Amnesty dénonce et exige la levée de la suspension de l’avocat stagiaire Youcef Benbrahim

Publié le 13 novembre 2012 par Kabyle @Madjid_SERRAH

AMNESTY INTERNATIONAL/ DÉCLARATION PUBLIQUE
Algérie: La suspension d’un avocat stagiaire et militant des droits humains 
doit être immédiatement levée


Amnesty International est très préoccupée par la nouvelle de la suspension du stage d’avocat de M. Youcef Benbrahim, vice-président d'Amnesty International Algérie et avocat stagiaire au barreau de Sidi Bel Abbès après que celui-ci ait été informé oralement de cette décision. Youcef Benbrahim n'a ni été convoqué devant un conseil de discipline ni reçu de décision écrite lui notifiant la suspension de son stage. Amnesty International craint que la suspension de son stage, si elle a effectivement eu lieu, ne soit liée à ses activités de militant des droits humains au sein d'Amnesty International et à ses convictions.
Le 27 septembre 2012, suite à une manifestation devant le tribunal de Sidi Bel Abbès contre le film polémique et considéré comme offensant par de nombreux musulmans « L’Innocence des musulmans », Youcef Benbrahim a été interpellé par un avocat membre du bâtonnat alors qu’il parlait au téléphone avec un ami au sujet de cette manifestation. Cet avocat lui aurait demandé son nom et l’aurait informé de la suspension de son stage. M. Benbrahim a avisé Amnesty International que lorsqu’il s’est rendu au bureau du bâtonnier de Sidi Bel Abbès le 2 octobre, après une brève discussion ce dernier lui a demandé de sortir et a instruit sa secrétaire de rédiger la décision de suspension de stage de Youcef Benbrahim.
Selon des articles de presse, le bâtonnier aurait affirmé qu’il est question de la religion de Youcef Benbrahim, et qu’il aurait des doutes sur le fait que M. Benbrahim soit musulman car il aurait refusé de participer au sit-in devant le tribunal de Sidi Bel Abbès contre le film « L’Innocence des musulmans ». De telles déclarations, si elles étaient avérées, seraient extrêmement préoccupantes. En effet, en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié par Algérie, « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ».
Selon les Principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau, les avocats, comme toute autre personne, jouissent de ce droit, ainsi que le rappellent les Principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau rappelés ci-dessus. Ces principes rappellent que les avocats ont le droit « d’adhérer à des organisations locales, nationales ou internationales, ou d’en constituer, et d’assister à leurs réunions sans subir de restrictions professionnelles du fait de leurs actes légitimes ou de leur adhésion à une organisation légitime ». Ces principes affirment également que : « Les procédures disciplinaires engagées contre des avocats sont portées devant une instance disciplinaire impartiale constituée par l’ordre des avocats, devant une autorité statutaire indépendante ou devant un tribunal et elles doivent être susceptibles de recours devant un organe judiciaire indépendant ».
Lors de sa visite officielle en Algérie en septembre 2012, la Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Mme Navi Pillay a fait part de son inquiétude au sujet des droits à la liberté d’association et la liberté de réunion pour les organisations de la société civile et les défenseurs des droits humains en Algérie, notant « qu’elle s’est peut-être même détériorée au cours de l’année écoulée ».
Amnesty International demande la clarification immédiate de la situation de Youcef Benbrahim au regard de son stage d'avocat. Si M. Benbrahim est soupçonné d'avoir manqué aux règles de conduite professionnelle ou à la déontologie de la profession d’avocat, il doit faire l’objet d’une procédure disciplinaire, les motifs de cette procédure doivent lui être communiqués clairement, et toute décision prise contre lui doit être susceptible de recours devant un organe judiciaire indépendant.
Amnesty International appelle également les autorités algériennes à prendre des mesures afin de s'assurer que les militants des droits humains ne fassent pas l'objet d'intimidations ou de harcèlement; et qu'ils puissent exercer leurs droits à la liberté d'expression et d'association sans entraves ni crainte de représailles.