Pholoé est brûlante et glacée. Cette jeune fille en recherche de quelque chose qui la transcende, l'amour, la passion, l'absolu, expérimente des rencontres, découvre son corps et tente d'allumer ses sens à force d'amours plus ou moins désespérées et de sexe outrancier.
Elle vit seule avec son père, puis tente de trouver son salut dans l'ailleurs. A Berlin, elle rencontre le beau Hannes, un mètre quatre-vingt, peau mate et dorée, cheveux châtain clair courts. C'est un moment de libération, de bonheur.
Mais les amours ne durent qu'un temps, le devoir la rappelle et la revoici chez son père, qui sombrait sans elle dans la déchéance. Elle est finalement devant le vide d'une falaise, imaginant sa chute. Mais peut-être y a-t-il un espoir...
Ce résumé ne rend pas compte de ce qui fait la force du court roman de Bastien Fournier. Fuyant toute psychologie, l'auteur prend le parti de décrire les gens, les décors, les gestes, dans une démarche qui rappelle celle du Nouveau Roman, mais actualisée, à la mesure du monde actuel que Bastien Fournier s'efforce de saisir dans une forme.
Les phrases sont courtes, anaphoriques, entêtantes. Les ambiances qui sont ainsi créées, les scènes cliniquement rapportées donnent au texte une puissance évocatrice. Il y a une recherche constante de pulsion et de rythme. Un exemple : le début du texte qui raconte le réveil de l'héroïne :
« Ombres et volumes bougent sur les draps. Une forme remue. La peau s'anime. Les nerfs augmentent leur tension. Chaque muscle se met en branle. Cœur et poumons accélèrent. Le sang afflue en plus grande quantité vers la tête et les membres. Les paupières s'ouvrent, s’abaissent, se lèvent, tombent. Les lèvres s'écartent. Les coudes se plient. Le crâne monte sur le cou, pivote et s'effondre. Sur la nuque, des poils courts relaient les racines des cheveux. Le corps se rendort, tout ralentit, tout se tait jusqu'à ce que les bips réguliers du réveil s'immiscent au fond des oreilles et frappent les tympans... »La suite dans Pholoé.
Bastien Fournier, Pholoé, L'Aire