La Banque mondiale met en garde contre un scénario de catastrophe qui prévoit un réchauffement de la planète de 4 degrés d’ici à 2060. Inondations, sécheresse, montée des océans, etc. L’institution prédit une "cascade de cataclysmes" qui frapperaient alors la planète. Ces catastrophes se traduiraient par une aggravation de "pénuries d’eau" en Afrique de l’Est, au Moyen-Orient ou en Asie du Sud et un "important rebond" de la mortalité infantile en Afrique sub-saharienne. Certaines maladies véhiculées par les insectes (malaria, dengue) risquent également de trouver un nouvel essor tandis que les barrières de corail, "protections naturelles contre les inondations", pourraient ne pas résister aux retombées acides du CO2 dans l’océan, énumère la BM. Plus globalement, le changement climatique pourrait devenir "la plus grande menace à la biodiversité", selon ce rapport que la Banque a commandé à l’Institut de recherche sur l’impact du changement climatique de Potsdam (Allemagne). « Si nous n’agissons pas suffisamment contre le changement climatique, nous risquons de léguer à nos enfants un monde radicalement différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. Le changement climatique est l’un des principaux obstacles auquel se heurtent les efforts de développement, et nous avons la responsabilité morale d’agir pour le bien des générations futures, et en particulier les plus pauvres », déclare le président du groupe de la Banque mondiale, Jim Yong Kim.
Le rapport prévient qu’une augmentation de 4°C pourrait avoir des conséquences catastrophiques : inondation des villes côtières, risques accrus pesant sur la production vivrière et qui pourraient conduire à une hausse des taux de sous-alimentation et de malnutrition, aggravation sensible des pénuries d’eau dans beaucoup de régions, intensification des cyclones tropicaux, perte irréversible de la biodiversité, y compris dans les systèmes de récifs coralliens. « Les vagues de chaleur extrême qui, dans un monde sans réchauffement climatique, ne devraient survenir qu’une fois toutes les quelques centaines d’années, séviront presque tous les étés dans beaucoup de régions », prévient le rapport. Il ajoute qu’il sera observé vraisemblablement une élévation de 0,5 à 1 mètre du niveau moyen des mers d’ici à 2100, et des niveaux plus élevés sont également possibles. Certaines des villes les plus vulnérables à ce phénomène sont situées au Mozambique, à Madagascar, au Mexique, au Venezuela, en Inde, au Bangladesh, en Indonésie, aux Philippines et au Viet Nam. L’agriculture, les ressources en eau, la santé humaine, la biodiversité et les services écosystémiques seront vraisemblablement gravement touchés. Ces répercussions pourraient engendrer de vastes déplacements de populations, réduire la sécurité et perturber les systèmes économiques et le commerce. Beaucoup de petits États insulaires risquent de se trouver incapables d’assurer la survie de leurs populations.
Selon le rapport, le verdict scientifique est sans appel : les activités humaines sont responsables du réchauffement de la planète. La température moyenne globale ne cesse d’augmenter. Elle dépasse actuellement d’environ 0,8 °C les niveaux préindustriels. Bien que cela paraisse insignifiant, le rapport fait valoir que beaucoup d’effets des changements climatiques sont déjà observables et qu’une augmentation de 0,8 à 2,0 °C ou plus, posera des risques beaucoup plus importants. Une augmentation de la température moyenne de la planète de 4 °C s’approche des variations historiques connues. Il faut se rappeler qu’une baisse de la température moyenne globale d’environ 4,5 à 7 °C a été à l’origine de la dernière époque glaciaire, période au cours de laquelle la plus grande partie de l’Europe centrale et du nord des États-Unis a été recouverte d’une couche de glace de plusieurs kilomètres d’épaisseur. Or, les changements climatiques actuels induits par les activités humaines se mesurent non pas sur des millénaires, mais sur un siècle.
La hausse de 4 degrés n’est cependant pas inévitable, souligne le rapport. L’adoption de politiques de développement durable pourrait en effet permettre de limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 degrés, soit le seuil fixé par la communauté internationale — sachant que cette limite fait elle-même courir à l’environnement et aux populations humaines des risques non négligeables.
D’ailleurs, les travaux menés par le Groupe de la Banque mondiale sur la croissance verte et solidaire ont conduit à conclure qu’une utilisation plus efficace et plus intelligente de l’énergie et des ressources naturelles pourrait permettre de réduire radicalement l’impact du développement sur le climat sans pour autant ralentir les efforts de lutte contre la pauvreté ou la croissance économique.
Raphaël KAFANDO