Magazine Cinéma
Skyfall est le troisième volet du triptyque initiée avec Casino Royale en 2006 puis Quantum Of Solace en 2008. Et il est sans doute depuis bien longtemps un des meilleurs moments de la franchise exploitée par les Broccoli au travers d’une vingtaine de films plus ou moins inspirés. On renoue ici presque avec les origines et le James Bond 007 contre Dr. No réalisé en 1962 par Terrence Young où s’affrontaient Sean Connery et Joseph Wiseman – réincarnation improbable d’une sorte de Fu Man Chu – dans l’île de Crab Key au large de la Jamaïque. D’abord dans l’épure. Ici, la production est revenue sur la débauche de moyens techniques et de gadgets dont Roger Moore et ses succédanés s’étaient encombrés, afin sans doute, de se donner confiance, faute de jeu. Ici, Q – considérablement rajeuni – se concentre sur l’essentiel lorsqu’il confie à Bond un Beretta dont la crosse reconnaît la main de son maître et un émetteur radio : « A Gun and a Radio ». Tout est dit. Et pour le reste, on recyclera l’Aston Martin BD 5 gris métallisée de Goldfinger et de Opération Tonnerre. Ensuite, Sam Mendès – auteur notamment du formidable American Beauty (1999) et de l’implacable Les Noces rebelles (2008) – offre une réalisation efficace et distancée. Il s’attache à souligner l’inévitabilité du temps qui passe en montrant les failles de tous ses personnages qui vieillissent inexorablement. Il sait prendre la distance nécessaire face au héros iconique de Ian Fleming et brosse le portrait d’un méchant d’anthologie incarné par un Javier Bardem qui rappelle le serial killer qu’il incarnait dans No Country for Old Men - Non, ce pays n'est pas pour le vieil homme (2007) des frères Cohen. Enfin, il y a Bond. Un Daniel Craig injustement présenté dans le premier opus comme un Commander germanique blond aux yeux d’acier. Il incarne au contraire un personnage pétris de doutes qui n’est même plus en mesure de passer les tests physiques et psychologiques d’aptitude au service de sa Majesté. Et pourtant, il résume d’une phrase toute la force et toute l’ambiguïté de ce qu’il incarne désormais. A la question incrédule d’une Miss Moneypenny, tireuse d’élite qui lui demande : « What’s your hobby ? », Bond répond, impavide, « Resurrection ». Incontestablement… Arthur A.