Gorgona - Rubbish - Cabinet d'Amateur
Rubbish est un artiste autodidacte de 32 ans qui vit à Besançon. Ses délicats collages reconnaissables au premier coup d’œil déploient leur dentelle de papier sur les murs des villes. La légèreté, la fragilité de ses créations requièrent une impressionnante maîtrise technique du paper-cut, poésie gracile en symbiose paradoxale avec la pierre et le béton de l’espace urbain. Il dessine de grands portraits en noir et blanc au regard perçant. Ensuite, l’artiste les découpe minutieusement pendant des centaines d’heures pour ne laisser que les traits, œuvres aériennes à la charge émotionnelle d’une intensité rare. Il existe des motifs récurrents dans son œuvre, telle cette main toute de guipure qu’il nomme l’Inquisiteur, ce cœur extrait d’un recueil d’anatomie heart of life, heart of the city auquel la grâce de son travail de brodeuse insuffle une vie palpitante.
Inquiteur et Heart of the City - Rubbish
La réalité de l’espace urbain imprime sa marque sur les œuvres qui s’y épanouissent. Le collage vit, évolue et finit par disparaître au rythme de la ville, de la météo, de l’activité de la cité. De cette interaction entre le travail de l’artiste et la vitalité de la zone urbaine, habitée et féroce surgit la beauté, expression d’une esthétique élémentaire accessible à tous. Le périmètre de la ville est à la fois prétexte de réalisation artistique, champ d’émergence, le fragment en amont qui justifie les mutations esthétiques impératives dictées par l’environnement dont procède l’art urbain.
Inquisiteur au mouchoir et Mikie's paper - Rubbish
Jack Kerouac et ? - Rubbish
L’intervention de l’artiste consiste à trouver une formule plastique qui requalifiera la géographie sensible de la ville en la réinterprétant, en la modifiant de façon provisoire. L’art urbain est une forme de création artistique par essence éphémère dont la gratuité du geste porte en soi des valeurs libertaires et humanistes. A chaque artiste d’imprimer son univers personnel, de réinventer les codes en créant son propre langage sur une base expérimentale infinie afin de reconfigurer cet espace urbain à la mesure de sa vision.
Jack Kerouac - William Burroughs - Allen Ginsberg - Rubbish
Outre ces visages aux prunelles pénétrantes, Rubbish s’inspire de la culture amérindienne, de mythes et légendes, profils coiffés de parures de plumes et de fleurs, crânes de bélier, vanités surmontées de cornes de cervidés, mi-homme mi-animal. La couleur intervient rarement, par touches fortes et franches, la dentelle d’un mouchoir vermillon, le cyan d’un motif floral ornemental. Récemment, il a croqué le portrait des trois grandes figures de la Beat Generation Jack Kerouac, Allen Ginsberg, William Burroughs, qu’il décline en fresque ou individuellement. Dans les œuvres de Rubbish, l’incroyable technique faite de précision et de long labeur, se fait oublier, s’efface au profit de l’émotion poétique que génère ces délicates dentelles de papier dont les détails recèlent d’infinis motifs. Suivre le cheminement des fines ciselures peut plonger le spectateur dans des abîmes contemplatifs.
Et c’est précisément dans le regard du spectateur que la conquête graduelle du territoire urbain expérimente une dimension aléatoire. La réalisation du street art induit d’exposer les créations directement, sans filtre au regard des passants. L’œuvre est propulsée dans l’espace public de manière totalement libre. La poétique dissidente qui habite le street art, cette beauté surgissante qui cherche à transmettre un message, un sens, une émotion est loin d’être évidente à appréhender. Si l’art urbain se veut une expression créatrice qui va au contact direct avec son auditoire, il faut infiniment d’humilité de la part des artistes pour ainsi se dévoiler, se révéler, en passant outre la possibilité d’un rejet, d’une incompréhension de la rue.
Rubbish au Cabinet d'Amateur
Rubbish au Cabinet d'Amateur
Jusqu’au dimanche 25 novembre, Rubbish présente de nouvelles œuvres dans le cadre de sa première exposition personnelle au Cabinet d’Amateur. Privé de son support privilégié, les murs de la ville, l’artiste a trouvé d’intéressantes alternatives, clin d’œil en elles-mêmes, comme des planches à découper, panières à pain, cache pot, divers morceaux de bois de récupération mais également la toile classique et le papyrus à la manière des anciens Egyptiens. Afin de donner une certaine longévité à ces délicats découpages, il les a emprisonnés dans des résines les rendant plus solides tout en gardant leur apparente gracilité. Jeu de textures, de superpositions et de découpes, ces créations apportent une dimension originale complémentaire aux collages réalisés dans la rue.
Les œuvres originales sont à vendre ainsi que des petits formats et des sérigraphies aux tarifs plus abordables. Si je n’étais pas si fauchée (il y en a un là-bas dans le fond qui vient de dire, as usual, je l’ai entendu !) je me serais laissée tenter par un portrait de Burroughs. En attendant, je vous conseille vivement d’aller découvrir le travail de dentellière rock de Rubbish qui fera le déplacement à Paris pour le dernier jour d’exposition le 25 au Cabinet d’Amateur.
Blog personnel : http://rubbish-cube.blogspot.fr/Page Facebook : https://www.facebook.com/rubbish.cube?sk=wall&v=wall
The Paper-Cut Solo Show by Rubbish jusqu’au 25 novembreLe Cabinet d’Amateur12, rue de la Forge Royale - Paris 11Tél : 01 43 48 14 06Horaires : du mardi au samedi de 14h à 19h et le dimanche de 14h à 17h
Gorgona - Rubbish