Imaginez une seconde Jean-Luc Godard dans une agence de pub. En réunion. Ventant les mérites de son film pour Marithé et François Girbaud ou Monster.fr (oui vous avez bien lu, Monster.fr)
Imaginez, l’homme aux lunettes indélébiles, face à un brief publicitaire. Ou même pire.
Imaginez le réalisateur de « Pierrot le Fou » face à l’intégration d’un packshot au montage. Vous pensez que c’est une blague ? Un détournement ? Et bien non. Au mieux un souvenir évaporé si vous êtes assez vieux pour vous le remémorer. Pour les plus jeunes, séance de rattrapage, ici et maintenant.
En 1970, Jean-Luc Godard signe son premier spot publicitaire pour la marque d’after-shave Schick. Commandité par l’agence Dupuy-Compton et coréalisé avec Jean-Pierre Gorin, le film raconte la dispute d’un couple dans une salle de bain pendant qu’une radio crie des infos sur les troupes palestiniennes. L’homme s’asperge d’après-rasage, la femme le hume, puis l’embrasse. Signature: « Pour être mieux dans sa peau. »
En 1988, Marithé et François Girbaud ont commandé à Jean-Luc Godard une série de publicités pour leurs jeans. Le cinéaste a livré une dizaine de films personnels. Peut être les plus créatifs et les plus osés.
En 1991, c’est au tour des cigarettes « La parisienne » (Annonceur : British american tobacco) de commanditer un film décalé et parodique.
En 2000, c’est l’apogée de sa courte carrière publicitaire (un film tous les dix ans en moyenne) avec un film en noir et blanc pour l’annonceur Monster.fr. Un détournement dommageable pour l’un des papes du cinéma qui signe le spot avec cette signature : «Ne gâchez pas votre talent. Cliquez sur Monster.fr, leader de l’emploi par Internet.» A peine croyable.