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Vent(s) de fraicheur sur le cinéma français

Par Borokoff

A propos de Rengaine de Rachid Djaïdani ★★★★☆

Stéphane Soo Mongo, Sabrina Hamida - Rengaine de Rachid Djaïdani - Borokoff / Blog de critique cinéma

Stéphane Soo Mongo, Sabrina Hamida

A Paris, Dorcy, un jeune noir chrétien, demande en mariage Sabrina, une jeune Française d’origine algérienne et musulmane. Sabrina accepte. Lorsque Slimane (Slimane Dazi), le grand frère de Sabrina, apprend la nouvelle par un appel anonyme, c’est le branle-bas de combat. Slimane est hors de lui et jure que de son vivant, ce mariage sacrilège n’aura pas lieu. Pour preuve, il appelle ses 39 frères à contribution. Mais tous ne partagent pas son avis ni sa fermeture d’esprit…

On a coutume d’appeler ce genre de film un « ovni » (objet visuel non identifié). Soit, mais pas n’importe lequel puisqu’un ovni qui a déjà battu, non pas (encore) le nombre de spectateurs en salles, mais le record de durée pour un tournage, soit 9 ans. 9 ans d’obstination et de combat acharné pour permettre à Rengaine de voir le jour.

Le titre Rengaine a un double sens. Il peut se comprendre comme un « refrain lancinant et radoteur » tout autant que comme l’impératif : « range ton arme ». Rengaine est le premier long métrage d’un jeune réalisateur de 38 ans qui égrène déjà plusieurs vies derrière lui. Acteur, scénariste, boxeur, documentariste, écrivain, Rachid Djaïdani s’est lancé dans le projet sans un rond (la crise économique favoriserait-elle l’inspiration ?), avec une fine trame de scénario mais surtout la rage au ventre. Une détermination sans faille qu’aime à rappeler Rachid Djaïdani, lui qui compare le cinéma à la boxe et sa manière de filmer à un uppercut.

Slimane Dazi - Rengaine de Rachid Djaïdani - Borokoff / Blog de critique cinéma

Slimane Dazi

La conviction qu’il irait jusqu’au bout de son projet était ancrée dans son tempérament comme dans celui de sa jeune bande d’acteurs. On pense, en voyant Rengaine, au projet tout aussi fou et courageux de Donoma, de Djinn Carrénard. Mais Donoma était un film moins politique qui se passait dans la banlieue parisienne. Il s’agissait aussi dans le film de Carrénard moins d’un conflit générationnel et au sein d’une communauté que d’un entrecroisement poétique d’histoires amoureuses, dans un climat propice à l’enchantement. Ne confondons donc pas, malgré des intérêts communs (dont celui pour la danse), les deux univers des cinéastes issus de la banlieue parisienne et des Yvelines, ce qui leur a valu de se faire coller l’étiquette réductrice de « cinéastes de banlieue », ce qui est bien pratique pour les faire rentrer dans des cases et une « catégorie » de réalisateurs.

Si la comparaison de Rachid Djaïdani avec Djinn Carrénard est toute trouvée, elle est un peu réductrice. Une chose est néanmoins certaine, c’est le constat commun aux deux jeunes cinéastes qu’outre leur caractère bien trempé, ils font souffler un véritable vent de fraicheur sur le cinéma français et certains poncifs qu’il a accumulés depuis des années, comme ces immenses appartements parisiens dans lesquels vit le plus souvent le personnage principal, quelle que soit sa condition et son histoire, et qui posent un problème récurrent de crédibilité.

Stéphane Soo Mongo - Rengaine de Rachid Djaïdani - Borokoff / Blog de critique cinéma

Stéphane Soo Mongo

La volonté d’aller jusqu’au bout, c’est que l’on retient avant tout chez Rachid Djaïdani. Difficile d’analyser sous un œil critique Rengaine en le détachant de sa genèse, du parcours et de la vie, pardon des vies qu’a eues Rachid Djaïdani. Une enfance à Chanteloup-les-vignes (78), une mère d’origine soudanaise, un père algérien. Le reste est à lire sur n’importe quelle biographie du net.

Là n’est pas l’essentiel. L’essentiel, c’est que nous donne à voir Rachid. En premier lieu, des communautés d’origine africaine, maghrébine qui vivent à Paris et qu’il filme sous un angle réaliste, visages en gros plans, caméra à l’épaule, lors de tournages sauvages ou autorisés, qu’importe, ce qui donne à l’image un grain souvent épais et très contrasté. La mère de Dorcy (Stéphane Soo Mongo) tient un salon de coiffure dans le 18ème. Les frères de Slimane (Slimane Dazi, gueule connue du cinéma français et habitué des seconds rôles) sont eux-mêmes des chauffeurs de taxi, des policiers, des employés dans un vidéo-club, bref, toute une faune parisienne rarement représentée dans des fictions mais qui compose pourtant la fine fleur des 18 et 19èmes arrondissements de la capitale.

Rengaine de Rachid Djaïdani - Borokoff / Blog de critique cinéma

Si l’on sent à chaque plan l’énergie voire la rage de filmer de Djaïdani, aucun venin ni aucune rancœur n’apparaissent pourtant dans ce qu’il dépeint. Au contraire, Rengaine est un film assez nuancé et bien senti, qui décrit le parcours d’un jeune noir (Dorcy) qui tente de percer dans le cinéma et écume sans relâche des castings souvent « foireux » pour pouvoir jouer dans des courts-métrages. Dorcy, double de Djaïadani ? Un peu sans doute, mais le jeune réalisateur, à qui l’on peut reprocher certaines longueurs dans son film, certains temps morts, privilégie toujours l’humour plutôt que la frustration, l’ironie plutôt que l’aigreur.

Rengaine est en apparence l’histoire d’un couple qui s’aime et n’est pas prêt à renoncer à se marier en subissant les conflits entre leurs communautés. Dorcy n’est pas prêt à faire plaisir à sa mère, ni Sabrina à son grand-frère. On pense que Rengaine raconte le parcours d’un jeune homme prêt à tout pour réaliser son rêve de devenir acteur. Mais ces histoires sont secondaires, comme une toile de fond du film. Car Rengaine est un film plus complexe, plus profond et intelligent.

C’est au final et d’abord l’histoire de Slimane, quadragénaire né en France, bourré de contradictions et de préjugés, de clichés et de traditions aussi vieillottes qu’absurdes mais qui va peu à peu évoluer, se remettre en question au contact de ses nombreux frères et de ce qu’ils lui balancent à la tête. Une des dernières scènes deux films, la rencontre de Slimane avec son frère aîné dans une cave, est assez bouleversante à ce sujet et constitue un paroxysme dramatique. Dommage d’ailleurs que le montage n’ait pas occasionné plus de distance et de respiration à l’occasion de cette scène magistrale, qui aurait mérité d’être davantage mise en valeur, car symbole de la générosité et du message d’espoir que porte tout le film. L’espoir que les choses évoluent et que les mentalités changent. Toutes les mentalités…

http://www.youtube.com/watch?v=-8VrUG8rthI

Scénario de Rachid Djaïdani

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Mise en scène : 

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Acteurs : 

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Dialogues : 

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Compositions :

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