Nous, ministres des Affaires étrangères et ministres de la Défense d'Allemagne, d'Espagne, de France, d'Italie et de Pologne, nous sommes réunis ce jour à Paris pour confirmer notre volonté de promouvoir une politique européenne ambitieuse dans le domaine de la sécurité et de la défense. De grands progrès ont été accomplis ces dix dernières années.
Les trois nouvelles missions lancées cette année témoignent de la capacité de l'Union européenne à agir. Toutefois, des menaces pour notre sécurité, y compris dans le voisinage de l'Europe, appellent à prendre des mesures décisives. Les Européens doivent assumer leur part de responsabilités pour relever de façon plus énergique les défis à venir afin de garantir la sécurité de l'Europe.
La force singulière de la politique de sécurité et de défense commune tient à son approche globale de la gestion des crises. En mobilisant tous ses instruments civils et militaires, l'Union européenne doit être capable de résoudre des crises complexes, pluridimensionnelles et impliquant plusieurs acteurs, tout en renforçant l'efficacité de ses missions et opérations.
La réforme en cours des procédures de gestion des crises et la prochaine revue du Service européen d'action extérieure devraient permettre à l'Union européenne d'agir rapidement et efficacement sur tout le spectre des mesures de gestion des crises, en étroite coopération avec les organisations internationales et régionales ainsi qu'avec les pays partenaires.
Engagés dans la mise en œuvre des conclusions du Conseil des affaires étrangères de décembre 2011 et juillet 2012 sur la politique de sécurité et de défense commune, nous sommes convaincus que l'Union européenne doit mettre en place, dans un cadre qui reste à définir, des structures véritablement civilo-militaires pour planifier et conduire des missions et opérations et créer une plus grande synergie entre le Service européen d'action extérieure et la Commission afin de garantir leur réussite.
L'Union européenne devrait être apte et résolue à prendre ses responsabilités dans des régions où ses intérêts de sécurité et ses valeurs sont en jeu. Le respect de ses engagements en matière de sécurité et de stabilité là où l'Union européenne est déjà engagée de façon opérationnelle et le lancement de nouvelles missions et opérations de gestion des crises constituent à cette fin les contributions les plus concrètes et les plus indispensables de la PSDC.
Nous partageons l'analyse que fournir un soutien aux organisations régionales et aux autorités locales en faveur de la stabilité dans des zones non gouvernées ou fragiles renforce la sécurité des citoyens et des intérêts de l'Union européenne. Dans cet esprit, l'Union européenne a accru son engagement dans la corne de l'Afrique, en poursuivant l'appui à la gouvernance et au développement des capacités de la Somalie et dans le Sahel, en particulier au Niger, dans le cadre d'une approche globale et régionale. Nous encourageons nos partenaires à accroître leurs efforts en faveur d'un règlement d'une solution politique à la crise malienne, ainsi qu'à contribuer à une éventuelle mission de formation en soutien aux forces armées maliennes, conformément aux conclusions du Conseil des affaires étrangères du 15 octobre. Nous encourageons également l'Union européenne à se tenir prête, comme le rappellent les conclusions du Conseil des affaires étrangères de juillet 2012, à assister et soutenir les nouvelles autorités libyennes.
En ce qui concerne les Balkans, autre zone clé pour notre sécurité, il nous faut discuter avec nos partenaires de la façon dont l'Union européenne pourrait mieux agir sur le terrain et contribuer davantage à la normalisation de la région. L'Union européenne doit également demeurer engagée et impliquée dans les efforts pour stabiliser et apporter une solution au conflit en Géorgie. S'agissant de l'Afghanistan, nous devrons maintenir l'engagement de l'Union européenne en faveur d'une police nationale afghane forte et efficace, en coordination avec d'autres acteurs internationaux.
Les Européens doivent se donner les moyens de leurs ambitions dans le domaine de la sécurité et de la défense. S'agissant des moyens civils et militaires nécessaires, y compris les instruments de réaction rapide tels que les groupements tactiques de l'Union européenne, nous devrions être prêts à les tenir à disposition, les entraîner, les déployer et les maintenir sur le terrain.
Il est essentiel de continuer à développer les capacités stratégiques adéquates, en toute transparence et cohérence avec l'OTAN. Les efforts entrepris jusqu'à présent dans des formats ad hoc entre Européens ont déjà permis des projets significatifs de mutualisation et de partage.
Afin de renforcer cette coopération, les efforts associant, de façon pragmatique, au moins deux pays européens, notamment sur des capacités à forte valeur ajoutée (par exemple l'espace, la défense antimissile balistique, les drones, le ravitaillement en vol, les capacités de transport aérien, le soutien médical aux opérations, la radio logicielle) resteront primordiaux. Nous devrions maintenir notre engagement à travailler ensemble, entre nous et avec d'autres partenaires intéressés, afin de promouvoir les projets existants et à venir de mutualisation et de partage, destinés à améliorer la disponibilité et l'efficacité de nos capacités critiques communes.
Les États membres de l'Union européenne devraient continuer à renforcer les vecteurs et multiplicateurs de forces qui assurent la capacité de déployer et de soutenir des opérations militaires sur des théâtres lointains et de longues périodes et à mieux équilibrer le partage du fardeau au sein de la communauté transatlantique. Ce serait un grand pas vers une approche « intelligente » et « partagée » des réductions des dépenses militaires. Une meilleure coordination entre les processus nationaux de planification optimiserait les ressources disponibles et la coopération entre États membres.
L'Union européenne doit continuer à jouer un rôle majeur en matière d'innovation et de progrès technologiques et conserver ses capacités et compétences en matière de défense.
A cette fin, nous estimons que l'Europe doit s'efforcer d'amplifier ses efforts, et renforcer les synergies entre les activités de Recherche & Technologie dans les activités des États membres liées à la défense et de faire appel à l'Agence européenne de défense dans son rôle de facilitateur. A cet égard, il conviendrait d'étudier plus avant une meilleure utilisation des possibilités offertes par le Programme cadre européen de recherche et de développement, en particulier en ce qui concerne les technologies à double usage. A cette fin, tous les acteurs impliqués devraient mener un dialogue constructif sur la préparation du prochain programme cadre HORIZON 2020. Ils devraient aussi analyser attentivement les moyens de soutenir le renforcement de l'industrie européenne de défense, en tenant compte du cadre juridique existant et de ses implications politiques.
Les restrictions significatives des budgets de défense et l'insuffisance de nouveaux programmes, parallèlement à la baisse des budgets de Recherche & Technologie, pourraient réduire les capacités d'ingénierie et les moyens de défense européens en affectant la Base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE). Nous devrions œuvrer en faveur d'une BITDE suffisante, compétitive et viable. Ces objectifs impliquent une plus grande coopération entre États membres et des synergies accrues.
Nous sommes prêts à contribuer ensemble à cet effort, avec tous nos autres partenaires européens désireux de renforcer les capacités nécessaires à la gestion européenne civile et militaire des crises. A titre d'exemple, le Commandement européen de transport aérien, adapté et étendu à d'autres États membres, pourrait constituer un véritable pas en avant vers des capacités rapides et partagées de transport aérien et de ravitaillement en vol, et représente un modèle innovant qui pourrait être appliqué à l'utilisation d'autres capacités. Dans les mois à venir, nous souhaiterions que ces discussions favorisent la coopération sur des projets structurants pour contribuer au renforcement de la culture de coopération en Europe.
Nous saluons l'initiative du Président Barroso et du Président Van Rompuy de tenir une session du Conseil européen en 2013 qui sera appelée à confirmer notre ambition en matière de politique de sécurité et de défense commune et à fournir les orientations nécessaires sur les priorités stratégiques à venir, entre autres pour renforcer la compétitivité de l'industrie de défense européenne. Cette initiative devrait recevoir un soutien politique adéquat au plus haut niveau, en lien étroit avec la Haute Représentante, et s'inscrire dans un processus plus large d'intégration politique européenne accrue. En matière de défense aussi, nous avons besoin de plus d'Europe. Nous sommes résolus à œuvrer ensemble en ce sens.