Dessin de Barly Baruti, texte de Dany Masson
A Goma, terre noire, terre chaude, terre de cendres et de vies. A Goma, ma sœur, A Goma, Au Nord Kivu dans la tourmente. Aux femmes, aux Enfants, Aux hommes, a Nos Frères et à Nos Soeurs qui fuient. A cette humanité abandonnée. A Goma ville sœur, ville de transit, ville de commerces. A Goma, ville d’eau, ville plurielle. A Goma, ville de cris et de larmes. A Goma où le son des canons ont remplacés le Chant des Tambours, Goma, Ô Ngoma !
Il était en Virunga, des girafes, des vaches, des Gorilles, de Grands singes blancs aussi, de hauts eucalyptus, de grands baobabs et des bambous à perte de vue, mille et une sortes qui faisaient la faune et la flore de nos grands espaces de nos hautes cimes accrochées au ciel bleu de nos aïeux.
Nous pouvions lire aux lignes dessinées sur les pelages, comme aux lignes dessinées sur la paume des mains des hommes. L’avenir, la vie, la mort, l’amour, la chance et bien d’autres voies encore.
Aujourd’hui, un ciel fauve, reflet du grand lac de feu éternel du Nyiragongo à la lave éternelle comme les neiges au dessus du Kilimandjaro. Le ciel fauve éclaire mes os qui dessinent des lignes de mort tout au long de mon long cou. Dans le Rift africain, dans les veines du parc de la Virunga, je suis lasse de cet ouragan de feu qui sèche les pluies de mon enfance.
Le matin, là haut, au dessus des nuages, je tourne le cou à gauche, à droite ou au centre, les yeux vides se tournent vers la misère et la pauvreté et des nuées pour linceuls. Ô nature notre mère qui fit de nous des êtres et des hommes, où es tu ?
Les balles et le cri des femmes, la recherche de l’Or noir, le sang de la terre, l’exploitation de la misère, ont remplacés dans le grand parc les longues cornes au lait de miel dont la vallée se réputait. Les vaches paissaient où maintenant les hommes et les êtres trépassent. Le pétrole remplace le caoutchouc sur l’autel de nos peines séculaires.
Où sont les anges de nos ancêtres, les amulettes, les statuettes ? Où est partie notre sagesse ? Où sont les anges, nos ancêtres ? Mes os ont froid sous ce ciel aux couleurs si chaudes. Sous ce ciel aux couleurs de sang les hommes sont comme des volcans.
Comme le magma, les hommes s’infiltrent dans les fissures, éclatent nos vies, écartent nos proches. Les lèvres de nos femmes ainsi percées s’ouvrent, tandis que les cris retentissent, sous le ciel de feu, le ciel de sang qui fait des hommes, des volcans.
L’Okapi, mon frère, ne viendra pas en Virunga. Car ses yeux et son cœur pleurent au son des balles des lâches.
Il était en Virunga, des paysans courageux, des femmes fières, belles, aux jambes longues et fines comme celles des gazelles. Il était en Virunga des girafes charpentées comme des tréteaux hauts marchant la tête vers le haut. Il était en Virunga la vie de notre beau pays et le Masisi pour grenier.
Aux larmes citoyens succèderont les charmes retrouvés de nos mères. Pays, à mi chemin entre ère nouvelle au milieu de nulle part, nous émergerons par ton fleuve, par tes lacs et tes chemins, jeunes et vieux, nous te ferons beau, comme sur le pétrin, des ses mains, l’homme fait sont pain. Ô mon Congo, Ô Congo de nos aïeux.