Abandonner EADS ΰ 26 euros sera une bonne affaire.
Arnaud Lagardθre s’invite ΰ nouveau dans l’actualitι. Il ιtale sans complexes sa vie amoureuse sur les ιcrans de la tιlιvision belge et, au mκme moment, indique qu’il pourrait cιder dθs 2013 sa participation de 7,5% dans EADS. En d’autres termes, c’est un homme ιclectique, dιroutant, inclassable, un ιlιphant dans un magasin de porcelaines. Reste le fait, tιlι belge ou pas, que nous n’avons pas ΰ nous intιresser ΰ la grande jeune femme qui, depuis peu, roule en Porsche. En revanche, l’actionnariat du groupe EADS est une affaire sιrieuse qui mιrite la plus grande attention.
Que nous dit le fringant Arnaud Lagardθre, ΰ sa maniθre ? Qu’EADS se porte beaucoup mieux, et revenant de loin, est cotι ces jours-ci ΰ 26,60 euros. Ce qui s’explique, dit-il en substance, grβce ΰ l’A350XWB dιsormais sur les rails et la tonne tenue, fut-elle tardive, de l’A400M, maintenant sorti de l’orniθre. C’est un point de vue comme un autre. D’oω l’intιrκt de vendre des titres qui constituent un beau pactole en mκme temps qu’une belle incongruitι au cœur d’une entreprise dιsormais centrιe sur les mιdias et le sport.
Il s’agit de l’aboutissement d’une bien curieuse saga, pour autant que l’on connaisse ses classiques, le point de dιpart, en 1826, relevant d’une initiative remarquable de Louis Hachette, un visionnaire apparu bien avant Clιment Ader et les frθres Wright. Il est vrai qu’il s’agissait tout d’abord de presse et d’ιdition avec, notamment, l’apparition du premier magazine grand public, la sortie du dictionnaire de Littrι puis la crιation des Messageries Hachette.
Un virage stratιgique dιcisif a ιtι abordι beaucoup plus tard, avec l’entrιe en scθne de Jean-Luc Lagardθre, ingιnieur issu du bureau d’ιtudes de Dassault, remarquι par Silvain Floirat et bientτt chargι de dιvelopper Matra. On connaξt la suite : les missiles (on disait alors les engins), Matra Automobile, les Relais H (plus tard, hιlas, «Relay»), Europe 1, Paris Match. Puis Matra Marconi Space, Matra BAe Dynamics, Aerospatiale-Matra Hautes Technologies et, enfin, aboutissement remarquable, en 2000, crιation d’EADS et lancement de l’A380, clef de voϋte hautement symbolique de la construction aιrospatiale et de Dιfense europιenne. Sans la volontι de forcer le destin de Jean-Luc Lagardθre, l’A380 n’aurait probablement pas ιtι lancι.
«Jean-Luc» manque, plus que jamais. On l’imagine volontiers expliquant ΰ Angela Merkel qu’il ιtait indispensable d’entιriner le projet de mariage EADS-BAE Systems, que le moment ιtait venu de faire sortir les Etats du capital du groupe. Et cela en aucun cas par idιologie mais sur base d’une saine logique industrielle, d’une nιcessitι de mise en conformitι mondiale.
Que reste-t-il de ces pages glorieuses ? EADS, certes, mais cτtι Lagardθre, des souvenirs, rien que des souvenirs. La demoiselle belge roule en Porsche mais seul Paris Match peut y trouver un sujet de satisfaction. Pire, l’autre soir, la tιlι belge n’a mκme pas battu un record d’Audimat avec ce vrai-faux sujet «people» sans vrai intιrκt. Mieux vaut s’en tenir au communiquι de 6 lignes qui, cette semaine, indique sθchement que Lagardθre «confirme sa volontι de cιder sa participation [dans EADS] dθs que les conditions de marchι et opιrationnelles le permettront». Et d’ajouter que «les conditions de cette cession pourraient κtre rιunies dθs 2013».
Angela Merkel saisira l’occasion, ΰ n’en pas douter, pour s’inquiιter bien inutilement de la dιfense des intιrκts allemands au sein du nouvel actionnariat. Jacques Chirac, ami proche, complice de Jean-Luc Lagardθre, passionnι d’aviation, ne pourra s’empκcher de penser trθs fort que la saga fait pschitt, qu’elle n’est mκme pas abracadabrantesque. Autant dire que nous sommes nombreux ΰ κtre trθs dιηus.
Pierre Sparaco - AeroMorning