Face à son bourreau
Les deux premières semaines à la maison Jean-Lapointe sont dures mentalement et physiquement pour le jeune joueur compulsif. Après 14 jours, il ne comprenait toujours pas ce qu’il faisait là. «J’ai demandé à voir le psychologue. Au début, ça m’a déçu de parler pendant une heure sans qu’il ne dise un mot. J’ai beaucoup pleuré. Et grâce à son rapport, les intervenants ont su comment m’aborder. Avant, ils me demandaient d’écrire. Mais toute ma vie, on m’a forcé à écrire. J’ai été battu pour ça. Je n’arrivais pas à écrire. Alors avec les intervenants, on l’a fait verbalement.» Ali est secoué lorsqu’on lui fait réaliser qu’il a 50 ans à vivre encore. «J’ai décroché de mon boulet.» Le boulet d’Ali, c’est la violence dont il a été victime en tant que dernier de la famille. Le traumatisme causé par le passage à tabac que son grand frère lui a fait subir à leur arrivée à Montréal, quand il avait 14 ans. Et l’aveuglement volontaire des membres de sa famille à qui il en veut.
Moi, j’ai fait ça? Si tu ne me pardonnes pas, égorge-moi alors. C’est ce qu’il m’a répondu. Tout est facile pour lui. Déjà, j’avais de la haine envers lui. En 2005, aux fêtes, j’avais envie de lui sauter dessus, de lui péter la gueule, en lui demandant c’était quoi, ton idée? J’allais t’apprendre la discipline, qu’il m’a répondu en riant avant de rajouter en m’insultant: sans rancune.»
Les jeux sont faits
Ali n’a pas cessé de jouer. Il a diminué ses fréquences de jeu. Il ne travaille pas, son estime s’en ressent fortement. «Des fois, je me sens bon à rien. Je deviens négatif. Ce n’est pas bon. Je sais que je peux faire tellement de choses. J’ai beaucoup de qualités que je pourrais utiliser. Mais en même temps, je me sens comme une merde. Je sais bien qu’il ne faut pas prendre la vie comme un combat. Mais à tous les jours c’en est un pour moi juste pour survivre. Une chance que j’ai ma famille. Bien que ma mère ait fermé les yeux sur les corrections dont j’ai été victimes à la maison, elle veut se reprendre. Elle se sent mal de la manière dont elle m’a élevé. Mais je ne peux pas lui en vouloir. Moi, j’en veux à mes frères. Un grand frère, c’est censé te protéger, pas t’écraser comme un mégot de cigarette.»
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