Why not ? Je découvre une vidéo sur Le Monde Japon : un bain de beaujolais pour fêter le millésime 2012 (15 nov. 2012). Ayant perdu le son sur mon ordinateur, je me suis contentée d’enregistrer le texte. Qui m’apprend que dans la ville d’Hakone (je résiste au jeu de mots) un sommelier qui organisait une fête pour l’arrivée du millésime de 2012 avait permis à ses clients de prendre un bain dans un bassin rempli de vin, ces ablutions permettant de rendre « la peau belle et douce ».
Une fois, cela ne me semble pas suffisant, d’où l'idée d’un savon. En y adjoignant toutefois un déodorant parce que sortir fraîchement lavé le matin et puer la vinasse, comme après avoir passé la nuit dans un rade pourri et s’être effondré ivre mort dans du dégueulis de poivrasse, avouez que ça ne le fait pas pour ce style de « bobo » déjantés.
Allo, maman « bobo »… « Fêt', nuits foll's, avec les gens qu'ont du bol (…) tu la voyais pas comme ça ta vie ». Moi non plus mais je ne risque pas de sombrer dans pareilles turpitudes. Aussi ridicules qu’emblé-matiques de la décadence actuelle qui sévit partout et en de multiples occasions. Merci de ne pas venir m’agonir d’injures et me traiter d’ultra-réac. D’abord, je ne dis pas que cela me fait plaisir, nullement maso, la mémé. Mais comme cela n’est pas vrai - je ne l’ai jamais été et que l’on m’achève si cela m’arrive - cela ne me fait pas plus d’effet qu’un aca d’iau sur les « pleumes » d’un canard. Et ensuite, si je n’ai pas le droit d’exprimer librement mes opinions sur mon blog, où le ferais-je ? C’est un petit chez-moi, merci de vous essuyer les pieds avant d’entrer : pas d’étrons sur mon paillasson.
Ceci dit, cette info c’est une sorte de bâton merdeux. Par quel bout la prendre ?
Sur le plan du vin
Il est encore heureux que le Beaujolais nouveau ne soit pas un grand cru. Mais « chut » ! Il y a quelques années Lyon-Mag s’était attiré des ennuis parce qu’un amateur éclairé avait osé lors d’une interview affirmer que certains beaujolais nouveaux étaient de la m… Le propos était sans doute quelque peu excessif mais enfin quand même, de là à ce qu’une soixantaine de vignerons attraient le maga-zine devant le tribunal de Villefranche-sur-Saône pour « dénigrement » ! la justice Beaujolais et gueule de bois pour«Lyon Mag» (Libération 31 janv. 2003) où il fut condamné à 284.000 euros de dommages et intérêts ! Ne surtout pas voir dans cette somme faramineuse un véritable permis de tuer la liberté d’expression d’un magazine indépendant. D’autant que la justice fut particulièrement expéditive - Poutine a dû en tirer des leçons pour le procès contre les Pussy Riots : le tribunal refusant d’entendre l’amateur qui avait osé donner son avis et s’était bien gardé de généraliser à tous les vins du Beaujolais.
Lyon Mag fut à nouveau condamné par la Cour d’appel de Lyon à 110 000 euros d’amende (Lyon M.fr). Ce magazine faisant au demeurant une confusion entre amende (payée à l’Etat) et dommages et intérêts (versés aux plaignants). Je pencherais plutôt pour la seconde hypothèse. Toujours est-il que Lyon Mag exprimait l’intention de se pourvoir en cassation afin de pouvoir éventuellement par la suite saisir la Cour européenne des droits de l’homme, compétente en matière de liberté d’expression. Je ne connais pas la suite.
Ceci dit, amatrice de bon vins, simples et de bon aloi, je ne suis pas du tout fana des beaujolais nouveaux ou autres vins primeurs qui fleurissent dans toutes les appellations depuis déjà quelques années. Ils sont loin d'être les meilleurs. Parmi les Beaujolais, il y a le tout-venant et de très bon crus dont je doute que les vignerons les sacrifient ainsi. La crise aidant, les producteurs trouvent là de nouveaux débouchés et l’occasion d’avoir moins de vin de la dernière récolte à stocker car, encore une fois, les stocks ont un coût. J’en achèterai certainement une bouteille pour partager avec des amis, mais je vous garantis que je la choisirai soigneusement.
Un conseil pour acheter du beaujolais nouveau (ou d’ailleurs n’importe quel vin). Choisir de préférence l’étiquette la plus sobre possible. Plus celle-ci est prétentieusement ornée, plus vous pouvez être certain que le vin que contient la bouteille est de médiocre qualité. Je n’ai jamais fait attention si cela se fait pour le beaujolais nouveau mais regardez le dessus du goulot. Si autour du « congé » - la vignette fiscale - vous lisez « récoltant » vous pouvez l’acheter en toute confiance; Si de surcroît le vin a obtenu une médaille d’or ou d’argent dans un concours, en principe vous ne risquez pas d’être déçu. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ces vins ne sont pas plus chers et parfois moins chers que des vins vendus par les négociants.
De la décadence
Née juste après la seconde guerre mondiale, j’appartiens donc à une génération où l'on n'aurait pas joué avec les aliments. Hormis ceux qui firent du marché noir - les « BOF » : beurre, œuf, fromage - et s’étaient considérablement enrichis à ce trafic, cela eût été impensable pour tous ceux qui avaient subi ce que l’on nomma les « restrictions » - le mot est faible ! - et les tickets de rationnement (ils étaient encore en vigueur en 1947, année de ma naissance) et de toute façon nos aïeux étaient habitués à respecter la nourriture. Se souvenir des disettes et autres famines qui sévissaient périodi-quement dans l’Ancien Régime. Sacro-saint respect du pain, principal aliment, surtout dans les campagnes et chez les petites gens dans les villes.
Nous vivons à une époque de surproduction et de gaspillage. Lire par ex. que des tonnes d’aliments sont jetés, soit par les hypermarchés, soit par les consommateurs qui ont acheté en trop grande quantité, appâtés par les promos ou la profusion s’étalant dans les grandes surfaces est plutôt estrêmement choquant, surtout à une époque où des pauvres de plus en plus nombreux ne peuvent se nourrir convenablement sinon se nourrir tout court. Il suffit de lire périodiquement les cris d’alarme des Resto du cœur, du Secours catholique, du Secours populaire et autres ONG qui s’efforcent de répondre à des demandes de plus en plus nombreuses, émanant de surcroît de personnes qui sans être forcément très argentées arrivaient auparavant à s’en sortir sans être obligées de demander de l’aide.
Absolument révoltant de lire cela quasi au moment où le Secours Catholique nous apprend que la grande pauvreté est durablement installée en France (dépêche AFP 8 nov. 2012). Elle sévit absolument partout. J’ai procédé à un large tour d’horizon de la presse régionale. Aucun département, aucune ville ni même village n’est épargné. Je ne pense d’ailleurs pas que le Japon soit mieux loti, surtout après la catastrophe de Fukushima, lors même qu’elle a eu un impact non négligeable sur la production agricole (contamination radioactive) et la pêche, en n’ayant garde d’oublier toutes les destructions, les morts, les disparus et les blessés.
Mais qu’en ont à secouer ces pauvres taches sans cœur ni cervelle qui comme tous les nantis se fichent pas mal de ceux qui souffrent et qui ne seraient pas gênés de danser sur leurs cadavres ? « Qu’importe le flacon pourvu qu’il y ait l’ivresse ».