Dire du vrai ensemble: « Cette obscure concentration des consciences, cet absolu de la philosophie Teilhardechardienne »

Publié le 19 novembre 2012 par Donquichotte

Dans le journal le Monde

« La saveur de la vérité »

Article paru dans l'édition du 16.11.12

Ici, je trafique un peu cet article... (extraits falsifiés qui suivent; je demande pardon à l'auteur) de Pierre Léna, et cela provoque une réflexion.

« La langue française est subtile : elle sait distinguer « dire du vrai » de « dire le vrai ». Elle indique dans le premier terme ce qui fait le propre de l'activité scientifique... Alors que, dans nos sociétés, la vérité est si souvent trahie ou défigurée, une hypothèse est moins qu'une preuve définitive, elle est une nouvelle pièce du puzzle cohérent avec lequel nous reconstituons une chose vraie... On peut explorer une autre facette du vrai : la difficulté parfois de le dire. Oui, les mots de nos langues, ces entités puissantes sont notre médiation entre l'opaque réalité et le vrai énoncé sur elle... Toute affirmation de faire du vrai doit être assortie de la modestie la plus extrême... Enfin, si le vrai jamais atteint rejoint le beau tout aussi inaccessible, il touche aussi au bien lorsqu'il peut être mis au service des hommes... Isaac Newton, évoquant sa vie dans une lettre à un ami, écrivait : « Je ne sais pas ce qu'il en semble au monde, mais, quant à moi, il me semble que je n'ai été qu'un garçon jouant sur la plage et me divertissant de temps à autre en découvrant un galet mieux poli ou un coquillage plus beau que d'ordinaire, alors que le grand océan de la vérité s'étendait devant moi, dans la totalité de son mystère. »

Réflexion. 

Pour moi, dire du vrai, c’est émettre des hypothèses – des idées qui avancent, des idées qui méritent attention, des idées qui se soumettent à l’attention de ceux qui les vivent et qui demandent confirmation - qui m’amènent un peu plus vers une meilleure compréhension du monde dans lequel je vis. Comprendre un peu le vrai m’inspire davantage que de l’expliquer. Le vrai est si peu de chose, il peut être mis en doute, mais il peut aussi être fortifié. Le vrai, on vit avec, il est notre réalité ; mais peut-on le dire vrai ? Que voyons-nous et que pensons-nous que nous voyons ? Est-ce bien la même chose ?

Du vrai, du beau, du « bien » pour l’homme : sont-ce des notions si abstraites que nous ne pouvons les appréhender ? Non, je ne crois pas ; il suffit, je pense, de savoir se pencher pour découvrir une fleur rare, ou savoir regarder quelqu’un dans les yeux, pour comprendre que la réalité, celle du vrai, est en dedans de nous. Chacun a la sienne, et chaque réalité est singulière.

Mais elle, cette autre réalité, celle de la communauté : c’est autre chose. Il est difficile de nous comprendre, de nous abstraire ensemble, de nous imaginer au-delà de nos réalités intimes et singulières. On cherche le point commun, l’entente commune  - et ce ne sont pas que des mots – une respiration au diapason de nos entendements ; et l’effort pour y arriver est incommensurablement difficile, et presqu’effrayant, tellement il requiert de l’attention pour l’autre – les autres, - de l’empathie vraie, un sens de la responsabilisation qui n’est pas inné mais qui doit être assumé, et une capacité à faire mentir nos inintelligences, nos mésententes, nos disparités, nos tempéraments obscurs...

Ainsi, dire du vrai, du beau, du bien pour l’homme, et le dire « ensemble », réside peut-être dans ce point oméga de Teilhard de Chardin, cette obscure concentration des consciences, cet absolu de la philosophie Teilhardechardienne. Y a-t-il d'autres mots pour le dire, pour dire "du vrai" là-dessus?