Si chaque jour apporte son lot de révélation, il semble bien que si les deux camps ont triché, ce n'est pas de la même manière. Il parait de plus en plus claire qu'il y a eu tricherie massive, généralisée et, probablement, organisée chez Coppé et simplement tricheries locales, improvisées chez Fillon.
Tout a été fait du coté de chez Coppé pour interdire la victoire de Fillon : gestion des fichiers d'adhérents, financement par le parti de la campagne du candidat, organisation des bureaux de vote, gestion des procurations… ce qui fait penser que cela a été organisé, voulu au plus haut niveau. Demain, peut-être, découvrira-t-on, un chef d'orchestre, un cabinet noir autour de Coppé chargé de cela. On apprendra ce qui s'est dit dans le secret de réunions consacrées à l'organisation de la campagne. Les séries télévisées américaines qui traitent de politique (The Good Wife) nous ont familiarisé avec les coups bas que les opposants d'un même parti pouvaient se porter. Cela pourrait y ressembler.
Reste à comprendre ce qui peut pousser des militants à s'engager ainsi si violemment. On comprendrait s'il ne s'agissait que de quelques individus, attachés à leur carrière, mais ce sont probablement des dizaines et des dizaines de militants pro-Coppé sans vraie ambition politique qui ont mis la main à la pâte. Dans le cas du PS, la tricherie pouvait s'expliquer par le rejet que suscitait Ségolène Royal chez beaucoup de responsables du parti. Il ne semble pas que ce soit le cas à l'UMP. Est-ce l'intensité de la compétition? Le sentiment que rien n'était joué malgré les sondages favorables à Fillon? le sentiment que cela n'avait pas d'importance? qu'une élection interne n'était pas une élection comme les autres? ou, de manière peut-être plus subtile, un habitus du coup d'Etat?
L'histoire de la droite est remplie de coups d'Etat, de putsch, depuis De Gaulle, en passant par Chirac, Balladur et Sarkozy. Le pouvoir s'y conquiert le sabre à la main. Et les militants n'ont-ils peut-être vus dans ces tricheries organisées massivement qu'une réédition de tous ces coups qui ont fait, au fil de l'histoire de ces 50 dernières années, leurs dirigeants. Ils savent que la victoire vole au secours du plus hardi, que l'opinion, d'abord choquée, finit par se laisser séduire, que les militants du camp adverse cèdent rapidement au charme de l'audacieux. Reste que cette fois-ci l'audacieux a trouvé un adversaire coriace et hargneux, sûr de son bon droit qui ne semble pas décidé à céder. Et qui se trouve dans l'obligation d'aller au bout. Céderait-il maintenant qu'il passerait aux yeux mêmes de ses amis pour un lâche incapable de les mener au combat. Même chose pour Coppé. La solution ne peut venir que des entourages. Le premier qui cédera, qui marquera son envie d'en finir au plus vite quel qu'en soit le coût, amorcera la retraite de son champion.