La poissonniere.

Profitant d’une de nos rares sorties hors du château, nous fîmes une rapide halte, hier après-midi dans un supermarché dont je tairai le nom. Pour vous mettre sur la piste sachez seulement que ce nom commence par les lettres CO et se termine par RA.

Comme j’ai un faible pour les poissonneries, je me précipitai au rayon  » La marée est trop belle » afin de découvrir les nouveaux arrivages de cadavres océaniques.

Là, deux petits marmots (des pré- adolescents locaux) avec une pointe d’angoisse dans la voix tentaient d’alerter la jeune vendeuse : « Madame, Madame, venez vite, il y a un gros crabe qui essaie de sortir de son aquarium ! »

La charmante jeune poissonnière tenta de les rassurer : « Mais non, il ne peut pas sortir. Il essaye, il essaye mais ce sera toujours sans succès ! »

À ce moment, je pensais qu’il était temps que j’intervienne et m’adressai à la jeune vendeuse : « Quelle vision horrible que nous donnons à ces enfants ! Cette liberté chérie auquel nous avons tous droits, nous la refusons à ces pauvres crabes tourteaux. Quelle tristesse ! »

- » Comme vous avez raison cher Monsieur, répliqua la marchande. Ces pauvres animaux vont mourir, c’est certain et vous m’en voyez affreusement peiné. C’est tous les jours la même chose, chaque fois que je prends mon poste dans ce magasin mon coeur saigne abondamment en pensant à tous les meurtres dont nous sommes témoins en silence. Les tourteaux méritent mieux. Mais, Monsieur soyez sûrs que nous payerons un jour notre lâcheté !  »

À ce moment, la poissonnière écrasa une larme furtive et je pensais donc  qu’il était grand temps de changer de rayon et de me faire l’avocat de la défense des choux-fleurs et autres rutabagas.