Fillon bousculé, Copé autoproclamé. Après-moi le déluge doit penser un certain … Nicolas Sarkozy. L'élection au couteau du nouveau président de l'UMP laisse planer toutes les craintes possibles sur l'avenir de la première formation politique de droite. Les péripéties du scrutin peuvent prêter à sourire. Elles soulignent pourtant en arrière plan une inquiétante tentation du coup de force.
Après le PS, l'UMP s'adonne avec délices à un jeu dont le nom pourrait être petites tricheries entre amis. Certaines images sont pourtant savoureuses telles ces files de personnes d'âge mûr bien pomponnées. Ou encore ces jeunes gens bien peignés, très propres sur eux, partis désigner leur chef comme on va à la messe.
La foire d'empoigne à laquelle se sont livrés les protagonistes et leurs camps laisse penser que si les militants UMP étaient prêts à participer à des primaires, tel n'était pas le cas des états-majors génétiquement habitués à tout décider d'en haut, dans des cercles restreints.
Plus que les manœuvres, les manigances et les tricheries, le fait notable c'est le score de Jean-François Copé héraut de la ligne dure de l'UMP. Il y a bien à cet effet une prime à la radicalisation, qui donne raison à la ligne Buisson choisie par Nicolas Sarkozy dans la campagne présidentielle au détriment de la ligne Guaino, gaullo-républicaine.
La gauche aurait tort de se réjouir d'une potentielle victoire de Jean-François Copé. La dureté des propos, la porosité avec le FN n'en fera pas un adversaire plus facile à battre. Bien au contraire. Le grand remaniement qui traverse l'UMP confirme le déplacement du centre de gravité de la vie politique française vers la droite et le caractère minoritaire de la gauche dans le pays malgré les apparences. Mais surtout, la qualité de "décomplexé" revendiquée par Jean-François Copé ne doit pas être négligée. Qu'attendre d'un homme politique capable de s'autoproclamer Président d'une formation politique dont il était le secrétaire général ?
Car décomplexé signifie aussi en l'espèce sans tabou et sans attachement aux valeurs traditionnelles de la droite républicaine. C'est le droit de tout dire et de ne rien s'interdire. Ce retour en force de la droite cagoularde à la Buisson s'explique en grande partie par la peur d'un électorat vieillissant face à une double menace. La menace réelle d'une remise à plat de la fiscalité par la gauche qui viendrait toucher le portefeuille. La menace fantasmée d'une immigration insidieuse qui remettrait en cause l'identité nationale.
Elle confirme surtout que certains sont prêts demain à perdre leur âme plutôt que les élections. Car derrière Copé, le grand gagnant c'est Buisson, l'ancien conseiller d'ultra-droite de Nicolas Sarkozy, l'homme de Minute, chantre d'un discours identitaire xénophobe qui renvoie aux heures sombres des années 30. Si la victoire de Jean-François Copé se confirme, ce ne sera pas le député-Maire de Meaux qui aura gagné. C'est l'UMP qui aura perdu, ouvrant un champ inespéré à un centre-droit qui deviendra le refuge d'hommes et de femmes viscéralement attachés aux valeurs républicaines.