Les Nations unies, qui ont fait du 25 novembre la Journée internationale contre les violences envers les femmes, avaient adopté, en 1994, une résolution sur l’élimination de ces violences.
Elle affirmait que «la violence à l’égard des femmes traduit des rapports de force historiquement inégaux entre hommes et femmes, lesquels ont abouti à la domination et à la discrimination exercées par les premiers et freiné la promotion des secondes, et [qu’]elle compte parmi les principaux mécanismes sociaux auxquels est due la subordination des femmes aux hommes.»
Les luttes féministes ont progressivement fait entrer cette question dans le domaine politique, réclamant un traitement politique. Elles ont fait admettre qu’il ne s’agit pas de déviances occasionnelles d’individus présentant des troubles agressifs, mais véritablement du symptôme le plus grave d’un système de domination séculaire et universel.
L’opinion réprouve l’usage du viol comme arme de guerre au Congo, la lapidation des femmes adultères en Iran, l’agression de fillettes qui revendiquent leur scolarisation en Afghanistan ou au Pakistan. Ces violences extrêmes doivent être dénoncées, combattues et condamnées. Mais, même si tout cela est très loin de la France, on ne peut mesurer l’état de l’égalité des droits à l’aune des pires situations. Il suffit de connaître le quotidien de la police, de la justice et des associations concernées pour voir qu’il n’en est rien. Les chiffres sont connus, mais très inférieurs à la réalité : par exemple, les soixante-quinze mille viols recensés chaque année ne représenteraient que 10 % du chiffre réel, la majorité des femmes victimes craignant de porter plainte. Mais la presse et l’opinion ne s’émeuvent que dans les cas outranciers, comme celui du procès récent de Créteil, lui-même violence infligée de nouveau aux deux victimes.
Une loi de lutte contre les violences a été adoptée en juillet 2010 : mais elle est incomplète, uniquement répressive, avec une ordonnance de protection mal connue et mal appliquée, sans formation des professionnels concernés et sans moyens. Le gouvernement actuel annonce vouloir une nouvelle loi et la création d’une instance nationale de lutte contre les violences.
La Ligue des Droits de l'Homme approuve cette volonté si la loi comporte un véritable volet préventif et éducatif, mobilisant les médias et l’Education nationale ; et si sont mis en place les moyens de son application réelle, à commencer par la formation des personnels judiciaires, une aide suffisante aux associations en charge des femmes victimes et des mécanismes de contrôle de l’application de la loi. Elle rappelle, enfin, que cette loi doit s’appliquer à toutes les femmes, y compris les étrangères non communautaires et les prostituées. Elle souhaite une forte volonté politique pour que soit mise en œuvre une loi complète et ambitieuse. Il ne s’agit rien de moins que d’avancer dans la transformation des rapports sociaux vers plus d’humanité, de justice et d’égalité.
La LDH célèbrera le 25 novembre en tenant une université d’automne sur la jeunesse, sa place dans la société et son attente de l’égalité entre les femmes et les hommes.
Te doy mis ojos traite de la violence conjugale. Autant dire le genre de sujet à manipuler avec précaution dès lors qu’on sort du champ documentaire. Le résultat est très intéressant, car la réalisatrice a choisi de bons angles d’approche .Par exemple, essayer de comprendre les deux parties, les traiter quasiment sur un pied d’égalité. Et puis prendre le sujet à bras-le-corps : pourquoi Pilar (Laia Marull) supporte-t-elle depuis près de dix ans les violences de son mari Antonio (Luis Tosar) ? Pourquoi ce dernier, malgré sa tentative de soins thérapeutiques, ne parvient-il pas à se contrôler ? Ne pas donner de réponse, se demander aussi comment. Et surtout choisir de montrer avec une économie de moyens qui se révèle très efficace. Les acteurs sont tous, jusqu’aux plus petits rôles, remarquables de justesse, et il faut saluer la performance de Laia Marull et Luis Tosar. Ils incarnent parfaitement celle qui donne ses yeux et celui qui ne peut ou ne veut rien voir.