Certains des auteurs de ce recueil de texte publié par les Éditions François-Xavier de Guibert ne sont en effet pas des inconnus. Christian Vanneste tout d’abord, député UMP-CNI de Tourcoing, battu sévèrement lors du premier tour des dernières municipales et condamné par la justice pour « injures en raison de l’orientation sexuelle » en 2006. Tony Anatrella ensuite, prêtre psychothérapeute, connu pour pour ses prises de positions sur l’homosexualité qui est selon lui « une orientation sexuelle recherchée pour elle-même, en contradiction avec l’identité sexuelle, est toujours l’expression d’un sérieux problème » et qui avait été pris dans une tourmente judiciaire en 2006 comme nous le racontait le Nouvel Observateur. A côté de ces deux têtes d’affiche on trouve également Marie Balmary, psychanalyste et « chercheuse » sans formation universitaire, Rémi Brague, professeur de philosophie médiévale à la Sorbonne et auteur, entre autre, de « L’Europe malade de la Turquie », Henri Brincard, évêque du Puy-en-Velay, soeur Marie-Pierre, Anna-Marie Libert et Marie Hendrickx.
Le résumé du livre proposé par l’éditeur laisse également songeur:
L’Ecriture proclame la dualité des sexes, et l’égale dignité de l’homme et de la femme.
Une femme, Marie, est Mère de Dieu ! Une femme, Madeleine, s’est entendu dire : ” Partout où sera proclamée cette bonne nouvelle, dans le monde entier, on redira ce que cette femme vient de faire ” (Mat. 26,13). Que faut-il de plus pour comprendre le dessein du Créateur ? Mais notre société a perdu ses repères. La libération de la femme n’a pas supprimé le drame des avortements. Les homosexuels revendiquent un mariage que les couples délaissent.
Ce recueil de texte a été réuni par l’ « Académie d’éducation et d’études sociales », nom pompeux choisi sans doute par soucis de respectabilité et pour laisser croire à une institution publique de recherche. Il n’en est évidemment rien. Il semblerait plutôt qu’il s’agit d’un réseau catholique dont le but est de faire du lobbyisme en faveur de la doctrine de l’église. La description des buts de l’association sur son site ne le cache d’ailleurs même pas.
Voilà donc ce qui est arrivé dans les établissement scolaires de nos enfants: un ouvrage écrit par une joyeuse bande de réactionnaires, sans aucun fondement scientifique et servant à délivrer la doctrine sociale de l’église en ce qui concerne les rapports sociaux de sexe.
Cette affaire n’est pas sans rappeler, toute proportion gardée, celle de l’ « Atlas de la création », ouvrage créationniste écrit par Adnan Oktar, envoyé à des dizaines de milliers d’exemplaires dans les écoles françaises début 2007. Elle s’en rapproche dans la méthode de diffusion employée mais aussi dans le dessein car de la même façon que l’ « Atlas de la création » s’attaquait aux théories de l’évolution, « Homme et Femme Il les créa » s’attaque aux théories des rapports de sexe/genre. Et autant il n’est pas interdit de remettre en cause des théories scientifiques, autant il faut le faire de manière scientifique et non pas dogmatique comme c’est le cas dans ces deux ouvrages.
Il n’y a rien à dire contre l’écriture de « Homme et femme Il les créa » mais la place de cet ouvrage est sur les étagères des librairies catholiques ou dans les rayons spécialisés des librairies grand public, certainement pas dans les centres de documentation des écoles publiques et laïques françaises. On peut en tout cas se féliciter de la vigilance dont ont fait preuve les documentalistes des écoles françaises.