Fox Bronte est l’artiste visuel le plus suivi en ligne en Grande Bretagne. Mais c’est avant tout un fou. Un homme qui peint avec son pénis, ses fesses, ses cheveux, qui se fait censurer à peu près partout où il va ou qui sculpte un portrait de Justin Bieber avec des poils pubiens. Sa biographie selon Wikipedia ferait passer Cosette pour un clown sous psilocine (« mais l’art ne m’a pas sauvé, il a juste rendu ma vie supportable et me permet de ne pas avoir à payer des boissons aux femmes pour coucher avec elles. »). Alors quand nous avons voulu parler de lui ici, nous avons pensé qu’il serait le seul à pouvoir le faire sans se fourvoyer.
Et croyez nous, entrer en contact avec Fox Bronte, c’est entrer dans un autre univers.
Fox se montre rapidement disponible, mais s’il accepte de répondre à nos questions, il refuse qu’elles soient publiées telles-quelles, « ça fait trop prétentieux, de toute façon que les mots viennent de moi ou de quelqu’un d’autre, qu’est-ce que ça change ? Mais je suis heureux que vous vous intéressiez à mon travail. »
Il faudra attendre quelques jours pour obtenir les réponses. Et elles seront à la hauteur de nos attentes. Seul soucis ici à blended, si nous partagions avec vous toutes ses réponses, nous devrions embaucher une armée d’avocats. Ses blagues sur le testicule d’un homme responsable de la Shoah en feront rire certains, on le sait, mais en choqueront beaucoup d’autres.
Nous l’avons prévenu de cette auto-censure, sans rencontrer les difficultés habituelles liées aux égos des artistes. « Pas de soucis mec, tu peux écrire ce que tu veux sur moi, me critiquer, même dire que je suis un con, tant que ça fait un bon papier. »
Malheureusement, voici notre premier portrait édulcoré. Fox Bronte, le premier artiste trop trash pour nous.
La première difficulté c’est d’essayer de comprendre l’art de Fox Bronte. Il ne semble pas y avoir de sens caché, pas d’intellectualisation. Plutôt un instinct. Une envie profonde de choquer. Un quelque chose de punk. « Je ne suis pas un punk, les punks sont des cons. Quand on me demande si j’ai des tatouages ou des piercings, je dis non, parce que j’ai de l’imagination et du talent, deux choses qu’on n’achète pas en boutique. J’aimais bien l’idée du punk, de dire non quand tout le monde dit oui, mais aujourd’hui c’est devenu une contradiction. C’est censé être un mouvement anticonformiste, mais si tu ne te conformes pas à leurs codes vestimentaires, de vocabulaires, ils te tournent le dos. Aucune substance, que du style. »
Fox Bronte peint beaucoup avec ses fesses et sur ses fesses. Un soucis psychanalytique, un blocage au stade anal ? Non, la cause est beaucoup plus politique. « D’abord mon cul est beau, ensuite il représente la société et la merde qui en sort. En le peignant, je montre qu’on peut changer les fesses, et donc le monde, en ce qu’on veut. Et mes poils représentent la récession. » Pour ceux qui auront compris, rendez-vous ici.
Puisque Fox Bronte part sur le terrain du politique, nous essayons de le piquer. Serait-ce son ADN britannique qui explique cette politisation ? « Ce n’est pas seulement britannique. Regarde le monde. L’art n’est pas politique en France ? Regarde l’histoire du dadaïsme. Et le plus grand d’entre tous, Marcel Duchamp, il n’était pas Français peut-être ? »
Nous retrouvons le Fox engagé, qui a foi dans ses actes, en dehors de tout cynisme. Celui que nous avions aperçu dans cette vidéo, manifeste contre les multiples censure de ses films par YouTube.
Fox Bronte est autodidacte. C’est peut-être cette liberté de formation qui explique qu’il peigne avec n’importe quoi et sur n’importe quoi. « Les artistes se répètent, comme une parodie d’eux-même. Ils se répètent encore et encore et encore et encore… (la répétition s’étend sur deux pages Word, ndlr). Pourtant les gens sont intéressants. Quand on va assez profondément, les gens ne sont pas répétitifs du tout. Il y a tellement à voir dans une personne. Alors pourquoi l’art devrait-il être répétitif ? Mes idées et mon art sont très personnels, donc quand j’ai une idée, je veux qu’elle s’exprime jusqu’au support. »
Avec une telle folie, on peut se demander pourquoi ou comment Fox Bronte est devenu l’artiste en ligne le plus suivi de Grande-Bretagne. « Je fais les choses, sans réfléchir. Je me retrouve souvent dans des situations génantes et les gens adorent ça. C’est leur voyeurisme. Il n’y a pas tant d’artiste que ça en Grande-Bretagne. Je pense à 4 maximum qui sont bons. Mais je suis le meilleur, honnêtement. Je suis le plus grand artiste sur YouTube tout court d’ailleurs. On est en 2012, et les artistes sur YouTube créent comme si on était en 1912 et ils se demandent pourquoi ils n’ont aucun suivi. Je suis le seul qui ne soit pas un vendu. Je suis le seul à réellement créer. Ils ne font pas de l’art vidéo, mais ils tournent des vidéos de leur art. Et en plus, il n’interagissent pas. La vidéo est l’art. » Il continue à aimer YouTube et pourtant, le site l’a censuré à mainte reprises. « Internet c’est un tas de merde, rempli d’abrutis qui parlent mais n’ont rien à dire. Moi, au moins, je suis aussi un abruti dans la vraie vie. »
Fox Bronte est donc tout simplement un artiste. Provocateur, intelligent, sensible. Un homme qui essaie de faire bouger les choses, par simple amour du mouvement.
Avec un réseau d’artistes, il vient créer Selfless Portraits, un acte de charité qui propose de créer et d’offrir aux familles en deuil un portrait du défunt.
Prenez toutes les pulsions référencées dans l’œuvre de Freud. Mettez les dans un shaker. Mélangez. Versez. Vous obtenez Fox Bronte. Un cocktail de vérité.