Les récentes déclarations d'Arnaud Montebourg concernant ArcelorMittal ont suscité de nombreuses réactions à l'étranger : indignation en Inde, moqueries depuis Londres...
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
L’opinion publique indienne remontée
Nous avons déjà évoqué dans ces colonnes les propos de D. Cameron déroulant le tapis rouge ou de Boris Johnson, déjà, parlant de la tyrannie qui régnait à Paris. Il se trouve que le Maire de Londres est actuellement en voyage en Inde, à New Delhi. Comme vous l’imaginez, les propos de Arnaud Montebourg déclarant « Nous ne voulons plus de Mittal en France parce qu’ils n’ont pas respecté la France » sont repris, commentés dans toute la presse indienne dans des termes fort peu élogieux. Sur les sites internet d’information, la déclaration a levé un mouvement de réactions comme l’Inde n’en a pas le souvenir. « Raciste » est le mot qui revient le plus souvent. Les noms d’oiseaux « crétin, imbécile, cinglé… », les appels à annuler la commande de « Rafales », à annuler « tous les contrats avec l’industrie française », pullulent…. il y a comme un vent de boycott qui souffle sur le deuxième pays le plus peuplé au monde.
Boris Johnson, Maire de Londres invite Mittal à s’installer dans la « capitale mondiale des affaires »
Est-ce parce qu’il eut peur que la proportion prise en Inde par cette déclaration tonitruante de notre ministre du « redressement productif » ne fasse de l’ombre à son propre voyage, est-ce parce qu’il ne rate jamais une occasion de fustiger les « sans culottes coupeurs de têtes » du gouvernement Hollande ou simplement pour marquer sa différence, lui qui vient en Inde en ami pour négocier de nouveaux investissements, avec les « crazy froggies » qui se permettent d’insulter un entrepreneur indien qui emploie 20 000 personnes sur leur territoire national ?
En tous cas, le maire de Londres, Boris Johnson, s’est moqué ouvertement d’Arnaud Montebourg mardi 27 novembre. Il a déclaré, entre autres : « Je vois que les ‘Sans-culottes’ semblent avoir capturé le gouvernement à Paris. Le ministre français a été tellement extravagant en demandant qu’un investissement massif quitte la France », s’est-il amusé, poursuivant « Je n’ai aucune hésitation à dire ici : ‘Venez à Londres, mes amis’ » (en français dans le texte), venez, Monsieur Mittal, venez, investisseurs d’Inde ! » a-t-il lancé lors d’une rencontre avec des hommes d’affaires indiens dans la capitale fédérale, « Venez dans la capitale mondiale des affaires », a-t-il ajouté, « là où 73 entreprises indiennes sont cotées sur le London Stock Exchange et où les entreprises indiennes lèvent déjà 53% de leurs capitaux internationaux ». Le maire de Londres a en outre rappelé qu’une sculpture géante en acier construite par Arcelor-Mittal pour les Jeux Olympiques de sa ville symbolisait l’amitié entre Londres et l’Inde.
La nationalisation, espérons que ce n’est pas sérieux…
Pour l’instant, au moment où nous écrivons, rien n’a transpiré de l’entretien entre Mittal et Hollande, si ce n’est que chacun est resté sur ses positions et que le Président français a évoqué la possibilité d’un vote d’une loi de nationalisation dans les tous prochains jours. Cette nationalisation porterait sur l’ensemble du site et non pas seulement sur les haut fourneaux.
Le ministre du « redressement productif » a évoqué deux pistes de repreneurs. Espérons que ses tuyaux soient un petit moins crevés que ceux qui concernent la raffinerie de Petroplus à Rouen, puisque nous venons d’apprendre aujourd’hui que le fonds d’investissement libyen que le ministre avait évoqué à plusieurs reprises vient de déclarer qu’il n’a jamais été intéressé par la reprise de Petroplus. Surtout, il est clair que le contexte économique d’aujourd’hui et des années qui viennent en Europe n’est pas à l’augmentation de la consommation d’acier. L’Europe a une surcapacité de production. Quels sites fermer ? Forcément ceux qui ont un coût de production plus élevé. Si le gouvernement veut sauver la sidérurgie française, toute la sidérurgie française, il suffit qu’il supprime intégralement les charges et les reporte sur la consommation. Instantanément, vous verrez que ce seront d’autres sites européens qui fermeront car l’acier français redeviendra compétitif.
Maintenant, si le gouvernement se lance dans la nationalisation, je serais curieux qu’on m’explique en quoi le fait de nationaliser va réduire le coût de production ! Je serais curieux qu’on m’explique en quoi le fait de nationaliser va offrir des débouchés à l’acier produit ! Outre l’indemnisation qu’il va falloir payer à Monsieur Mittal, l’exploitation du complexe va générer des pertes qu’il faudra bien que la collectivité essuie. La revente ? Expliquez moi pourquoi demain un industriel achètera ce qu’il n’est pas prêt à reprendre aujourd’hui. Parce la ligne froide sera vendue avec ? Oui, bien sûr, et une fois encore l’État français se fera couillonner car personne ne peut maintenir en activité un haut fourneau qui perd de l’argent. Quelques temps après le rachat, l’acquéreur fermera le haut fourneau et conservera la ligne froide qui est rentable. L’État n’aura servi qu’à spolier Mittal pour transmettre l’actif rentable à vil prix à un concurrent. Les salariés seront floués, les contribuables seront floués, les relations avec l’Inde durablement entachées, le tout pour rien.
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