L’Écosse a vu sa demande de référendum sur son indépendance autorisée en 2014 par le Premier ministre britannique David Cameron alors que Madrid a tout simplement rejeté la requête catalane jugée inconstitutionnelle. Le premier cas montre une certaine stratégie et prudence politique alors que le second un manque de flair qui pourrait conduire très vraisemblablement à une montée des violences et un renfort des contestations en Catalogne.
L’Écosse, tant culturellement que géographiquement, est aux antipodes de la Catalogne. Ils pourraient même l’envier pour son football (avouez que les Glasgow Rangers font moyennement rêver), leur climat (240 jours de plus en moyenne pour Edimbourg contre 100 à Barcelone) et leur nourriture (même si les goûts sont discutables). Mais pour le reste, ce sont très certainement les catalans qui regardent vers le nord avec jalousie. Ils proposeraient presque de troquer quelques jours de pluie, leurs meilleurs joueurs de Liga et leur sangria contre la recette des arguments que les indépendantistes ont réussi à faire avaler à leur Premier ministre. C’est décidé, Mariano Rajoy, Premier ministre espagnol, ne veut rien entendre.
L’approche britannique est certes risquée, mais jugée astucieuse par les observateurs politiques. L’Espagne refuse le référendum demandé par les indépendantistes en s’appuyant sur des arguments juridiques : il est interdit dans la constitution espagnole de faire des référendums sur l’indépendance. En revanche, David Cameron autorise les écossais à décider de l’avenir de leur nation « à condition que seule la souveraineté soit la seule question en jeu ». Cette approche est jugée astucieuse pour la simple est même raison que si vous interdisez un enfant d’appuyer sur le gros bouton rouge qui clignote, il y a d’énormes probabilités qu’il se rue dessus une fois le dos tourné. Nous n’avançons pas cet argument pour décrire les écossais comme de gros enfante alcoolisés incapable d’écouter ce qu’on leur dit mais plutôt pour l’effet psychologique que procure l’autorisation de ce référendum : cela montre une forte maturité démocratique. Le seul point plutôt décourageant pour les écossais est que les anglais sont, d’après les derniers sondages, plus favorables à l’indépendance de l’écosse que les écossais eux mêmes !
Les arguments avancés sur le rôle de l’Union Européenne par les intellectuels écossais sont très habiles. Ils déclarent que l’euroscepticisme est une spécialité anglaise : les nationalistes écossais et catalans se sont tous deux servis de l’UE pour appuyer leur dossier en faveur de l’indépendance. « Ils sont convaincus qu’ils n’ont pas à craindre l’isolement, puisque les deux nouvelles nations feraient partie du grand club européen : elles pourraient ainsi associer leur indépendance à la sécurité d’une adhésion à l’UE ». Puisque nous parlons de stratégie politique, l’élément avancé est qu’ils ne seraient pas contre un rapprochement de Bruxelles.
La principale différence entre les deux provinces réside dans le fait que l’écosse est très dépendante financièrement de Londres alors que la catalogne est un des moteurs (sinon le seul en état de fonctionnement) de l’économie espagnole. Que ce soit dans l’un ou l’autre de ces deux pays, la rupture étatique irait très clairement à l’encontre du message d’unité et de solidarité lancé par Bruxelles. Néanmoins, le peuple reste le seul maître en terme de souveraineté : argument sans faille qui devrait, si les contestations se poursuivent, faire plier Madrid. « On ne sauve pas un mariage en déclarant que le divorce est illégal ».