C'est l'univers littéraire de l'écrivain Osamu Dazai qui est ici porté à l'écran. Au travers de l'amour Sachi pour son mari, dans le Tokyo d'après guerre, la Femme de Villon propose au spectateur le portrait de deux natures qui s'opposent, se confrontent et s'appellent.
Sachi est une épouse japonaise modèle, dévouée à son mari et prête à tout endurer au nom de l'amour qu'elle lui porte. Et il lui en faudra pour surmonter les difficultés que lui apporte son mari ! Ce n'est pas l'absence d'amour qui le pousse à la boisson, à l'infidélité ou au vol, ce sont ses profondes pulsions auto-destructrices... C'est on âme d'écrivain torturé, qui l'interroge régulièrement sur ce que la mort a à lui proposer. Face à cette montagne de sabotage se dresse une montagne d'amour et de courage... Sachi est presque son alter-ego dans la voie positive, le négatif de Otani, elle est une pulsion de vie brute et généreuse.
Ce qu'il y a de beau dans La Femme de Villon, c'est sa capacité à esquiver tout mélo. Loin d'être une histoire sur la déchirure du couple ou un amour agonisant, il préfère aborder ce couple en difficulté sous le regard bien différent de l'équilibre. S'ils sont opposés, Sachi et Otani ne sont pas ennemis pour autant. Bien au contraire, ils se complètent et offrent à l'autre le contrepoids nécessaire pour atteindre l'équilibre. Même si traitement de la lumière de Sachi est bien supérieur à celui des pulsions auto-destructrices de son mari, La Femme de Villon, c'est bien d'équilibre dont il est question dans le film Kichitaro Negishi, d'équilibre et d'amour. Délicatement et pudiquement, La Femme de Villon nous emmène dans l'intimité tourmentée d'un couple qui s'aime, incapable de vivre l'un sans l'autre.
Sobrement, Kichitaro Negishi dévoile une mécanique de l'amour au spectateur. S'appuyant sur deux acteurs parfaits (elle, Takako Matsu et lui Tadanobu Asano), la Femme de Villon installe un rythme lancinant, comme s'il fallait savoir observer pour comprendre les forces qui animent Sachi et Otani et accepter l'idée que l'amour peut revêtir un autre visage que celui d'un roman Harlequin. Beaucoup de finesse et de belles choses dans ce film délicat, mais si nous adhérons à sa proposition et à son rythme lent, on sera cependant un poil plus septique sur la vision du japon d'après guerre, un peu trop "proprette" pour réellement convaincre. Qu'importe, Le Femme de Villon est une de ces belles histoire japonaises dans laquelle la finesse s'exprime avec douceur et pertinence. On lui préférera davantage Still Walking, plus limpide, plus fin, plus subtil encore, mais La Femme de Villon mérite très largement d'être découverte, elle est douce et discrète, mais ses qualités, comme son actrice, sont belles et touchantes !
Seul hic, il sera peut être difficile de le découvrir en France ;-)
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