La polémique reprend sur le gaz de schiste. Une belle guerre informationnelle (qui a d'ailleurs des aspects très différents selon que vous l'observez aux États-Unis, au Canada ou en France). Mais peut-être pas seulement une guerre informationnelle.
1/ En France, donc, les gazschisteurs ont perdu la première manche : ils n'ont pas venu venir, l'an dernier, l’offensive des opposants qui ont bien sollicité les réseaux, au moment de la campagne présidentielle. Résultat : gel de tous les permis, 1-0 pour les verts.
2/ Depuis six semaines, on observe une belle contre-offensive des énergistes. Articulé autour de plusieurs arguments, comme par exemple : 1/ Le principe de précaution a des excès et il faut laisser la place à la recherche, prudente, bien sûr 2/ Les progrès de la sciences et des technologies feront qu'on pourra extraire avec de nouveaux procédés moins polluants 3/ On est assis sur un tas d'or (dixit Rocard) et en ces temps de crise économique, on serait ...on de ne pas en profiter.
3/ Bref, le lobby marche à fond et on sent venir une égalisation des gris. Un partout, balle au centre.
4/ Pour l'instant, faible réponse des verts. On notera toutefois l’intéressant article de Corinne Lepage, qui déplace le débat : 1/ c'est une histoire de lobbyistes 2/ ce n'est plus seulement une histoire d'environnement, c'est aussi une histoire de monopole capitalistique.
5/ Pour l'instant, le gouvernement observe. Il a confirmé jusqu'à présent l’interdiction des permis de recherche, mais on sent qu'il pourrait vaciller. Sort du match incertain.
6/ Voilà pour la guerre informationnelle française. Petit théâtre, qui cache quelque chose de peut-être plus important. Le rapport récent de l'AIEA permet de connecter les deux réalités, la française et l'internationale. En effet, les États-Unis bouleversent leur marché de l'énergie, aussi bien en gaz qu'en pétrole. Ils sont en train de devenir indépendants en hydrocarbure. Il y a bien sur des soupçons de trafics des cours (car il faut qu'ils demeurent haut pour rentabiliser cette technique chère) (voir ici).
7/ Ainsi, la révolution américaine ne devrait pas affecter les cours mondiaux, puisque les Chinois compensent par leur consommation ce retrait US. Mais au fond, la question est ailleurs.
8/ SI les US ne dépendent plus de leurs achats de pétrole, cela les libère-t-il de leurs engagements au Moyen-Orient ? Mais sont-ils pour autant prêts à laisser le champ libre à la Chine comme nouvel acteur de la région, alors qu'ils ont pour objectif d'endiguer celle-ci dans une démarche globale ?
Voici, peut-être, la vraie question posée par la révolution du gaz de schiste.
O. Kempf