Quand on a un emploi du temps serré et que l’on étudie le planning d’un festival comme le PIFFF, le plus dur c’est de se rendre compte qu’un film que l’on désire ardemment voir sera hors de portée. C’est le problème des projections uniques, et au PIFFF, il n’y a que cela, des projections uniques. J’aurais aimé voir le nouvel « Universal Soldier » (si si !) dont le taulier de « Fun,culture et pop » m’a dit le plus grand bien, mais je n’ai pas pu. Alors quand l’un des films qui a éveillé mon attention se révèle accessible, la satisfaction est immense… et la déception d’autant plus cruelle.
La projection a commencé par un amuse-bouche étrange, un court-métrage philippin produit par Justin Lin (oui oui, celui qui a réalisé les « Fast & Furious » !), intitulé Vesuvius. Sans dialogue aucun, le film montre la Vierge apparaissant de façon presque inquiétante à un jeune lui-même louche, du genre j’aimerais-pas-le-croiser-à-3h-du-mat’-dans-une-ruelle-celui-là, ce genre de louche là. Pas mal pour mettre l’ambiance avant « Modus Anomali », d’autant que l’on s’y plaît à reconnaître Rustica Carpio, une vieille actrice que l’on croise souvent chez Brillante Mendoza, dans Lola ou le récent Captive.
Juste avant le lancement de « Modus Anomali » nous a été projeté un petit message vidéo introductif par le réalisateur lui-même, Joko Anwar, grâce auquel il a fait se marrer la salle en qualifiant son film de « familial » et susceptible de plaire aux enfants français, alors que tout le monde se doutait bien du contraire. Dommage que la blague fut meilleure que le film lui-même. Du potentiel que je distinguais sur le papier, je n’ai pas trouvé grand-chose à l’écran. Seule l’esbroufe a fait son apparition. Jamais le film n’est parvenu à me convaincre, pas même dans sa première partie prometteuse. Un homme s'y réveille en pleine forêt, à moitié enterré vivant, sans aucun souvenir de qui il est ou ce qu’il fait là. Une fois sorti de son trou, la panique le gagne vite, et se décuple lorsqu’il trouve une maison enfoncée dans les bois dans laquelle il trouve le cadavre d’une femme qui ressemble comme deux gouttes d’eau à la femme présente en photo avec deux enfants dans son portefeuille. Sa femme. Ses enfants. Il va alors se mettre en quête de ces derniers, tout en prenant soin d’éviter de tomber sur le psychopathe qui s’est attaqué à sa famille.
Prenez le coup du téléphone, un détail qui en dit long sur les problèmes du scénario. Notre héros, John, lorsqu’il se réveille enterré vivant, a la présence d’esprit d’attraper son téléphone et d’appeler les secours, parce qu’il se dit tout de même que c’est plus que louche de se réveiller enterré vivant, même s’il ne se souvient de rien. Mais quand, au bout du fil, les secours lui demandent son nom et qu’il se rend compte qu’il ne se souvient pas de comment il s’appelle, que fait-il ce brave John ? Il raccroche, laisse tomber son téléphone, fouille son portefeuille et passe à autre chose, laissant là son téléphone. Hein ? Quoi ? Tu te réveilles dans la forêt, tu sais pas où t’es, qui t’es, qui t’a foutu vivant dans un trou, et tu laisses ton téléphone derrière toi, John ? D’entrée de jeu, un détail comme ça me fait tiquer. J’ai vu suffisamment de films du genre pour être agacé par un scénario qui n’essaie même pas de nous faire croire au truc. L’empathie ne nait jamais puisqu’on ne croit jamais au personnage central. Cela finit même par confiner au ridicule lorsque les actions inconsidérées du protagoniste finissent par avoir des conséquences néfastes. C’est peut-être même cela le pire. Il arrive un point dans « Modus Anomali » où après nous avoir baladés en vain dans la forêt pendant plus d’une heure, la seule réaction devient le rire face au grand-guignolesque même pas cherché. Le rire ne vient pas d’un humour noir corrosif, mais de portes ouvertes au ridicule qui rendent même le film prévisible (et oui et franchement, avoir tourné le film en anglais, c’était aussi une très mauvaise idée qui n’arrange rien…).
Ainsi s’est achevé mon PIFFF 2012, trop vite après avoir commencé trop tardivement. Mais 2013 sera certainement une année différente, si la fin du monde nous est épargnée, non ?