J'ai exploré, près du caribal le plus méridional, une série de grottes où les Lacandons ne se sont aventurés qu'avec crainte. Que ces cavernes aient été habitées, on en tout cas utilisées, par une population indigène antérieure aux Lacandons actuels et dont ceux-ci ignorent tout, c'est ce que tendraient à prouver des vestiges tels qu'une céramique beaucoup plus perfectionnée que celle de nos Indiens, ou encore des murettes de pierres fort bien ajustées construites à l'entrée de certaines salles hypogées. C'est l'eau fortement sulfureuse d'une source voisine qui a creusé dans la masse d'une colline un labyrinthe que nous n'avions ni le temps ni les moyens de fouiller. L'air y est oppressant, presque irrespirable. Nos compagnons indiens étaient persuadés que nous les avions entraînés dans le royaume de Kisin : l'un d'eux, Bor, jeune homme d'un caractère instable et emporté, me fil une scène violente, vociférant que nous allions tous mourir, mais, quand la vengeance du dieu se fit attendre et qu'aucun malheur surnaturel ne fondit sur nous, notre prestige parvint à son comble et Bor ne dédaigna pas d'en tirer quelque peu pour lui-même.
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C'est au carabal de San Quentin que j'ai eu la révélation dramatique de ce que signifie pour un Indien le mythe du dieu mauvais.
L'idée qu'un sagittaire divin frappe de ses traits les victimes de certaines maladies est commune à plus d'une culture : chez les Aztèques, c'était le dieu de l'Etoile du Matin, le « Seigneur de la Maison de l'Aube » qui, à certaines dates du calendrier divinatoire, s'acquittait de cette sinistre tâche.- JACQUES SOUSTELLE. LES QUATRE SOLEILS.TERRE HUMAINE
Le terme pixan que l'on traduit par les mots « âme », « esprit », désigne en lacandon l'essence, ou la part spirituelle d'un être vivant ou d'un objet. Dans le cas d'un être humain — ou d'un animal — c'est le principe de vie dont la présence dans l'organisme se manifeste par le pouls et les battements du coeur.
le terme s'applique aussi aux offrandes. Les dieux « mangent » le pixan de l'encens qui est brûlé pour eux. Ils« mangent » le pixan de la nourriture cérémonielle ; ils « boivent » le pixan du ba'che', du gruau de maïs. En somme les dieux consomment l'essence de ces offrandes, tandis que les hommes en consomment la substance. Le pixan est donc ce qui reste d'une offrande, d'un animal, ou d'un être humain après leur destruction physique. La mort est due à l'action divine. Lorsqu'une faute grave a été commise les dieux refusent tout compromis, toute médiation ; et si le coupable ne parvient pas à « voir » son péché Hachàkyum ordonne à Mensabàk de prendre son âme, à moins qu'il ne prenne celle de sa femme ou celle d'un de ses enfants.
« Chez les Lacandons, au contraire, c'est un membre de la famille qui se charge de préparer le cadavre. Il est vrai que le mode de résidence en famille restreinte (le mari, ses femmes et ses enfants) ne facilite pas l'intervention d'autres personnes. On place dans les mains du défunt un épi de maïs, un os de singe ou de pécari et une mèche de cheveux. Ces éléments seront utiles à l'âme pour se débarrasser des animaux (poules, chiens et poux…) qui l'attaqueront successivement sur le sentier menant au royaume des morts. Sous le cadavre, on place une coupelle en terre cuite contenant des braises pour le garder chaud, sinon, le mort pourrait aller se plaindre aux dieux et accuser ses parents de l'avoir laissé refroidir. Les dieux puniraient alors cette négligence, en faisant mourir une autre personne de la famille. Il en va de même si des braises trop ardentes brûlent le corps. Le lendemain de la mort, le cadavre sera conduit à sa dernière demeure, une tombe dans la forêt.
« Un filet – contenant une gourde de gruau de maïs, quelques tortillas, des bougies et des brindilles pour faire du feu – est disposé dans la tombe sur les genoux du mort. Les tortillas et le gruau sont offerts pour le voyage ; les bougies et les brindilles, pour les nuits solitaires dans l'inframonde. Des sources indiquent que la gourde de balche' placée près du corps serait une offrande pour Sukunkyum.Durant les trois jours qui lui sont nécessaires pour rejoindre le royaume de Mensabäk, l'âme séjourne sur terre. C'est pourquoi de la nourriture est apportée quotidiennement sur sa tombe et le feu ravivé. Ces trois jours sont considérés comme une période délicate, pendant laquelle l'âme est susceptible d'apparaître aux vivants, en particulier lorsqu'ils replacent des offrandes sur la sépulture. Une telle rencontre peut être fatale. Les tortillas et le gruau sont ensuite rapportés à la maison et consommés par la famille car on dit que les âmes ne mangent que le pixan des aliments. Les Lacandons s'attendent cependant à ce qu'un peu de nourriture soit entamé (la moitié d'une tortilla, une gorgée de gruau). Si rien n'a été touché pendant les trois jours, alors il faudra en conclure que l'âme, trop pécheresse, ne reviendra jamais du Metlan (lieux des morts) où elle a été brûlée entièrement par Kisin). » Olivier Le Guen, « Quand les morts reviennent… Réflexion sur l'ancestralité chez les Mayas des Basses Terres », Journal de la société des américanistes
Qu'arrive-t-il au pixan d'un homme après la mort de celui-ci ? l'âme d'un défunt erre pendant trois jours dans la forêt, rôde autour de la tombe et de la hutte familiale, va et vient entre la terre et le ciel . Au bout du troisième jour l'âme entame son voyage vers le monde souterrain qu'elle atteindra après un chemin parsemé d'épreuves et de dangers.
« elle devra franchir une rivière, et c'est l'âme de son chien qui la portera sur son dos jusqu'à l'autre rive.
Alors elle « oublie sa nostalgie » et se résigne à retourner chez Mensabàk. Le monde des dieux est bon pour les dieux, mais pas pour les hommes, m'a dit le vieux Chan K'in. Les hommes sont habitués à la forêt, et les âmes des morts sont malheureuses sous le rocher de Mensabàk. Il y a là une multitude de gens; il n'y a pas de forêt, donc pas de gibier ; et les morts y sont séparés de leur conjoint. Ils se sentent seuls dans un monde étrange, et ils regrettent celui-ci. »DIDIER BOREMANSE.OP.CITE
férocité des dieux est une des raisons pour lesquelles des familles lacandones se sont converties au christianisme).
« La relation entre l'homme et les dieux est empreinte d'ambivalence. Hachàkyumest le créateur, le père des « Vrais Hommes » ; et il leur apporte assistance et protection par l'intermédiaire de son gendre, Ah K'in Chob. Celui-ci sert de messager et de médiateur entre Hachâkyum et ses créatures, entre Hachàkyum et les autres divinités, ainsi qu'entre celles-ci et les hommes. Néanmoins si ces derniers commettent des fautes, les dieux les plus cléments sont susceptibles de se mettre en colère et de les châtier durement. Le monde fut détruit plusieurs foi spour cette raison. La mort et l'enfantement dans la douleur devinrent le lot de
l'humanité parce que une femme manqua de respect à Ah K'in Chob. Ce fut alor sque le gendre de Notre Père donna aux hommes les encensoirs afin qu'ils puissent implorer les dieux. Ceux-ci continuèrent néanmoins à apparaître au genre humain durant les cérémonies religieuses. Ils venaient en personne consommer les offrandes de nourriture et de boisson rituelles. Jusqu'au jour où un homme se fâcha contre Ah K'in Chob et tenta de lui asséner un coup de machette. Le dieu condamna alors l'humanité à la maladie et à la souffrance, et cessa de lui apparaître. Depuis ce sacrilège, les dieux devinrent invisibles au commun des mortels. Aujourd'hui il est même dangereux pour l'homme de « voir les dieux ». Des divinités telles qu'Itzanohk'uh et Mensabàk — féroces et cruelles — dévoreraient immédiatement celui ou celle qui s'approcherait de leur antre. Il est pourtant arrivé à certain hommes, ayant atteint un haut niveau spirituel, de « voir les dieux » et de s'entretenir avec eux..
dieux » et de s'entretenir avec eux.
Le vieux Chan K'in (il a plus de quatre-vingts ans) m'a raconté comment son grand-père paternel rencontra Kânànk'ax (« Celui qui garde la forêt ») alors qu'il chassait des pécaris. Tout d'abord l'ancien aperçut un jaguar . Le fauve se dressa sur ses pattes de derrière et prit l'aspect d'un être humain ; il portait une tunique tachetée de rocou. « Moi, je garde ta forêt », dit-il à l'ancien. Et il l'invita à le suivre. Le grand-père de Chan k'in vit de nombreux champs de maïs. Il observa que les dieux vivent groupés (comme l'étaient les Anciens Mayas), et non dispersés comme les « Vrais Hommes ». Il les vit dans leurs maisons occupés à boire du bâche'. Une fois rentré chez lui, l'ancien fut pris de fièvre, et il alla prier dans le temple. L'homme qui a vu les dieux tremble de peur et de froid, et finit par mourir s'il n'implore immédiatement ses encensoirs. Plus tard, il retourna là où il avait vu les dieux, mais il n'y trouva que des ruines (il avait découvert un site archéologique mineur situé près de la colonie « Sival »). Il prit quelques pierres, rentra chez lui, et fit un encensoir pour Kânânk'ax. » DIDIER BOREMANSE.OP.CITE
Les rites utilisaient une boisson rituelle le Balche ou Baltšé, sorte d'hydromel à base d'écorce séchée mélangée à l'eau, au miel et au mais pilé , très énivrant lorsqu'il avait fermentée 2 jours. Les femmes n'avaient pas le droit de s'en approcher ou de toucher l'écorce ; en revanche, elles fabriquaient le Pozol, la nourriture des dieux boisson épaisse, très nourrissante, faite avec de la pâte de mais délayée dans de l'eau. Toutes les cérémonies étaient accompagnées de chants monotones, ne comportant qu'une échelle de notes réduites ;en général l'officiant expliquait au dieu ce qu'il faisait , puis ce qu'il demandait . Les deux ou trois phrases que comportait le texte étaient répétées sans fin
Au total, la religion, dans la vie quotidienne d'un Lacandon, pèse lourdement. On est déjà confondu quand on évalue le temps, l'énergie, l'ingéniosité et la dépense de force physique que chacun de ces Indiens doit consacrer simplement à survivre face à une nature hostile, dans un milieu qui n'a rien du paradis des heureux sauvages tel qu'on l'imaginait au siècle des lumières : quel labeur sans trêve, quel effort épuisant ne lui faut-il pas renouveler chaque jour pour abattre des arbres énormes, repousser l'assaut perpétuel de la brousse, brûler la jungle, construire et entretenir sa hutte, planter maïs, manioc, coton, tabac, rechercher et cueillir vingt autres plantes, transpercer de ses flèches oiseaux, singes, pécaris et poissons ! Or il bâtit encore un temple, souvent plus spacieux et mieux agencé que sa propre case, avec sa table-autel ou ses étagères; il façonne avec soin ses encensoirs, modèle les figurines qui représentent les dieux, utilise le roucou, le noir de fumée et la craie pour les décorer; il va récolter dans la forêt la gomme aromatique du copal et les baies colorantes; il bat l'écorce dont on fait les bandeaux rituels, creuse un tronc d'arbre pour la fabrication du baltché, érige un abri sous lequel on prépare le k'ayem, entreprend de longs et fatigants pèlerinages à Yaxchilân : bref, lui qui a déjà tant de mal à se procurer ce qui lui est indispensable, pour lui-même et pour les siens, s'astreint en outre à un travail presque équivalent pour le service de ses dieux.JACQUES SOUSTELLE.OP.CITE
En offrant les prémices aux dieux l'homme leur demande principalement deux choses : de pouvoir lui aussi consommer les fruits de sa récolte ; et d'être, lui et les siens, à l'abri des maux et des maladies. La souffrance physique (yah), la maladie, et la mort sont perçues comme un châtiment divin. Si quelqu'un offense offense , les dieux se vengent sur lui ou sur l'un de ses proches. Et la victime n'a d'espoir de guérir que son péché commis est reconnu, confessé, et si une promesse de paiement est faite par des médiateurs à la divinité offensée. Le péché, la médiation, et le paiement rituel sont déterminés par la divination ; et tous ces éléments, pris dans leur ensemble, définissent, à mon sens, la quête religieuse des indiens Lacandons. L'homme dont l'épouse ou l'enfant est malade, dont l'épouse ou la fille va accoucher, pratique le rite de divination pour connaître la volonté des dieux et savoir comment obtenir la « guérison » du malade.
« Lorsque le devin a découvert quelle est la cause de l'infortune, il lui reste à savoir quels dieux sont disposés à l'aider en tant que médiateurs, quel paiement ils veulent, et quel paiement il lui faudra offrir aux dieux offensés. Il utilisera la technique divinatoire que l'on vient de décrire pour obtenir des réponses à ses multiples questions. Celles-ci auront trait principalement au type de cérémonie requise, au nombre et à la forme des offrandes, à la manière dont elles seront distribuées parmi les dieux.
Une fois terminé le rite de divination l'homme va dans son temple, et s'adresse aux dieux qui ont accepté de lui servir d'intermédiaires. Les encensoirs des divinités offensées qu'il s'agit d'apaiser restent sur l'étagère. Seuls ceux des médiateurs (deux ou trois) sont déposés sur la planche-autel, et le célébrant leur offre de l'encens afin d'obtenir la guérison de la personne malade. Ce qu'il dit alors aux encensoirs reflète l'information qu'il a obtenue par la divination. Il confesse sa faute, implore le pardon des dieux et leur promet une cérémonie importante en guise de compensation — paiement qui a été déterminé par le rite divinatoire. Il décrit la future cérémonie aux dieux ; il décrit les symptômes de la maladie, et demande aux dieux de guérir le malade ».DIDIER BOREMANSE
A partir du mois d'août les premiers épis de maïs encore verts sont offerts aux dieux. Entre août et octobre se déroule une série de cérémonies impliquant chacune une préparation différente du mais (à mesure qu'il mûrit). Tout d'abord le célébrant prend, un à un, les encensoirs rangés sur l'étagère suspendue au toit du temple, et les pose avec précaution sur une planche afin qu'ils ne touchent pas le sol (cette planche-autel se trouve par terre). Ensuite il va chercher la nourriture cérémonielle préparée par son épouse — le gruau servi dans des bols et les épis de maïs servis dans des plats — qu'il dépose en face des encensoirs dont la face anthropomorphe est tournée vers l'est Une fois mis place les encensoirs et les offrandes, la cérémonie peut commencer. Le célébrant saisit une calebasse pleine d'encens de copal ainsi qu'une petite palette d'acajou en avec laquelle il sert de l'encens dans chaque pot d'argile, en psalmodiant . Les bols contenant le gruau sont présentés aux encensoirs. Après avoir soulevé tous les bols, l'officiant se lève et prend une conque marine dans laquelle il se met à souffler afin d'avertir les dieux que l'offrande est imminente. Leur « âme » est invitée à venir consommer l'« âme » de la nourriture.
Au demeurant, les hommes du voisinage savent, en entendant le son de la conque, qu'une cérémonie va débuter ; et ils se dirigent vers le temple afin d'y partager le gruau et les épis de maïs avec le célébrant. Celui-ci donne à présent du gruau aux encensoirs bois il verse quelques gouttes de liquide (provenant de chaque bol présenté au dieu) sur la lippe de chaque figure d'argile. Après avoir offert le maïs et le gruau quatre fois aux encensoirs, le célébrant distribue la nourriture cérémonielle aux hommes présents dans le temple, et les invite à la consommer avec lui. Une cinquième et ultime offrande est faite aux encensoirs qui met fin à la cérémonie. Après quoi ceux-ci sont remis en place sur l'étagère.
La culture des Lacandons n'est, à aucun degré, «primitive. Ils appartiennent à cette partie de l'humanité américaine qui a fait vers 3000 avant J.-C. sa révolution agraire comme nos ancêtres du Vieux Monde l'avaient faite quelque 3.000 ans plus tôt. Certes, les Indiens du Mexique n'ont eu ni bovins, ni porcs, ni moutons, ni chèvres. Leur économie agricole n'a donc pas pu s'enrichir de l'élevage, et la culture du maïs n'a pas connu la charrue. Il n'en reste pas moins que les Lacandons sont des paysans, si étrange que puisse sembler d'abord ce qualificatif appliqué à ces hommes de la forêt.
« Dira-t-on que les Lacandons sont « primitifs » par leur mode de pensée, où les représentations religieuses et mythiques tiennent une si large place …..près les techniques et les connaissances qui leur servent de soubassement, viennent les représentations de caractère mythique et religieux : c'est au sens d'Aristote, après la physique, la métaphysique. Chez nos Indiens, on ne trouve pas de solution de continuité, de fossé, entre l'une et l'autre. C'est nous qui établissons cette distinction. Elle existe dans notre esprit. Mais, dans la réalité, un Lacandon, pour brûler la brousse et semer son maïs, considère l'invocation au dieu du feu comme aussi nécessaire que l'allumage du brasier. Pour réussir à la chasse, il lui faut, certes, un arc soigneusement construit et des flèches bien équilibrées ; il faut également que cet arc et ces flèches aient été tenus à l'écart des femmes, dont le contact suffirait à en ruiner l'efficacité. Homme chétif et périssable, il s'efforce d'insérer sa volonté, sa prière et son espoir dans la machinerie du monde. Un rite exactement et opportunément accompli écarte la menace des jaguars, apaise le dieu des orages, assure au Soleil sa nourriture pour mi'il reparaisse chaque matin après son pénible voyage dans les ténèbres souterraines. »…
« Quand un Lacandon veut dire : « Je suis un Lacandon», il emploie l'expression maya winken, littéralement «homme-je», soit : «Je suis homme». Pour nous désigner, il empruntera à l'espagnol les mots : la gente, « les gens ». Et certes il y a là un de ces cas fréquents d'ethnocentrisme, chaque peuple tendant à s'identifier avec l'homme par excellence. Mais d'un autre point de vue le Lacandon a raison : si étrange et si différent qu'il nous paraisse, il est d'abord un homme, une des formes du phénomène-homme. Si le double poids de l'histoire et du milieu naturel a infléchi l'usage qu'il fait de ses facultés dans un sens qui n'est pas le nôtre, rien dans ces facultés elles-mêmes n'est irréductible aux nôtres. Moi aussi je suis héritier d'un passé et le monde où je vis est aussi une jungle. Je peux, comme le Lacandon, proclamer que je suis homme. Diversement façonnés, nous sommes faits, lui et moi, de la même glaise. Ou, pour employer une autre métaphore, nous sommes, lui et moi, deux variations sur un même thème : ni identiques, ni radicalement étrangers…. »
« J'ai comparé plus haut l'ethnologue à l'astronome. Il est bien vrai que les diverses cultures se situent, les unes par rapport aux autres, comme des astres dans l'espace. De même que l'univers, nous le savons, ne tourne pas autour de notre Terre et ne s'ordonne pas en fonction d'elle, de même notre civilisation n'est qu'un cas particulier parmi d'autres, elle ne constitue ni un achèvement privilégié ni même un point d'observation ou un cadre de référence préférables en eux-mêmes à d'autres. Mais il reste que ces planètes demeurent comparables ; les plus éloignées de nous ne sont pas inconnaissables, parce que toutes sont pétries de la même matière. Etant ainsi parvenus à la notion de la relativité des phénomènes sociaux, en repoussant la tentation d'un illusoire ethnocentrisme, nous savons pourtant qu'une condition humaine commune relie les unes aux autres les cultures les plus diverses par-dessus les abîmes qui les séparent.
Reconnaître en tout groupe humain à la fois ce qui le rapproche des autres et ce qui lui est singulier, telle est bien la première leçon que m'ont apprise les petits hommes cuivrés de la forêt chiapanèque ».JACQUES SOUSTELLE. OP.CITE
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