Nous recevons une figure du cinéma Fantastique : Fausto Fasulo, redacteur en chef de la mythique revue Mad Movies, et co-organisateur du festival parisien consacré au cinéma Fantastique, le PIFF qui commence aujourd’hui.
Darkplanneur : « Comment se porte le Cinéma Fantastique en 2012 ? »
Fausto Fasulo : « Le cinéma fantastique et le cinéma dur plus largement il est partout et nulle part à la fois. Il est partout parce qu’il a infusé tous les genres existants quasiment, tous les films qui cartonnent au box office ont des éléments fantastiques, films de super héros, films de science fiction… Et en même temps il est nulle part, parce qu’il y a toute une part de productions fantastiques qui avant pouvaient trouver leur place en salle et qui maintenant n’existent plus, parce que malheureusement les vrais films d’horreur et les vrais films fantastiques ne cartonnent plus vraiment en salle et par conséquent ils atterrissent sur vidéo.
Ce qui fait qu’on a tout un pan de la Production qui est invisible pour une partie du public quelque part, puisque c’est un public de niche qui a des films fantastiques en vidéo, alors qu’avant on pouvait viser un public un petit peu plus large en donnant l’accessibilité aux salles, à de purs films fantastiques.
Donc maintenant on a cette espèce de schizophrénie un peu curieuse entre le fantastique qui est partout, parce que ce qui cartonne le plus au Box Office c’est du Avenger, du Batman, du Battleship, en tout cas ce sont des films qu’on traite dans nos pages. Et en même temps il y a toute une partie de la Production qu’on ne voit plus et c’est dommage. »
D: « La Gen Y aime-t’elle le cinéma Fantastique ? »
FF: « Je pense qu’il y a vraiment eu une génération qui a accroché à la vague hardcore des films d’horreurs qu’on a eu justement vers le milieu des années 2000: on a eu Wolf Creek, La Colline à des yeux, c’est vrai que c’était des films particulièrement rentre- dedans, et des productions qu’on ne voyait pas jusque là.
Alexandra Aja fait partie des figures de proue de cette nouvelle génération de cinéphiles. En règle générale, cette génération aime le côté « entertainer » un peu décomplexé, et le côté aussi très spectaculaire de ses films. Alexandre Aja est quelqu’un de généreux en terme de spectacle, qui pense justement toujours donner le maximum au spectateur.
Aujourd’hui, il y a de moins en moins de films d’horreur qui sortent en salle, il est aussi super difficile de trouver de nouvelles icônes dans le cinéma d’horreur à l’heure actuelle. La plupart du temps, les icônes qu’on nous ressert c’est ni plus ni moins que des remake de films qui ont été crées dans les années 70 ou 80.
Les nouvelles icônes dans le fantastique qui intéressent les jeunes générations, je pense qu’il faut peut-être plus aller chercher du côté de True Blood, Dexter. »
D: « Parlez nous du beau festival PIFFF qui commence aujourd’hui ? »
FF: « L’idée de ce festival est de montrer en salle des films, que les gens ne verront de toute façon pas ou presque pas. On aura des films qui ensuite bénéficieront d’une carrière en salle, mais en majorité ce sont des films qui effectivement atterriront directement dans les bacs vidéo. C’est très amusant et puis en plus c’est assez politique. On vous parle de choses que vous n’avez pas forcément l’occasion de voir sur grand écran, et bien maintenant on va faire en sorte de vous les montrer sur grand écran pour voir comment ces films on été pensés pour être projetés sur grand écran. Il y a plein de films fantastiques qui bénéficient de budgets qui sont des budgets de films de salles et qui malheureusement ont atterri sur le marché de la vidéo parce qu’on n’arrive pas à flairer le potentiel commercial de ces films en salle.
Parfois il y a même des castings, où on se dit c’est même complètement dingue de voir certains acteurs qui atterrissent directement dans des productions qui sortent dans les bacs. »
D: » Le Financement d’un tel festival est-il difficile ? »
FF : « On aimerait vraiment avoir des subventions, mais malheureusement la Mairie de Paris est débordée de sollicitations culturelles… et encore une fois ça prouve que le cinéma fantastique n’est pas non plus une notion extrêmement claire dans l’esprit de certaines personnes. Je pense que pour certains interlocuteurs qui nous considèrent peut-être que le fantastique brasse un côté un peu puérile, un peu bac à sable. »
D: « Mad Movies est plus qu’un magazine, il a une mission culturelle? »
FF: « Nous essayons de donner un espace de visibilité à des films qui n’en bénéficient pas, qui sont cantonnés au backvidéo. On essaye de les traiter suivant leur qualité, mais en tout cas quasiment de la même façon qu’un film qui sort en salle. C’est à dire qu’on peut trouver dans Mad un inédit vidéo traité sur quatre pages, à côté d’un film qui sort dans 300 salles avec la même couverture, voire même parfois dans certains cas, beaucoup plus radicaux:un film comme Abraham Lincoln a été traité sur un petit feuillet et demi, et juste à côté un autre inédit vidéo que personne ne connaissait apparemment et qui sera traité sur plusieurs pages.
A l’heure actuelle le fantastique, tristement, n’est plus forcément dans les salles françaises, mais il existe toujours et on essaye en tout cas d’en faire le relais de la manière la plus passionnée, subjective et pertinente qui soit. »