Gagnant avec une très courte avance, Jean-François Copé succède à Nicolas
Sarkozy, Alain Juppé et Jacques Chirac à la tête du principal parti d'opposition à la gauche. François Fillon a reconnu sa défaite.
Patrice Gélard est un universitaire de renom, professeur de droit à Rouen et au Havre, chercheur réputé sur
l’URSS et auteur de nombreux essais sur ce pays, comme : "Les Systèmes politiques des États socialistes", "L’Administration locale en URSS", "Le Parti communiste de l’Unions soviétique",
"L’État et le droit d’Est en Ouest" etc. Il est sénateur de Seine-Maritime depuis le 1er octobre 1995 (réélu en 2004) et a convenu que les statuts de l’UMP n’avaient pas du tout été
adaptés à la confrontation frontale qu’il venait de conclure.
Victoire courte mais victoire
Sur 176 608 votants (soit environ 54% de participation), Jean-François Copé a en effet recueilli 87 388 voix, soit 50,03% et François Fillon 87 290 voix, soit 49,97%. Ces 0,06% de différence a ainsi départagé les deux
candidats dans ce combat des chefs qui avait commencé le 30 juin 2012. La démocratie, c’est 50% + 1 voix.
Le camp vainqueur pouvait donc parader en disant qu’ils avaient eu raison la veille de se déclarer
vainqueurs. Sauf que justement, l’écart si faible a montré qu’ils auraient pu tout aussi bien être les vaincus du jour. Les deux camps s’étaient déclarés vainqueurs la veille de manière totalement intempestive.
Alors que Jean-François Copé a tout de suite pris la parole pour proposer l’ouverture avec le camp vaincu,
François Fillon a attendu 23h32, soit presque une heure, pour digérer sa très courte défaite, l’accepter tout en le regrettant ces résultats et renoncer à tout recours pour irrégularités.
L’affaire est donc close.
Échec personnel
Courte défaite ? En fait, c’est une grande défaite car François Fillon était parti dans la bataille avec
un double avantage, celui d’être un homme d’État reconnu avec cinq ans à Matignon, et celui d’être populaire tant auprès des Français que des sympathisants de l’UMP.
Mais justement, cette élection ne concernait que les encartés de l’UMP, généralement arrivés dans ce parti
grâce à la dynamique engendrée par Nicolas Sarkozy en 2004, 2007 et 2012 et Jean-François Copé avait astucieusement répété qu’il se retirerait en
cas de retour de Nicolas Sarkozy sur la scène politique, ce qui caressait dans le sens du poil les nostalgiques du sarkozysme.
La nouvelle direction de l’UMP devra sans doute réfléchir précisément sur le décalage entre les attitudes
assez dures de ses adhérents et les aspirations de son électorat bien plus modérées que les encartés.
Retour de Sarkozy ?
Le retour de Nicolas Sarkozy est-il d’ailleurs possible dans la perspective de l’élection présidentielle de
2017 ? À mon avis, absolument pas. D’une part, je pense que Nicolas Sarkozy n’a plus du tout envie de revenir faire de la politique intérieure et se retrouver, comme les dix dernières
années, cible de nombreuses attaques personnelles. Il est actuellement en pleine tournée de conférences
(juteuses) aux États-Unis, au Brésil, en Russie et en Grande-Bretagne. De plus, il est convoqué chez un juge bordelais mercredi pour l’affaire
Bettencourt.
D’autre part, l’ambition de Jean-François Copé est telle que maintenant qu’il est à la tête de l’UMP, rien ne
l’empêchera d’être le candidat de l’UMP en 2017, quitte à torpiller une improbable candidature de Nicolas Sarkozy : je rappelle aux sceptiques qu’Édouard Balladur n’était arrivé à Matignon en mars 1993 que sur son engagement à ne pas se présenter à l’élection
présidentielle de 1995 !
Fracture idéologique ?
Si le camp Copé peut évidemment être joyeux et va maintenant essayer de recoller les morceaux de ces deux
terribles journées de tragicomédie, il va avoir du mal à conforter un rassemblement sur la base de ses idées : François Fillon a insisté en effet sur la profonde fracture politique et morale
au sein de l’UMP.
La victoire de Jean-François Copé est en fait idéologiquement bien plus forte que ces seules 98 voix d’écart.
Les décomptes ne sont pas encore officiellement finis mais le soutien des adhérents aux motions (aux "mouvements") est aussi un élément fort qui donne largement raison au camp Copé sur le choix
des thèmes de campagne que Jean-François Copé va probablement développer tout au long de ces trois ans à la tête de l’UMP.
Effectivement, la motion qui arrive largement en tête est celle de la "Droite forte" initiée par des jeunes
de l’UMP et en particulier par Guillaume Peltier, transfuge du FN qui va désormais énormément compter à l’UMP, redoutable débatteur et peut-être futur énarque (en même temps que son succès
politique, il vient d’être admis à l’oral pour l’entrée à l’ENA), alors que la "Droite populaire" soutenue
par des députés assez "anciens" arrive en dernier.
Du côté de l’aile sociale, c’est la motion "Droite sociale" de Laurent Wauquiez, soutien de François Fillon
(candidat à la vice-présidence de l'UMP), qui a été bien plus efficace que la "France humaniste et moderne" de Jean-Pierre Raffarin et Luc Chatel (nouveau vice-président de l'UMP) qui a fait un très mauvais score (il pensait que sa motion arriverait en tête). C’est aussi un pari raté de
Jean-Pierre Raffarin qui pensait, en soutenant à fond la candidature de Jean-François Copé, permettre aux centristes de l’UMP de prendre une place plus influente.
L’avenir du camp Fillon
Il est probable que le premier filloniste à rejoindre l’équipe Copé soit Laurent Wauquiez dont l’ambition,
elle aussi démesurée, ne pourrait se satisfaire d’un retrait de plusieurs années. En revanche, il va sembler plus difficile à Valérie Pécresse et à François Baroin, eux aussi fillonistes très aguerris, de rejoindre immédiatement l’équipe Copé.
Quel avenir pour François Fillon ? Il va justement y réfléchir mais ses chances de pouvoir se présenter
à l’élection présidentielle de 2017 sont désormais très minces. Même s’il jouit d’une belle popularité, il y a encore quatre longues années et cette étape de la présidence de l’UMP lui était bien
plus indispensable qu’à Jean-François Copé. Il reste maintenant l’hypothèse déjà ancienne de sa candidature à la mairie de Paris pour mars 2014, qui aurait l’avantage, pour l’UMP, de couper
l’herbe aux ambitions municipales de Jean-Louis Borloo, président de l’UDI, qui, lui aussi, réfléchit sur
un éventuel destin parisien.
Nouvelle génération UMP : ni UDF, ni RPR
Les déclarations de dimanche soir des deux protagonistes ont été particulièrement mal venues et ont engendré
cette image déplorable (« lamentable » selon Alain
Juppé) d’un parti coupé en deux. La réalité est que dans le sillage et l’élan de Jean-François Copé, c’est une nouvelle génération qui s’installe à la tête de l’UMP, qui n’est plus ni UDF, ni
RPR, ni libérale, ni centriste, ni gaulliste et qui va sans doute représenter une opposition dure face au Président François Hollande.
La transition est déjà toute trouvée : l’abaissement de la note de la France par l’agence de notation
Moody’s ce 19 novembre 2012 va braquer de nouveau les projecteurs sur la politique économique et budgétaire
du gouvernement et apporter des arguments supplémentaires à l’opposition.
Aussi sur le
blog.
Sylvain
Rakotoarison (20 novembre 2012)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
François
Fillon.
Jean-François Copé.
La désarkozysation de l’UMP.
Fillon vs
Copé.
Nicolas
Sarkozy.
Jacques Chirac.
Un sérieux rival pour l’UMP ?
Le débat
télévisé entre Copé et Fillon (25 octobre 2012).
Un pouvoir socialiste aux abois.
Choc de rivalité entre Copé et Fillon.
La tragicomédie de l’UMP (18 novembre 2012).
Copé déclaré vainqueur le 19 novembre 2012.
http://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/presidence-de-l-ump-resultat-126178