Oui, je sais, ce titre est démesurément long. À l'inverse du billet, pour une fois : soyez donc rassurés, amis lecteurs. Surtout, il doit sans doute vous apparaître bien abscons. Diable, que veut encore nous dire ce vieux fou de Tonton Pierrot, au style aussi incompréhensible que les traits de ses misérables gribouillages ? Encore une de ces questions existentielles qui ne taraude que son existence ? Pas tant que cela : heureusement, je dors très bien.
Pour déterminer plus précisément le sujet de mon billet, le plus simple est encore de prendre des exemples concrets. Déjà, l'inévitable forme de l'apostrophe sur Wikipédia, sujet absolument vital pour l'avenir du projet et même du monde tout entier, et la résurgence des conflits qu'elle a récemment provoquée : on a pu le voir sur la page de requêtes aux administrateurs, avec les calculs d'épicier d'Akeron, ou plus explicitement sur le Bistro du 20 novembre : la solution qui a été retenue, et qui a donc été appliquée avec un zèle confondant par Akeron, pour arbitrer entre les droits dans leur bottes et les admirateurs des belles courbes, fut de laisser la primauté du choix au "contributeur principal" de l'article considéré. Autrement dit, pour éviter les guerres d'éditions, on se range à la décision de celui qui a écrit l'article. Et peu importe qu'il en résulte un total manque de cohérence entre les articles. Pas une première, après tout, puisque le récent blocage d'Ediacara — totalement justifié par ailleurs étant donné le caractère systématique de la monomanie massive de l'intéressé, consistant à aménager les bas de page à sa façon, et depuis porté à une durée indéfinie devant la persistance de ce comportement doublée d'abus de faux-nez — a aussi (mais pas seulement, donc, et heureusement) été basé sur le mécontentement d'un des contributeurs principaux. Et Azurfrog est à cet égard très clair : "vouloir imposer une présentation de bas de page, sujet éminemment contentieux et sans décision consensuelle de la communauté (puisque je comprends que c'est au cœur du débat) contre l'avis du contributeur principal de l'article, c'est pousser celui-ci à abandonner l'article". Deux exemples récents qui semblent donc porter au pinacle une règle qui n'a rien de communautaire, et rien d'évident non plus, et que j'ai déjà vue appliquer, il y a deux ans, au moment de la guerre nucléaire sur la boiste de conserve.
Bien évidemment, une telle démarche ne peut trouver son sens que lorsqu'on est simultanément en présence d'un conflit sur une question de forme et d'une absence totale de règles ou de consensus communautaires sur le sujet. En réalité, il y a trois éléments qui justifient cette approche, au demeurant assez pragmatique :
- C'est un moyen assez simple de régler un conflit qui serait sinon insoluble. Encore faut-il toutefois déterminer qui est le "contributeur principal", qui n'est pas forcément le créateur. Et ce n'est pas toujours évident.
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Il s'agit de respecter le travail de celui qui a construit l'article, et qui n'a pas forcément à se voir imposer des lubies extérieures s'il ne s'agit
pas de règles que toute la communauté doit respecter.
- Comme le soulignait Azurfrog, un tel contributeur peut être amené à claquer la porte si on ne lui témoigne pas ce minimum de respect.
Pourtant, si j'entends bien toutes ces raisons, et l'application ponctuelle de cette méthode de règlement d'un conflit, les principes qui sont en jeu, ainsi que les conséquences qui en découlent, ne me permettent pas de l'approuver entièrement. En tout cas, pas les interprétations qui semblent se dessiner, à savoir sa généralisation et sa mise en exergue pour justifier des blocages en écriture. Il y a deux raisons, à mon sens fondamentales, à cela :
- Pour le contenu encyclopédique, il s'agit d'un frein évident à une nécessaire uniformisation. La présentation d'articles encyclopédiques importe autant que le contenu, et il est nécessaire que les structures, ainsi que les conventions typographiques, soient les mêmes pour chaque article. C'est le sens de l'existence des règles et conventions formelles, et un objectif vers lequel il faut tendre le plus possible. En ce sens, laisser, en cas de problème, le contributeur principal décider de certaines de ces questions à sa guise est contre-productif.
- Et surtout, dans le mot "Wikipédia", il y a "wiki". Je ne crois pas avoir besoin d'en rappeler la définition. Je me contenterai de dire que le projet wikipédien est un projet collaboratif, et qu'une de ses grandes dimensions est qu'un article n'appartient à personne, et que toutes et tous peuvent y contribuer. Or, là encore, laisser un "contributeur principal" avoir une mainmise formelle en revient à légitimer une forme d'appropriation partielle, en contradiction évidente avec l'essence même de ce qu'est un wiki.
Conclusion : une telle approche de règlement d'un conflit de forme, lorsqu'il n'y a aucun consensus (ou règles) communautaires pour le trancher, ne peut être que provisoire. C'est une disposition transitoire, un pis-aller pour régler un feu ponctuel. Problème : pour un nombre croissant de ces questions, on a maintenant du transitoire qui dure, parfois depuis plusieurs années. Le maintien, voire l'accroissement, de l'hétérogénéité formelle et de cette consécration du choix individuel (et non collectif) sont à déplorer, et non à encourager. On a l'impression maintenant que nombre s'en contentent, au lieu de susciter le nécessaire débat communautaire à chaque fois qu'un tel conflit apparaît. C'est une vision à courte vue là où il faudrait penser long terme et participatif ... Pour être clair : il serait temps que la communauté règle une fois pour toutes, de manière impérative, ces désaccords formels. Et pas se satisfaire que chaque contributeur fasse sa petite popote sans se soucier du reste. Sûr, de plus en plus, qu'il pourra alors invoquer ce qui semble devenir le "privilège du contributeur principal".