Jeudi 15 novembre 2012
« A vot’ bon coeur m’ssieur/dame ! Va bosser, parasite d’auteur ! »
Le don fait beaucoup parler de lui en ce moment, puisque la Team Alexandriz a accepté (plus qu’offert d’ailleurs, puis que c’est l’auteur qui a fait la démarche et pas l’équipe de pirates de l’ebook) de placer un bouton paypal de don pour soutenir un auteur dont le livre venait d’être diffusé par la TA.
Un auteur, ça doit manger, le rappelait si bien Thomas Geha, l’écrivain piraté. Oui, mais voilà, une chose qui exaspère très fortement les gens sur internet (et ailleurs aussi), c’est le fait de mendier.
Voilà, j’ai trois enfants, j’ai un compagnon qui gagne sa vie correctement. N’empêche que là, mon ordinateur est en train de me lâcher et que je n’ai pas les moyens pour le remplacer. Je n’ai plus un pull sans trou (c’est même une catastrophe sur certains), ma mère m’a offert de m’en acheter un (j’en ai honteusement profité pour regarnir mon étagère de deux paires de leggings et d’une robe… je ne suis pas une accro du shopping, l’intégralité de ma garde-robe tient dans une valise…). Elle a également payé les blousons d’hiver des gamins, des chaussettes pour le petit dernier. Oui, mon compagnon gagne sa vie suffisamment pour que je puisse me consacrer à l’écriture à temps plein, mais on est toujours au régime pâtes 1er prix, pommes de terre, riz. Les légumes sont en boîtes et la viande rouge, nous avons oublié ce que c’est depuis longtemps. Je confectionne moi-même mes biscuits BN et j’ai la chance d’avoir des enfants qui « adorent les biscuits de maman » quand il s’agit de Petit Copain (même pas des petits beurres) avec du chocolat fondu 1er prix (à l’huile de soja) dedans. Je ne me plains pas, je pourrais aussi aller pointer au Pôle Emploi : une femme de 30ans avec 3 enfants et un diplôme en histoire de l’art, même si plus prestigieux qu’une licence de fac, je risquerai d’y pointer longtemps.
Je ne me plains jamais ici, parfois un peu sur Twitter (et encore, je ne parle pas d’argent sur Twitter), pourquoi ? Parce qu’un auteur qui chougne, qui geint, qui est rabat-joie, c’est pas vendeur. On finit par le détester ce type qui ose vouloir toucher de l’argent pour son travail. Non, mais c’est vrai, s’il voulait gagner sa vie, il aurait été postuler au McDo. Trop vieille et trop diplômée pour le macdo, désolée. Je pourrais aussi confectionner des serviettes hygiéniques lavables et des vêtements d’allaitement histoire d’utiliser mon temps à faire quelques choses qui s’échange contre de l’argent (ah oui, c’est vrai, je l’ai fait aussi ça… mais je déprimais tellement dans ces tâches répétitives que j’ai failli le suicider en me passant la tête sous l’aiguille de la machine à coudre…) parce qu’on peut donner de l’argent contre un truc utile, mais pas trop attention, pas question de rémunérer la couturière au minimum smic horaire… Les galères de boulot, je connais, ne vous en faites pas, je ne fais pas écrivain parce que je suis une feignasse qui se lève tard et passe sa journée à comater (ok, en ce moment-ci, mais je suis malade…)
Un livre, c’est pas utile, c’est du loisir. Si on doit payer du loisir, autant aller débourser 150€ pour aller voir Holiday on Ice (2h30 de froid et d’acrobaties, avec interdiction de photographier ou de filmer) que d’acheter un bouquin à 4€ qu’on pourra relire tant qu’on veut, bien au chaud sous sa couette et qui sera peut-être un peu plus garni d’émotions et de sentiments qu’un ex-champion de patinage artistique qui fait des saltos,
Depuis plus d’un an, j’ai un bouton de Don Paypal (il est juste devenu plus discret depuis quelques mois), j’ai eu 2 dons. 2 personnes que je remercie chaleureusement évidemment, mais est-ce parce que je n’ai pas assez chougné « Madam’ j’ai bébé, sivoupléééééééééééééé, madaaaaaaaaaaaam » à côté du distributeur ?
De même pour les livres, je ne viens pas vous baratiner tous les 3 tweets ou les 2 articles sur « il est super mon bouquin, achetez-le ! » comme certains (qui la plupart n’ont qu’un seul livre à vendre… j’en ai une dizaine et ça augmente sans arrêt !). Je sais que moi, ça m’énerve ce genre de chose. D’autant que je pense que mes lecteurs sont intelligents qu’ils auront le réflexe : tiens ce qu’elle dit est bien/intéressant (ok, y’a des fautes…) si j’allais lire un peu ses livres ? Surtout que mes livres, au contraire de mes articles, sont relus et corrigés ! (et puis si vous trouvez une coquille, vous me le dites, je corrige, je suis pas méchante, même avec les gens qui n’aiment pas mes livres je reste sympa)
J’ai publié 6 livres (je compte pas les Collections 4 qui sont tout petits) ça fait plus d’un an et demi de boulot à temps plein et je dois continuer… Mais principe commercial de base : ne jamais dire que ça ne se vend pas ! Car ce que le lecteur veut acheter, c’est ce qui se vend, c’est le truc que les autres ont lu, qu’un bouquin qui ne se vend pas est forcément mauvais. Je vous ai baratiné pendant des mois avec Petits Meurtres à Paris parce qu’il a eu du succès (+/- 2000 ventes) : mais reconnaissons-le, c’était le niveau zéro de la littérature de qualité, ça fait rire, ça détend, mais ça ne restera pas dans les annales.
Alors voilà, pour rétablir la balance, je vous le dit : mon dernier roman Naufrage s’est vendu à 13 exemplaires. Ouep. 13, dont 11 achetés par un seul homme (mais quel homme ! XD ) qui a eut l’audace de ne pas aimer mon livre, d’en faire la critique et d’en offrir 10 exemplaires à 10 lecteurs pour qu’ils disent ce qu’ils avaient pensé, eux, du livre !
Allez voir ça chez The SFReader : la majorité des lecteurs ont apprécié le livre !
Est-ce le sujet ou l’accroche qui ne plaisent pas ? je ne sais pas.L’unique et mauvaise critique (quoique) du livre ? Ca ne m’empêche pas de continuer. Petits Meurtres 2 est en route vers la publication (mais il n’aura certainement pas le succès du 1er), je continue d’écrire du sérieux et du pas sérieux comme je le sens, moi.Mais si jamais l’angoisse de la publication (ça prend du temps d’éditer, d’encoder les ebooks, de faire les fiches/couv sur chaque plateforme, de faire la pub derrière) ne se concrétise pas par un retour plus évident (genre, si je pouvais me racheter un ordi portable quand mon écran aura définitivement décidé de rendre l’âme ou même juste me payer une tranche de dinde à l’occasion), alors j’arrêterai de publier et je garderai mes textes pour moi.Je ne cherche pas la gloire (encore moins la fortune), je veux juste qu’il y ait un retour sur mes textes suffisamment gratifiant pour que ça ne devienne pas une corvée de publier : vous lisez ? Commentez, parlez, diffusez. Parce que j’ai parfois l’impression d’avancer dans le noir complet, et me prendre des portes en pleine poire, merci mais non…