Réduction du déficit, c’est l’intention qui compte

Publié le 09 novembre 2012 par Nicolas007bis

Récemment la Commission Européenne a pronostiqué un taux de croissance pour la France de 0,4% en 2013 soit moitié moins que les 0,8% tant espérés.

Aussitôt tout le gouvernement s’est empressé de contester haut et fort cette prévision, invoquant que la Commission n'est qu'une incurable pessimiste, que l’effet positif lié à la stabilisation de la zone euro « va intervenir beaucoup plus tôt au cours de l'année 2013 » (Sapin), qu’encore une fois elle se trompe: « la Commission n'avait absolument pas vu venir la crise en 2008, peut-être peut-on penser qu'elle ne voit pas venir la reprise » (Cahuzac) ou bien qu’elle n’a « pas en mains toutes les données» (Moscovici) … et qu’en conséquence les 0,8% sont toujours d’actualité.

Depuis des mois, François Hollande assure qu’il tiendra son objectif ou devrais-je dire que la France tiendra son objectif des 3 % de déficit en 2013.

Il a maint fois réitéré cet engagement à travers toute l’Europe.

L’ambition est louable et l’affirmer haut et fort est important pour rassurer les grands vilains marchés qui pourraient douter de la capacité de la France à tenir ses engagements. Il faut dire que ses engagements, la France, elle les a trop souvent piétinés sans vergogne pour que le scepticisme voire la méfiance ne soient pas de mise.

Il est donc important pour François Hollande d’affirmer et réaffirmer que la France a, à la fois, la capacité et la volonté de réduire ses déficits. D’autant plus important qu’il a fait de la confiance un des leviers permettant de ramener la croissance. Mais encore faut-il se donner tous les moyens pour y parvenir sous peine de perdre toute crédibilité !

Donc, il affirme et réaffirme, et on aimerait le croire, sauf que cet objectif pour être atteint suppose un taux de croissance en 2013 d’au moins 0,8%. Tout est basé sur cette estimation. Si elle ne se confirme pas, les mesures prises pour respecter les 3% seront insuffisantes. Insuffisante l’augmentation de 20 milliards des prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises et les particuliers, insuffisante la diminution des dépenses de l’Etat de 10 milliards d’euros.

Il y a 2 mois beaucoup doutaient déjà que les 0,8% puissent être atteints, depuis beaucoup d’experts se sont prononcés pour diagnostiquer un taux proche de zéro. Récemment l’INSEE a abaissé sa prévision de croissance pour 2012 et comme la Commission Européenne, le FMI table sur 0,4% pour 2013. Seule la Banque de France semble croire au taux annoncé par le Gouvernement. C’était en Septembre, y croit-elle encore à ce jour ?

En tout état de cause, il parait bien imprudent d’exclure que l’hypothèse de croissance sur laquelle le gouvernement a fondé ses prévisions de déficit budgétaire, et donc son plan de rigueur ne se confirme pas.

Au-delà du lénifiant discours officiel, et sauf à le considérer comme imprudent ou d’un optimisme béat, on ne peut pas imaginer que le Gouvernement n’ait rien prévu pour respecter ses engagements même en cas de croissance plus faible que prévue. Gouverner c’est prévoir si on en croit la célèbre formule d’ Emile de Girardin. Qu’à donc prévu ce gouvernement qui nous gouverne s’il s’avérait que la croissance n’était pas au rendez-vous ?

A ce jour, aucune indication, aucune information de sa part sur ce que pourrait-être une alternative, rien sur un éventuel plan C comme croissance insuffisante !

Donc, puisqu’il ne communique pas dessus, nous en sommes réduits à des hypothèses.

D’ores et déjà, éliminons celle d’un accroissement des prélèvements puisque, par la voix de son ministre du budget Jérôme Cahuzac, le gouvernement a affirmé, juré, craché qu’il « n'y aura pas d'effort fiscal supplémentaire » après 2013.

Alors peut-être aurons nous droit à une réduction plus forte qu’annoncée des dépenses de l’Etat ?...peu probable quand on voit la difficulté qu’a déjà eu le Gouvernement à trouver des poches d’économies à droite et à gauche. D’autant moins probable que des économies supplémentaires ont déjà été annoncées dans le cadre du plan de compétitivité mais uniquement pour compenser le crédit d’impôt fait aux entreprises.

En conséquence, je ne vois que 2 scénarios possibles :

Le premier scénario est que Bruxelles octroie un sursis collectif aux pays de la zone euro pour se mettre en conformité avec règle d’or et en préalable avec les 3%.

C’est le fameux « compromis entre le désendettement et la croissance ».

Même le FMI envisage cette hypothèse et préconise, qu’en cas de croissance insuffisante, la France, tout comme ses partenaires européens revoient conjointement « la rapidité de l'ajustement budgétaire au niveau de la zone euro ».

François Hollande ne l’exclut pas et pousse probablement en ce sens mais en sous-main. Officiellement c’est uniquement pour rendre service à nos malheureux voisins, l’Italie, le Portugal ou l’Espagne, pays qui auront beaucoup de mal, eux, à atteindre l’objectif des 3% en 2013.

Evidemment, faire trop ostensiblement pression pour un report d’un an de cet objectif gâcherait tout l’effet des déclarations volontaristes sur la capacité et la volonté de la France à revenir à un presque équilibre budgétaire.

Le plan de C de Hollande serait donc un plan B comme Bruxelles.

Dans le cas ou ce scénario n’aboutirait pas, il ne reste plus que le plan F comme filouterie.

Le gouvernement va rester droit dans ses bottes et affirmer contre vents et marées et contre toute évidence qu’il croit à cette croissance de 0,8 et, qu’en conséquence, il n’y a pas de raison de remettre en cause ni son objectif de 3% ni, bien sur, les moyens mis en oeuvre pour y arriver.

Arrivés fin 2013, quand tout le monde constatera que ce sera non pas 0,8% mais 0,4 ou 0,2 eh bien il sera trop tard et les 3% de déficit promis se seront transformés en 3,5 ou 4%. On a fait ce qu’on a pu, c’est l’intention qui compte, répètera le gouvernement qui trouvera bien quelques facteurs exogènes plus ou moins pertinents pour justifier son pronostic erroné. Par contre, vous verrez, en 2014, pas de souci, on y sera !

Et voilà comment la France aura gagné 1 an (minimum), grâce, encore une fois à une promesse non tenue à laquelle tout le monde aura feint de croire.