Les récents propos de François Hollande font hurler les partisans du mariage homosexuel. Bien à tort. Il n'a fait qu'acter ce qui se produira lorsque le texte sera voté : les maires hostiles délégueront la cérémonie à un adjoint plus libéral. Ce faisant, François Hollande a voulu décrisper l'atmosphère. Il a eu raison. Et tous ceux qui, comme Noël Mamère, montent sur leurs grands chevaux feraient mieux de répondre aux opposants, de leur opposer des arguments. Car il y en a plusieurs.
Dans un post récent, j'indiquais qu'on avait de bonnes raisons de penser que l'adoption dans des familles homoparentales pouvait mieux se passer que dans des familles "normales". On pourrait également opposer aux adversaire du mariage pour tous, l'évolution rapide de cette institution. Il a suffi de trois générations pour qu'elle change complètement d'allure.
Je ne suis en rien un spécialiste de ces questions, mais il me suffit de regarder le cas de ma famille. Mes grands-parents avaient une famille élargie. Vivaient chez eux, leurs trois enfants, un oncle fauché qui faisait office de chauffeur, une nièce orpheline qui gardait les enfants et plusieurs domestiques. Famille rurale traditionnelle transposée dans une petite ville.
Mes parents illustraient à merveille la famille nucléaire : deux parents, deux enfants.
Ma génération a inventé la famille recomposée où l'on se retrouve parent des enfants de son conjoint.
Trois générations, trois modèles différents.
Le mariage pour tous n'est qu'une nouvelle évolution de cette institution. Prétendre que la famille nucléaire est un modèle inscrit dans le marbre est donc une ânerie que chacun peut éviter de répéter en regardant autour de soi ou en interrogeant son histoire familiale mesurer l'inanité.
Ces transformations sont liées à des phénomènes sociologiques, aux migrations qui ont conduit les enfants des familles élargies à s'installer dans de grandes villes où ils n'avaient que peu contacts et aux logements plus petits. Au travail des femmes, à la contraception, à l'allongement de la durée qui ont contribué à l'éclatement de la famille nucléaire. Aujourd'hui, c'est la plus grande tolérance à l'égard de l'homosexualité, sa banalisation qui rend naturel cette revendication d'un mariage pour tous.
Il se fera. Concernera-t-il beaucoup de monde? Ce n'est pas certain tant les tendances lourdes de notre société nous orientent vers le célibat (40% de la population hexagonale, à Paris un logement sur deux est occupé par une personne seule) qui se généralise et entraine de nouvelles formes de sociabilité qui n'ont, nous disent les sociologues, pas grand chose à voir avec la solitude. Mais il y a quelque chose d'un peu paradoxal, d'ironique, à voir les homosexuels qui ont été les pioniers de notre civilisation de célibataire en pointe dans le débat pour défendre une institution que l'on pensait en déshérence.