient que vous emportiez d'ici, mais aussi un verbe qui apaise. »
La Peste (première partie)
Extrait 2 : les victimes de la peste
Tant bien que mal, et jusqu'à la fin du mois d'août, nos concitoyens purent donc être conduits à leur dernière demeure sinon décemment, du moins dans un ordre suffisant pour que l'administration gardât la conscience qu'elle accomplissait son devoir. Mais il faut anticiper un peu sur la suite des événements pour rapporter les derniers procédés auxquels il fallut recourir. Sur le palier où la peste se maintint en effet à partir du mois d'août, l'accumulation des victimes surpassa de beaucoup les possibilités que pouvait offrir notre petit cimetière. On eut beau abattre des pans de mur, ouvrir aux morts une échappée sur les terrains environnants, il fallut bien vite trouver autre chose. On se décida d'abord à enterrer la nuit, ce qui, du coup, dispensa de prendre certains égards. On put entasser les corps de plus en plus nombreux dans les ambulances. Et les quelques promeneurs attardés qui, contre toute règle, se trouvaient encore dans les quartiers extérieurs après le couvre-feu (ou ceux que leur métier y amenait) rencontraient parfois de longues ambulances blanches qui filaient à toute allure, faisant résonner de leur timbre sans éclat les rues creuses de la nuit. Hâtivement, les corps étaient jetés dans les fosses. Ils n'avaient pas fini de basculer que les pelletées de chaux s'écrasaient sur leurs visages et la terre les recouvrait de façon anonyme, dans des trous que l'on creusait de plus en plus profonds.
Un peu plus tard cependant, on fut obligé de chercher ailleurs et de prendre encore du large. Un arrêté préfectoral expropria les occupants des concessions à perpétuité et l'on achemina vers le four crématoire tous les restes exhumés. Il fallut bientôt conduire les morts de la peste eux-mêmes à la crémation. Mais on dut utiliser alors l'ancien four d'incinération qui se trouvait à l'est de la ville, à l'extérieur des portes. On reporta plus loin le piquet de garde et un employé de la mairie facilita beaucoup la tâche des autorités en conseillant d'utiliser les tramways qui, autrefois, desservaient la corniche maritime, et qui se trouvaient sans emploi. À cet effet, on aménagea l'intérieur des baladeuses et des motrices en enlevant les sièges, et on détourna la voie à hauteur du four, qui devint ainsi une tête de ligne.
Et pendant toute la fin de l'été, comme au milieu des pluies de l'automne, on put voir le long de la corniche, au coeur de chaque nuit, passer d'étranges convois de tramways sans voyageurs, brimbalant au-dessus de la mer. Les habitants avaient fini par savoir ce qu'il en était. Et malgré les patrouilles qui interdisaient l'accès de la corniche, des groupes parvenaient à se glisser bien souvent dans les rochers qui surplombent les vagues, et à lancer des fleurs dans les baladeuses, au passage des tramways. On entendait alors les véhicules cahoter encore dans la nuit d'été, avec leur chargement de fleurs et de morts.
La Peste (partie trois)
Extrait 3 : la libération...
Du port obscur montèrent les premières fusées des réjouissances officielles. La ville les salua par une longue et sourde exclamation. Cottard, Tarrou, ceux et celle que Rieux avait aimés et perdus, tous, morts ou coupables, étaient oubliés. Le vieux avait raison, les hommes étaient toujours les mêmes. Mais c'était leur force et leur innocence et c'est ici que, par-dessus toute douleur, Rieux sentait qu'il les rejoignait. Au milieu des cris qui redoublaient de force et de durée, qui se répercutaient longuement jusqu'au pied de la terrasse, à mesure que les gerbes multicolores s'élevaient plus nombreuses dans le ciel, le docteur Rieux décida alors de rédiger le récit qui s'achève ici, pour ne pas être de ceux qui se taisent, pour témoigner en faveur de ces pestiférés, pour laisser du moins un souvenir de l'injustice et de la violence qui leur avaient été faites, et pour dire simplement ce qu'on apprend au milieu des fléaux, qu'il y a dans les hommes plus de choses à admirer que de choses à mépriser.
Mais il savait cependant que cette chronique ne pouvait pas être celle de la victoire définitive. Elle ne pouvait être que le témoignage de ce qu'il avait fallu accomplir et que, sans doute, devraient accomplir encore, contre la terreur et son arme inlassable, malgré leurs déchirements personnels, tous les hommes qui, ne pouvant être des saints et refusant d'admettre les fléaux, s'efforcent cependant d’être des médecins.
Écoutant, en effet, les cris d'allégresse qui montaient de la ville, Rieux se souvenait que cette allégresse était toujours menacée. Car il savait ce que cette foule en joie ignorait, et qu'on peut lire dans les livres, que le bacille de la peste ne meurt ni ne disparaît jamais, qu'il peut rester pendant des dizaines d'années endormi dans les meubles et le linge, qu'il attend patiemment dans les chambres, les caves, les malles, les mouchoirs et les paperasses, et que, peut-être, le jour viendrait où, pour le malheur et l'enseignement des hommes, la peste réveillerait ses rats et les enverrait mourir dans une cité heureuse.
La Peste (partie cinq)