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Agriculture pyrénéenne : Etat des lieux et solutions

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Coup d'œil sur l'évolution de l'agriculture montagnarde en Pyrénées

Au compte gouttes, les données du RGA 2010 apportent quelque précisons sur la situation et l'évolution de l'agriculture montagnarde dans les Pyrénées. Il convient cependant de rappeler que ces statistiques concernent le massif Pyrénéen, entité économique qui agrège des zones de proximité en étroite osmose avec les zones de montagne proprement dites, biaisant quelque peu la réalité de l'agriculture montagnarde.
Faiblesse de l'emploi dans les secteurs industriel et tertiaire

Le premier enseignement indique que la participation de l'agriculture dans l'emploi reste modérément importante puisqu'elle représente encore 8,4% des actifs en comparaison des 3,5% sur la scène nationale. Cependant, cette donnée relative doit tenir compte de la représentativité des autres secteurs : industriel et tertiaire. Or, il apparaît que c'est plutôt la faiblesse des emplois industriels (12,9% v.s 16.3% dans les Alpes ou même 18.2% dans le Massif Central) qui, par contre coup, majore cette sur-représentativité. La plus modeste part du secteur tertiaire (70,5% v.s 74,7% au plan national) accroit encore cet effet.
C'est aussi le signe que l'agrandissement généralisé des exploitations agricoles est encore à la traine dans ce massif.
Le Massif Pyrénéen reste le moins densément peuplé avec 27,8 hts/km² (Alpes : 65,3, Massif central : 45,8, Jura : 57,1, Vosges : 83,3, France : 112,9).

Un inventaire très axé sur l'élevage d'herbivores

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Résistance des exploitations pastorales

De même, alors que l'ensemble des exploitations agricoles du massif (13.096) subit une érosion de -23% par rapport à la situation de 2000, assez comparable au constat national (-22%), en revanche, la part des exploitations pastorales du massif (environ 30%) connaît une décrue plus modérée (-13%). C'est dans ce domaine aussi que le nombre d'installations reste le plus soutenu.
Dans le même temps la SAU du massif s'est rétrécie de 8,7% (plus modestement pour le cadre pastoral : -2%).

Des tailles variables

Cette concentration profite à l'agrandissement des exploitations. Celui-ci reste cependant discret compte tenu d'un passif majoritaire de petites exploitations. Parmi les exploitations pastorales la dominante reste celle de la petite exploitation, plus particulièrement pour la moitié ouest des Pyrénées (PA) incluant Haute-Garonne et Hautes-Pyrénées (surface moyenne de 30 ha, respectivement 30 ha, 35 ha, 22 ha) avec, cependant, un fort chargement animal (60 UGB/ EA dans les Pyrénées Atlantiques, v.s 48 UGB/EA sur l'ensemble pastoral du massif).

En Ariège, les exploitations pastorales sont de taille un peu supérieure : 50 ha, pour une charge d'herbivores de 42 UGB. Dans l'Aude et les Pyrénées-Orientales les surfaces atteignent respectivement 98 ha et 91 ha/EA mais sont de nature extensive (39 UGB, 45 UGB).

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Une décroissance soutenue des herbivores

Sur les estives, après une période post 72 de reconquête pastorale d'une trentaine d'années, on peut observer une décroissance soutenue pour l'ensemble de la gamme des herbivores durant la dernière décennie.
Dans l'ensemble du Massif celle-ci est plus modérée : -15,6% et - 4,3% respectivement pour les bovins (vaches) et les ovins (brebis).
Plus spécifiquement, ce sont les vaches laitières qui sont les plus délaissées (-23% vs -14% pour les vaches nourrices). Au contraire, chez les ovins, les brebis laitières surtout concentrées dans les Pyrénées Atlantiques, résistent mieux (-1% vs -11% pour les brebis nourrices). Cependant, les évolutions selon les départements sont contrastées. Pour les brebis laitières, le bassin de production des Pyrénées-Atlantiques est en légère diminution alors que cette spécialisation perce dans les Hautes Pyrénées et l'Ariège, plus modestement en Haute-Garonne, Pyrénées-Orientales et Aude.

Agriculture pyrénéenne : Etat des lieux et solutions

Parmi les brebis nourrices, les départements traditionnels de production sont en réduction d'effectif au contraire des Pyrénées-Atlantiques qui consolident un gain de 54%.
A l'exception de la Haute-Garonne, l'Ariège et l'Aude qui accroissent leur détention en juments, les autres départements sont en réduction d'effectif, aboutissant sur l'ensemble du Massif à une perte de -28% du cheptel équin.
Seul l'élevage de chèvres est en constant progrès (+16% pour l'ensemble Massif), mises à part les Hautes-Pyrénées qui décrochent légèrement (-9%).
Au total, 410.710 UGB sont élevées par les exploitations agricoles du Massif dont 254.308 UGB au sein des exploitations pastorales (62%). La perte en effectif d'herbivores sur le Massif est de l'ordre de -18%, avec un effet plus marqué pour les bovins laitiers et les ovins-viande.
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Davantage de bergers et de patous mais de façon déséquilibrée entre moitié orientale et moitié occidentale des Pyrénées

La présence de bergers ainsi que celles de patous sur les estives s'est nettement développée durant cette dernière décennie en lien direct avec celle des prédateurs comme l'Ours, les chiens errants, bientôt le Loup et sous l'influence des aides apportées par le PSEM (Plan de Soutien à l'Economie Montagnarde). Cependant, l'actualité est difficile à évaluer tant les modes de gardiennage sont variables.
A côté des bergers permanents qui ″ cabanent″ soit salariés ou bergers-éleveurs, il faut ajouter les bergers-éleveurs au sein des estives désservies par des pistes qui gardent le jour mais redescendent en plaine pour la nuit. Beaucoup d'autres éleveurs, notamment dans la moitié orientale des Pyrénées ne font que réaliser 2 à 3 visites par semaine en déléguant le soin de surveillance à des patous, certains même ne réalisent qu'une montée par semaine.
C'est dans les Pyrénées Atlantiques où leur présence est la plus soutenue compte tenu de la tradition de traite en estive pour une partie du troupeau, surtout en Béarn. Dans le pays basque, les éleveurs ont pour pratique de monter à tour de rôle, chaque semaine, dans les cayolars pour surveiller les manes. Ce sont donc environ 700 bergers (330 fixes en cabanes, 380 journaliers) qui accompagnent les animaux.
Dans la partie centrale et orientale des Pyrénées, à tradition viande, la présence de bergers est beaucoup moins soutenue et ne dépasse guère la cinquantaine respectivement pour les Hautes Pyrénées, l'Ariège et les Pyrénées-Orientales et de l'ordre de la vingtaine pour la Haute-Garonne ainsi que pour l'Aude. Parmi ceux-ci, en 2010, 338 prestataires ont bénéficié de l'aide apportée par le PSEM dont 164 salariés.
Sur l'ensemble du Massif, plus d'une centaine d'estives sont équipées de chiens patou. Le taux de pénétration est traditionnellement plus fort dans les PA, presque exclusivement en Béarn. Ailleurs, les scores sont assez faibles. Evidemment, en l'absence de bergers, la surveillance déléguée aux chiens de protection peut induire des conflits avec le tourisme d'été.
Une pluriactivité en baisse, plus de professionnels

Il est remarquable que la part de la pluriactivité a nettement régressé (25% en 2010 vs 35% en 2000), cependant encore très présente en Haute Garonne (30%) et en Haute Pyrénées (32%). C'est dire que l'agriculture, et notamment l'élevage, deviennent plus professionnels sans être encore taillés favorablement pour s'ancrer dans la durabilité.
En effet, dans le cadre d'une agriculture durable, la multi activité ne peut-être que marginale. Si l'acquisition de multi compétences, l'ouverture à d'autres horizons, apportent un enrichissement au plan individuel, il n'empêche que ces deux options peuvent s'opposer. Alors que la pérennité de l'agriculture se mesure sur le long terme, la pluriactivité est une distance de court terme ou plus précisément une réponse de court terme. Cette ressource ne peut que rester marginale car elle porte en germe la disparition de l'agriculture.
D'ailleurs, au plan foncier, la pluriactivité " squatte" de façon plus radicale la SAU que ne le fait en réalité le foncier à bâtir. Le foncier séquestré par l'habitat proliférant est souvent pointé du doigt compte tenu de la pression et de la distorsion de cours qu'il exerce sur la terre par ailleurs déjà rare.

De nouveaux accédants aux habitudes urbaines

Cette dérive est vécue comme une concurrence déloyale raréfiant l'outil de travail des agriculteurs. Elle est d'autant plus intégrée dans les esprits que la part des résidences secondaires parmi l'habitat est la plus importante de tous les massifs montagneux soit 35,6% (MC : 14,3%, Alpes : 26,6%, Vosges : 10,1%, Jura : 11,6%) et tend à se renforcer (+15,5% par rapport à 2000).
En réalité, le foncier détourné reste de faible dimension (une partie de la perte de 2% de la SAU des exploitations de type pastoral par rapport à 2000). En revanche, ce qui pose problème contient beaucoup dans le comportement des nouveaux accédants qui ne sont pas éleveurs et qui amènent avec eux des habitudes urbaines. Attirés par le décor façonné par l'élevage en termes de paysage, ils refusent de subir les inconvénients inhérents à cette activité, accusant leurs voisins éleveurs de nuisances multiples : bruits, odeurs, mouches, travail matinal, fèces sur les routes etc...
L'activité d'élevage ne peut pas raisonnablement cohabiter dans un habitat éclaté (mitage) mixte éleveurs-urbains. Or, c'est souvent la situation rencontrée lorsque les acquisitions foncières se font à partir des anciennes granges agricoles devenues désormais obsolètes pour un élevage modernisé mais rentables en termes de plus value pour les propriétaires terriens en activité ou à la retraite.
Il est urgent que les documents d'urbanisme imposent la protection du domaine agricole en évitant la dispersion de l'habitat en forme de mitage de l'outil de production de base qu'est la terre agricole.
Une filière ovin-viande fragilisée

La difficulté que rencontre l'élevage montagnard peut se résumer par l'analyse d'une filière fragilisée comme c'est le cas des ovins-viande. Sans avoir à remonter aux causes historiques de son déclin on peut aisément, au travers des résultats technico-économiques des exploitations, cerner quelques contraintes explicites de l'impasse actuelle.

Le poids des multiples aides

Agriculture pyrénéenne : Etat des lieux et solutions

Selon les systèmes et les zones d'exploitation, parmi les élevages ovins-viande qui pratiquent la transhumance, la part totale des aides représente 50 à 90% du produit brut d'exploitation. La production en elle-même devient donc un sous produit des primes.
Rapportées au revenu net, celles-ci représentent 200 à 500% de sa valeur. Ce fait n'échappe pas à certains analystes qui suggèrent tout de go de cesser de produire tout en réduisant de 1/3 le montant des primes versées ce qui, sans altérer le revenu de l'éleveur montagnard désormais sans travail, permettrait de réaliser de substancielles économies pour le contribuable.
Cherchons l'erreur ! Elle se niche à plusieurs étages :
1) Payer un revenu en échange d'aucun travail n'est pas éthiquement soutenable. Ce serait aussi provoquer une perte de savoir faire qui ferait cruellement défaut dès lors que les conditions économiques viendraient à se retourner, ce qui ne constitue pas une chimère au vu de la situation actuelle.

Derrière le métier de paysan, en aval, découlent des chaînes d'emplois (transformation, distribution, approvisionnement, jusqu'aux métiers de service des chambres consulaires et autres administrations qui en dépendent directement).
La densité d'habitants étant déjà faible, la perte supplémentaire de la composante agricole, fraction pérenne la plus stable car très ancrée au territoire, aboutirait à l'apparition de déserts humains comme cela s'est produit sur le versant espagnol.
2 ) La décomposition des coûts démontre que le prix de revient à la production reste supérieur à sa valorisation selon les cours nationaux. Il est évident que le consommateur bénéficie de cette distorsion et donc que sa dépense alimentaire est indirectement subventionnée. Dans ce système alambiqué où, d'un côté le contribuable bénéficie d'une aide alimentaire et, de l'autre côté, il contribue par ses impôts à alimenter les aides à l'Agriculture, d'aucuns prétendent que ce bricolage est à son tour dévoreur de frais de gestion et de redistribution, ce qui grève l'efficacité productive en imposant une chute du rendement économique.
La vérité des prix en direct ne serait-elle pas plus rentable ?
Rappelons qu'aujourd'hui la part de la dépense alimentaire consentie par les ménages est inférieure à celle qu'ils consacrent aux loisirs ou même à la santé en se situant autour de 14% de leur revenu. Dans les années 1950, au sortir de guerre, elle avoisinait 45%; il est vrai, avec un pouvoir d'achat beaucoup plus modique.

Dans les faits, globalement, ce système complexe permet de tirer avantage sur le positionnement de nos produits agricoles excédentaires sur le marché international en favorisant leur commerce par effet de dumping. En retour supplémentaire, les cours mondiaux des matières premières, dont font partie les ressources agricoles, sont ainsi artificiellement maintenus à bas niveau, ce qui reste profitable pour notre approvisionnement de pays riche.

Ce double effet se matérialise par une facilitation à l'export et une forme de TVA indirecte remboursée aux agriculteurs par le biais de primes, déboursée par le consommateur imposable, cependant, pour partie orchestrée et mutualisée à l'échelle européenne. Dans les faits, cette forme de " TVA" est une des plus sociale qui soit : les non imposables peuvent accéder à des produits alimentaires bon marché, les autres y vont de leur écot.
L'entretien du territoire

Une évidence s'impose, le métier d'agriculteur évolue, même si cette réalité fait résistance dans les esprits : la vocation de cette industrie n'est plus confinée uniquement dans l'acte productif de denrées alimentaires ou de matières agro-industrielles mais intervient aussi dans l'entretien du territoire. Action de tous temps réalisée mais jusqu'alors non marchandisée. Dès lors que dans notre Société post-rurale tout acte et tout service est évalué économiquement dans une vaste bourse d'échange commerciaux, cette contribution d'utilité générale mérite d'être à son tour valorisée.
Dans les régions classées en handicaps naturels, cette valeur est d'autant plus marchande qu'elle reste liée à l'économie du tourisme devenue la contributrice majoritaire de l'économie locale.
Il est donc indispensable d'évaluer ce service à sa juste valeur comme un bien productif. Le secteur des services ne constitue-t-il pas dorénavant le gite d'emploi majoritaire de notre Société ?
L'amour propre du monde agricole y retrouverait de sa fierté et aurait moins de réticence à s'engager dans un accompagnement plus vertueux envers la qualité environnementale dès lors que son travail d'entretien serait officiellement reconnu et jaugé économiquement comme une production ordinaire.

Pistes d'améliorations potentielles

Le constat du déséquilibre entre prix de revient et prix de vente demande d'activer conjointement plusieurs niveaux d'action en considérant les axes techniques de la productivité et de la commercialisation et un axe politique plus transversal.

1 - Une meilleure emprise sur les coûts de production

- Axe de la productivité zootechnique
Le bilan économique négatif, hors aides, est largement imputable au poste des charges de structure. Il parait indispensable de mieux les amortir, en particulier par UMO, mais aussi en saturant mieux les bâtiments et l'efficacité de travail.
En situation de montagne, avec des races rustiques et en tenant compte de la généralisation d'un système d'exploitation axé sur l'exploitation optimale des divers étages écologiques de la montagne (un agnelage principal d'automne, à contre saison, agnelles luttées tardivement à environ 18 mois), la productivité numérique ne peut guère espérer dépasser 100%. Gain sur la mortalité, lutte de rattrapage, amélioration de la prolificité sont des approches classiques pour élever ce critère. Cependant, la productivité pondérale constitue un meilleur indicateur de la production commercialisée, intégrant le taux de renouvellement et le poids carcasse des produits vendus.
Les marges de manœuvre sont assez réduites et concernent essentiellement:

- L'accroissement de l'effectif animal/UMO

Le meilleur amortisseur reste encore la taille du cheptel mené par UMO et/ou par exploitation agricole. En zone difficile le troupeau est souvent réduit pour cause s'insuffisance de foncier et aussi de capacité d'hébergement dans des bâtiments peu fonctionnels. Il serait nécessaire de pouvoir élever environ 500 à 600 brebis de race rustique viande par UMO. Ceci impose de disposer de structures adéquates pour améliorer l'efficacité du travail et en réduire la pénibilité mais aussi de pouvoir compter sur une SAU taillée à la mesure.
- Accroissement de la taille du foncier agricole

Le premier ajustement consiste à atteindre le plafond des 50 ha de SAU afin optimiser le droit à ICHN. Toutefois, cette norme reste insuffisante, même si le bénéfice de la transhumance permet d'accroître indirectement la surface de pâturage d'environ 1/4.

Mise en place en 1975, cette mesure prenait comme modèle l'exploitation traditionnelle de type familiale considérée comme viable. Ce concept n'est plus adapté car il est soumis aussi à dévaluation. Le monde agricole à beaucoup changé. Il s'est mis au diapason de la Société de consommation avec un besoin de dépenses courantes accru.

Un marqueur évident peut s'appréhender au travers de la présence des 4x4 dans les exploitations agricoles : quasiment absent dans les années 70, il est devenu la norme aujourd'hui. La conséquence est que pour 1,5 à 2 UMO familiales par EA, il conviendrait de disposer de 70 à 100 UGB (rappelons que la valeur moyenne du Massif au sein des exploitations pastorales est 49 UGB/EA).

La ressource en SAU dans les vallées montagnardes est limitée. Pour atteindre de tels objectifs, l'agrandissement des exploitations passe par la diminution de leur nombre, à la marge, par un meilleur usage des zones intermédiaires qui sont souvent en déprise agricole et le recours à de la main d'œuvre salariée.

Les SAFER (NDLB : Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural) ont un rôle important à jouer en privilégiant l'agrandissement des unités agricoles et en ne facilitant l'installation qu'à partir d'exploitations de taille viable.
- Des bergeries pépinières

Une voie indirecte pour faciliter ce besoin d'agrandissement du cheptel productif peut-être de se décharger de l'élevage et de l'hébergement des agnelles de renouvellement et même des béliers en dehors de la période de lutte libérant ainsi 15 à 20% de la disponibilité autonome au profit de l'accroissement du cheptel de brebis. A cet effet, des bergeries spécialisées dans la nurserie sous forme collective à statut coopératif, privé ou sociétaire pourraient prendre place, assurant en même temps un meilleur suivi de la croissance et du niveau sanitaire des futures reproductrices.

2 - Axe de la commercialisation

Une meilleure valorisation des produits
En économie de libre marché, il vaut mieux éviter la concurrence sur des positionnements produits où la qualification n'est pas en faveur des performances zootechniques des races rustiques exploitées ordinairement. C'est le cas des agneaux de boucherie, notamment de bergerie où les référents qualitatifs en matière de valorisation, tant en label qu'en produit courant, sont sous la coupe des qualités technologiques des carcasses (poids, état d'engraissement, conformation).
Restent les créneaux plus porteurs qui sont liés à la qualité de l'environnement et/ou à la rareté de la production, confortés par des SOQ (NDLB: signes officiels de qualité) avec affirmation du particularisme territorial comme une forme de production équitable et une qualité organoleptique reconnue par la réputation plutôt que démontrée. (AOP-AOC, IGP, Labels, Indication Montagne etc.)
Le marché Bio (à peine 4% de la production montagnarde) offre également une voie à développer d'autant que la mécanique institutionnelle est bien rôdée et que les élevages montagnards sont souvent naturellement peu écartés de cette pratique. La survalorisation de 20 à 30% est un atout à considérer, sans négliger le choix éthique qui l'accompagne !
Cependant, il importe que les circuits courts soient privilégiés de sorte à conserver le contrôle de la distribution. Non seulement parce que les marges sont plus confortables dans ce segment, mais aussi parce qu'il est important que les éleveurs restent directement au contact avec leur clients consommateurs pour mieux promouvoir leur image de marque. Option déjà défrichée, notamment par les exploitations pastorales qui pour 40% d'entre elles s'insèrent dans un circuit court et 30% adoptent la vente directe (19% et 26% respectivement pour l'ensemble Massif).
Parmi les différents types de produits plus spécifiques citons :

  • l'agneau laiton léger type catalan prisé pour ses qualités organoleptiques, ou bien satisfaire à l'opportunité du marché voisin (ternasco espagnol). Cette option offre l'avantage de raccourcir la phase d'élevage, de mieux correspondre aux caractéristiques de carcasse des races rustiques et ainsi de réduire la part des charges opérationnelles contenue dans l'achat des concentrés céréaliers.
  • l'agneau sous la mère mené à l'herbe sous la forme d'un jeune broutard, façon veaux rosée des Pyrénées (en fait agneau d'herbe). Ce produit particulier impose, cependant, un agnelage de printemps comme cela se pratique majoritairement dans les Alpes.
  • le jeune broutard (une saison d'estive) fini en sortie d'estive à l'image du broutard du pays de l'Ours.
  • les broutards matures (doublons ou brebis ayant profité de deux saisons d'estive) engraissés en pâturage d'estive comme le développe l'AOC Barèges-Gavarnie.

Avec l'espèce bovine le déséquilibre concurrentiel est moins sévère. Les races bouchères bien conformées mais qui restent encore agiles en montagne (Limousine, Blonde d'Aquitaine, voire Bazadaise) peuvent avantageusement produire des veaux de lait sous la mère à l'étable puis, ensuite, après tarissement, se refaire en estive.

Les races de pays rustiques (Gasconne, Aubrac) sont plus à leur affaire en production de broutards maigres souvent destinés à l'export. Cependant, la qualité environnementale n'est alors pas valorisée, seule la modicité du coût d'élevage reste avantageuse. C'est le cas aussi pour la croissance des élèves, futures reproductrices.

Un produit fini, le veau d'herbe sous la mère comme la Rosée des Pyrénées présente aussi une option intéressante en lien avec la particularité qualitative de la flore montagnarde pâturée.

3 - Axe politique

Plusieurs actions sont à entreprendre ou à réactualiser en raison de l'évolution de la Société :
- Révision de la norme plafond de 50 ha se SAU pour l'octroi des ICHN, celle-ci n'est plus en phase avec la normalité de l'exploitation agricole familiale d'aujourd'hui. 70 ha serait un objectif plus réaliste.
- Reprendre l'encadrement économique des conditions de transhumance. L'actuel support est non seulement fondé sur les ICHN, elle-même limitée au foncier de l'exploitation d'origine, mais, en plus, les surprimes de 10% en zone montagne et de 30% en zone de piémont pour encourager la transhumance sont très nettement insuffisantes. Dans les faits, étant donnée la gradation du montant de l'ICHN en fonction de la zone de handicap cela revient à une prime unique en valeur absolue de l'ordre 16 €/ha de SAU d'origine. Soit en moyenne 16 € à l'UGB pâturante et limité à 50 UGB (pour un chargement moyen de 1UGB/ha). Ceci ne répond pas à l'objectif supplémentaire d'entretien de cet espace d'altitude à usage majoritairement collectif où le service rendu doit être proportionné aux nombre de têtes d'herbivores tondeurs.

- Une rémunération objective pour le travail d'entretien que réalisent les troupeaux sur les estives. Dans ce cadre, le travail de tonte des herbivores profite à l'économie du tourisme. Une rémunération de cette activité sur la base de l'amortissement des animaux engagés dans cette tache durant la période d'estive pourrait servir de compromis. Estimée à 8 €/brebis soit 56 €/EB, cette contribution demanderait un appel budgétaire sur l'ensemble du Massif de 14 millions d'euros avec une évaluation totale de 250.000 UGB.

En contre partie, le besoin de gardiennage pour réactiver des pratiques plus en accord avec le rôle d'entretien des zones d'altitude multi partagées réclamerait un total de 1.000 couples de bergers-vachers (confirmé + débutant ou stagiaire) nécessitant un volume financier de 4000x4x1000= 16 millions d'euros.

Les ressources pour alimenter cet objectif pourraient être recherchées directement auprès de ceux qui bénéficient de ce travail : en premier lieu l'activité touristique tant au travers de ses consommateurs que de ses industriels-artisans. En second lieu, les propriétaires au statut souvent collectif (communes, syndicats valléens, Etat, groupements pastoraux, groupements fonciers pastoraux) qui devraient avoir à charge d'entretenir au minimum leur foncier ne serait-ce que face au risque d'incendie.

En ne retenant sommairement que le premier support et au vu d'un chiffre d'affaire de l'industrie touristique sur l'ensemble du Massif de l'ordre de 2 milliards d'euros, le prélèvement de 1%, équitablement partagé (0,5% acteurs liés au tourisme, 0,5% touristes (TVA ?)) dégagerait un financement de 20 millions d'euros.

Celui-ci serait à la hauteur de la rémunération pour le travail de tonte que réalisent les troupeaux des pastoralistes et l'excédent pourrait s'investir dans l'amélioration des structures de cet espace d'altitude (points d'eau, cabanes de berger, parcs de tri, etc.).
Quant aux salaires des bergers, ils pourraient être refacturés dans le coût de location des estives (baccade), faisant partie intégrante de cette pension estivale proposée par les gestionnaires d'estives.
Gérard Bozzolo
10/2012


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