"John Maynard Keynes: entre mysticisme et séduction" de R. Ebeling

Publié le 13 novembre 2012 par Francisrichard @francisrichard

Les idées keynésiennes ont la vie dure. Pourtant elles se sont avérées complètement fausses. On croyait qu'elles avaient disparu. Il n'en est rien. A la faveur de la crise, elles sont réapparues.

Dans une publication parue ce jour sur le site de l'Institut Libéral ici, Richard Ebeling, professeur à l'Université Northwood, Californie, explique leur persistance en explicitant la pensée keynésienne.

Il rappelle d'abord quelles sont les deux idées principales de l'oeuvre majeure de John Maynard Keynes, intitulée Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la monnaie:

"D’une part, l’allégation que l’économie de marché serait essentiellement instable et susceptible de générer de longues périodes de chômage et de sous-utilisation des capacités de production, et, d’autre part, la supposition qu’il appartiendrait aux gouvernements d’agir contre ces dépressions économiques, à l’aide des divers outils de politique monétaire et budgétaire à leur disposition."

L'interventionnisme étatique avait trouvé son théoricien. De défendre un état activiste et planificateur faisait-il de Keynes un socialiste ou un communiste? Certainement pas au sens strict. D'autant qu'il se prétendait théoricien d'un nouveau libéralisme, tout en considérant "l'individualisme démodé et le laissez-faire" comme des "fardeaux du passé".

Keynes s'oppose en fait à la théorie économique traditionnelle. En vertu de celle-ci:

"Si pour une raison quelconque une vague de pessimisme économique devait conduire à une baisse de la demande d’emprunts pour investir, les taux d’intérêt baisseraient, ce qui rendrait l’épargne moins attractive. En conséquence, les dépenses de consommation augmenteraient en parallèle. De cette manière, alors même que les dépenses d’investissement diminuent, les dépenses accrues des consommateurs compensent la différence et assurent le "plein emploi" de la main d’œuvre et des ressources de la société."

Selon Keynes la capacité et les désirs des hommes à inventer des façons d'améliorer leur vie seraient limités. Il en résulterait une épargne non utilisée et non investie. L'épargne, qui serait malgré tout investie, le serait de manière imprévisible à cause de l'irrationalité des entrepreneurs face à un futur incertain. Ce qui expliquerait les alternances d'expansions et de récessions, les longues périodes de chômage élevé et les usines inactives.

Seul l'Etat, par des politiques monétaires et budgétaires appropriées, serait à même de jouer un rôle stabilisateur, permettant le plein emploi et une production stable. En intervenant et en dépensant lui-même l'épargne inutilisée, l'Etat stimulerait l'activité d'investissement, quel que soit celui-ci, cela n'a pas d'importance.

Keynes pense que l'Etat, au contraire des entrepreneurs, est seul capable de calculer calmement sur le long terme ce qui est socialement avantageux pour un pays. A condition que soient aux commandes ceux qui ont les bonnes idées et les bons sentiments. Il n'explique pas comment sont déterminés les membres de la société qui répondent à ces critères...

Richard Ebeling rappelle que Keynes se présente lui-même comme un immoraliste, qu'il trouve absurde de renoncer à un bénéfice immédiat pour un avantage douteux dans le futur et que le Devoir varie en fonction des circonstances si le Bien est immuable et distinct.

Là encore Keynes s'oppose aux libéraux qui voient la nature invariable de l'homme et constatent que des institutions sociales, telles que la propriété privée, l'échange volontaire et mutuellement bénéfique, la concurrence pacifique et ouverte, permettent non seulement, d'améliorer la condition de l'homme et de servir ses propres intérêts, mais de servir ceux des autres.

A l'instar de Frédéric Bastiat  ou de Friedrich Hayek, les libéraux et les économistes classiques ne se contentent pas de ce qu'ils voient à court terme mais essayent d'appréhender, du mieux possible, ce qu'ils ne voient pas à long terme:

"L'un des usages de l'économie est de nous aider, au moins qualitativement, à anticiper les contours et les formes de ce futur, de par notre compréhension des lois du marché."

Keynes, en réalité, avec ses agrégats macro-économiques, tourne le dos aux fondements de l'économie:

"Après plus de deux siècles [depuis Adam Smith jusqu'à l'Ecole autrichienne], les économistes en sont venus à comprendre plus clairement que rien ne se passe dans "la société" ou sur "le marché" qui ne commence d’abord par les actions et décisions d’individus. En effet, "le marché" n’est rien de plus qu’un terme qui résume le lieu où des multitudes d’individus se rencontrent et interagissent en tant que fournisseurs et consommateurs dans le but de réaliser des gains mutuels par l’échange."

L'internaute intéressé lira avec profit le développement que fait Richard Ebeling sur les lois du marchés auxquelles John Maynard Keynes tente d'échapper.

Mais ces lois du marché découlent surtout d'une vision de l'homme étrangère à Keynes, pour qui l'homme est une créature irrationnelle, en laquelle il n'est pas possible de faire confiance pour prendre les bonnes décisions, aussi bien dans le présent que dans le futur.

Richard Ebeling pose les questions qui, du simple  fait de les poser, comprennent implicitement les réponses de cette autre vision de l'homme dont découlent les lois du marché:

"L’homme a-t-il droit à sa propre vie, à sa liberté et à sa propriété acquise honnêtement ? Considérons-nous l’homme comme un être rationnel et pensant, capable de diriger et de guider sa propre vie ? Les relations humaines doivent-elles être fondées sur le choix volontaire et l’accord mutuel ? Chaque individu doit-il être en mesure de concevoir les projets de sa propre vie et de coordonner ses actions avec celles des autres par le biais d’interactions pacifiques et concurrentielles sur le marché libre ? Allons-nous limiter le rôle de l’État à celui d’assurer le droit de chacun à être protégé de la violence et de la spoliation?"

A ces questions beaucoup de soi-disants économistes répondent par la négative, se trompent et trompent les autres.

Francis Richard