Alors qu’il vient d’être diffusé au PIFFF et que le très attendu Hobbit va bientôt débarquer dans les salles, aujourd’hui nous revenons donc sur le premier film de sale gosse de Peter Jackson : Bad Taste.
On ne s’en rappelle peut-être pas très bien mais celui qui nous a gratifié de l’un des plus grands monuments du cinéma (j’ai nommé Le Seigneur des Anneaux) a commencé en bricolant de petits films entre amis dans son village de Nouvelle-Zélande. A l’instar de Sam Raimi, Peter Jackson est l’une de ces figures tout droit issues du cinéma d’horreur des années 80 qui n’a pas envie de se prendre au sérieux mais qui fait tout de suite preuve d’une inventivité et d’une passion sans bornes pour le cinéma de genre.Ainsi, Peter Jackson réalise son premier film dans son village natale avec une bande d’amis en tournant le weekend après le travail. Il aura fallu 4 ans avant que le film ne se termine grâce au soutien inattendu mais bienvenu du gouvernement néo-zélandais qui permettra alors de passer du court au long-métrage. Une initiative surprenante devant le mauvais goût affiché de ce premier film qu revendique complètement son côté cheap mais un pari payant quand on voit que que le réalisateur donne aujourd’hui au pays.
Pour la petite histoire, Bad Taste parle donc de l’invasion d’un village par une bande d’extra-terrestres belliqueux et un peu débiles qui a bien l’intention de transformer la race humaine en chair à pâtée pour leur fast food. Mais une poignée de résistant est là pour les stopper, armes à la main. Plaidoyer contre la malbouffe qui s’ignore peut-être, le film est surtout l’occasion pour Peter Jackson de s’amuser avec ses amis avec une histoire complètement délirante. Jouant complètement sur son manque de budget, il multiplie les effets cheap, les punchlines décalées, les petites références à certaines classiques du genre et surtout entretient un véritable mauvais goût, que ce soit par son histoire mais aussi par le look des extra-terrestres, les effets gores ou certaines scènes (la dégustation de la « soupe» ). Tout ça ne vole pas bien haut mais l’honnêteté mise en l’entreprise pour délivrer une telle série Z fait clairement plaisir à voir.
Mais surtout, le film transpire la passion du réalisateur pour le cinéma de genre et pour le métier. A la fois réalisateur, créateur des maquillages trashs et acteur de 2 rôles, Peter Jackson, avec un budget ridicule et un planning chaotique fait tout de même preuve d’une maitrise technique qui ne demande qu’à être perfectionnée. Il n’y a pas à dire, en plus de s’amuser, il a bien un sens du rythme, du découpage et du cadrage qui peut être remarqué. Le film révèle ainsi un réalisateur particulièrement inventif et surtout faisant preuve d’une foi immense en son projet (on ne s’implique pas 4 ans comme ça pour rien), une foi et une passion qui resteront le moteur de son cinéma, sans jamais oublier son humour.
Alors oui, Bad Taste est clairement un nanar fauché mais Peter Jackson n’est pas le premier à venir de là et on se souvient bien que certains grands réalisateurs (Coppola par exemple) ont débuté chez Corman. La seule différence est que le réalisateur est venu présenter son long-métrage au marché du film de Cannes et a tapé dans l’œil de distributeurs qui ont décidé de lui offrir sa chance pour qu’il devienne aujourd’hui un film de potes qui amuse bien plus que les amis de PJ.
La suite, on a connait, Peter Jackson va toujours afficher son humour trash (les Feebles, Braindead) avant de montrer d’autres facettes de sa personnalité (Créatures Célestes) puis se faire remarquer par Hollywood (Fantômes contre Fantômes) avant d’en devenir l’un de ses plus grands créateurs. Finalement, Bad Taste est bien la preuve qu’à l’époque, tout était encore possible en démarrant un film dans un petit pays très loin du système … et on doute malheureusement que cela soit encore possible de nos jours.