Le Grenelle de l'environnement de 2007 avait permis d'engager un dialogue environnemental entre toutes les parties prenantes du développement durable. En 2012, le Premier ministre vient d'annoncer la mise en place d'une "commission du dialogue" dont l'objet est pourtant contraire au principe du dialogue environnemental. Un erreur.
Je vous propose tout d'abord la lecture de ce communiqué de presse diffusé par le Premier ministre ce 25 novembre et intitulé "Engagement du Gouvernement à contribuer au développement économique et social du Grand Ouest".
Paradoxalement, alors que le nouveau Président de la République a érigé en principe de sa politique le souci de la concertation, le dialogue environnemental va mal, qu'il s'agisse du débat national sur l'énergie ou de la création de l'aéroport de Notre-Dame des Landes.
En premier lieu, un dialogue environnemental ne peut être engagé sur des conditions préalables qui en ruinent le principe même.
Or, ce communiqué de presse, tant par son titre que par ses premières lignes est très clair : il n'y aura pas de remise en cause de la décision de création de l'aéroport de Notre-Dame des Landes. Au demeurant, tant le Président de la République que le Premier ministre, le Ministre de l'intérieur ou la Porte parole du Gouvernement ont tous confirmé la mise en service d'un aéroport pourtant ruineux pour les finances publiques et le développement durable.
Le Premier ministre a donc annoncé la mise en place d'une "commission du dialogue" qui n'a aucunement pour objet d'entretenir un dialogue mais bien celui de confirmer une décision déjà prise par le Premier ministre lui-même. Relisons le communiqué sur ce point :
"Dans un souci d'apaisement, le gouvernement confiera dès la semaine prochaine à une commission du dialogue le soin d'exposer ce projet et d'entendre toutes les parties prenantes."
La "commission du dialogue" sur l'aéroport a donc pour objet d'"apaiser" tout comme le "comité des sages" sur l'énergie aura vocation "d'apaiser" le débat sur l'énergie. Ce retour de la figure du "sage" qui vient chapeauter le dialogue des parties prenantes - doit retenir l'attention. A quoi servira cette "commission du dialogue" ? A deux choses : "exposer" et "entendre".
Cette commission du dialogue n'a donc nullement pour but le dialogue mais l'explication de texte. Le Premier ministre a sans doute l'espoir de convaincre le plus grand nombre des raisons de son choix en faveur d'une infrastructure pensée dans les années 60.
En second lieu, le dialogue environnemental suppose l'organisation d'une "gouvernance à cinq" où toutes les parties soient représentées de manière équilibrée. Le dialogue environnemental suppose des échanges directs et la possibilité d'une négociation.
Il est donc bien éloigné des tentatives de concertation par commissions interposées. Or, qu'il s'agisse du débat national sur la transition énergétique ou de l'aéroport de Notre-Dame des Landes, le Gouvernement n'a pas choisi de réunir les cinq acteurs du dialogue environnemental mais de convoquer une "commission du dialogue" ou un "comité des sages" qui apparaissent au premier plan politique et médiatique. Les cinq parties prenantes sont reléguées au second plan, par exemple dans un "Parlement" qui n'en est pas un, s'agissant du débat sur l'énergie.
En troisième lieu, le dialogue environnemental suppose que l'Etat soit représenté par un ministère de l'écologie puissant et impliqué. Or, le communiqué de presse précité est diffusé par le Premier ministre. Il s'agit pourtant d'un dossier qui intéresse le ministère de l'écologie à un double titre : celui de l'écologie et celui des transports.
En conclusion, alors que la conférence environnemental des 14 et 15 septembre devait préfigurer une relance de l'intérêt pour l'écologie grâce à la mise en place d'une gouvernance à 5+1 dans un futur Conseil national de la transition énergétique, il devient urgent de restaurer un vrai dialogue environnemental à l'égal du dialogue social.
A défaut, l'opposition entre écologie et économie ne cessera de se renforcer et les positions des différentes parties prenantes continueront de se radicaliser, de s'éloigner.
Un erreur, tant pour l'écologie que pour l'économie.