Récemment la
Commission Européenne a pronostiqué un taux de croissance pour la France de
0,4% en 2013 soit moitié moins que les 0,8% tant espérés.
Aussitôt tout le gouvernement s’est empressé de contester haut et fort cette
prévision, invoquant que la Commission n'est qu'une incurable pessimiste, que
l’effet positif lié à la stabilisation de la zone euro « va intervenir
beaucoup plus tôt au cours de l'année 2013 » (Sapin),
qu’encore une fois elle se trompe: « la Commission n'avait absolument
pas vu venir la crise en 2008, peut-être peut-on penser qu'elle ne voit pas
venir la reprise » (Cahuzac)
ou bien qu’elle n’a « pas en mains toutes les données» (Moscovici)
… et qu’en conséquence les 0,8% sont toujours d’actualité.
Depuis des mois, François Hollande
assure qu’il tiendra son objectif ou devrais-je dire que la France tiendra
son objectif des 3 % de déficit en 2013.
Il a maint fois réitéré cet engagement à travers toute l’Europe.
L’ambition est louable et l’affirmer haut et fort est important pour
rassurer les grands vilains marchés qui pourraient douter de la capacité de la
France à tenir ses engagements. Il faut dire que ses engagements, la France,
elle les a trop souvent
piétinés sans vergogne pour que le scepticisme voire la méfiance ne soient
pas de mise.
Il est donc important pour François Hollande d’affirmer et réaffirmer que la
France a, à la fois, la capacité et la volonté de réduire ses déficits.
D’autant plus important qu’il a fait de la
confiance un des leviers permettant de ramener la croissance. Mais encore
faut-il se donner tous les moyens pour y parvenir sous peine de perdre toute
crédibilité !
Donc, il affirme et réaffirme, et on aimerait le croire, sauf que cet
objectif pour être atteint suppose un taux de croissance en 2013 d’au moins
0,8%. Tout est basé sur cette estimation. Si elle ne se confirme pas, les
mesures prises pour respecter les 3% seront insuffisantes. Insuffisante
l’augmentation de 20 milliards des prélèvements obligatoires pesant sur les
entreprises et les particuliers, insuffisante la diminution des dépenses de
l’Etat de 10 milliards d’euros.
Il y a 2 mois beaucoup doutaient déjà que les 0,8% puissent être atteints,
depuis beaucoup d’experts se sont prononcés pour diagnostiquer un taux proche
de zéro. Récemment l’INSEE
a abaissé sa prévision de croissance pour 2012 et comme la Commission
Européenne, le FMI table sur 0,4% pour 2013. Seule la Banque de France semble
croire au taux annoncé par le Gouvernement. C’était en Septembre, y
croit-elle
encore à ce jour ?
En tout état de cause, il parait bien imprudent d’exclure que l’hypothèse de
croissance sur laquelle le gouvernement a fondé ses prévisions de déficit
budgétaire, et donc son plan de rigueur ne se confirme pas.
Au-delà du lénifiant discours officiel, et sauf à le considérer comme
imprudent ou d’un optimisme béat, on ne peut pas imaginer que le Gouvernement
n’ait rien prévu pour respecter ses engagements même en cas de croissance plus
faible que prévue. Gouverner c’est prévoir si on en croit la célèbre formule d’
Emile de Girardin. Qu’à donc prévu ce gouvernement qui nous gouverne s’il
s’avérait que la croissance n’était pas au rendez-vous ?
A ce jour, aucune indication, aucune information de sa part sur ce que
pourrait-être une alternative, rien sur un éventuel plan C comme croissance
insuffisante !
Donc, puisqu’il ne communique pas dessus, nous en sommes réduits à des
hypothèses.
D’ores et déjà, éliminons celle d’un accroissement des prélèvements puisque,
par la voix de son ministre du budget Jérôme
Cahuzac, le gouvernement a affirmé, juré, craché qu’il « n'y aura pas
d'effort fiscal supplémentaire » après 2013.
Alors peut-être aurons nous droit à une réduction plus forte qu’annoncée des
dépenses de l’Etat ?...peu probable quand on voit la
difficulté qu’a déjà eu le Gouvernement à trouver des poches d’économies à
droite et à gauche. D’autant moins probable que des économies supplémentaires
ont déjà été annoncées dans le cadre du
plan de compétitivité mais uniquement pour compenser le crédit d’impôt fait
aux entreprises.
En conséquence, je ne vois que 2 scénarios possibles :
Le premier scénario est que Bruxelles octroie un sursis collectif aux pays
de la zone euro pour se mettre en conformité avec règle d’or et en préalable
avec les 3%.
C’est le fameux « compromis entre le désendettement et la croissance
».
Même le
FMI envisage cette hypothèse et préconise, qu’en cas de croissance
insuffisante, la France, tout comme ses partenaires européens revoient
conjointement « la rapidité de l'ajustement budgétaire au niveau de la
zone euro ».
François Hollande ne l’exclut pas et pousse probablement en ce sens mais en
sous-main. Officiellement c’est uniquement pour rendre service à nos malheureux
voisins, l’Italie, le Portugal ou l’Espagne, pays qui auront beaucoup de mal,
eux, à atteindre l’objectif des 3% en 2013.
Evidemment, faire trop ostensiblement pression pour un report d’un an de cet
objectif gâcherait tout l’effet des déclarations volontaristes sur la capacité
et la volonté de la France à revenir à un presque équilibre
budgétaire.
Le plan de C de Hollande serait donc un plan B comme Bruxelles.
Dans le cas ou ce scénario n’aboutirait pas, il ne reste plus que le plan F
comme filouterie.
Le gouvernement va rester droit dans ses bottes et affirmer contre vents et
marées et contre toute évidence qu’il croit à cette croissance de 0,8 et, qu’en
conséquence, il n’y a pas de raison de remettre en cause ni son objectif de 3%
ni, bien sur, les moyens mis en oeuvre pour y arriver.
Arrivés fin 2013, quand tout le monde constatera que ce sera non pas 0,8%
mais 0,4 ou 0,2 eh bien il sera trop tard et les 3% de déficit promis se seront
transformés en 3,5 ou 4%. On a fait ce qu’on a pu, c’est l’intention qui
compte, répètera le gouvernement qui trouvera bien quelques facteurs exogènes
plus ou moins pertinents pour justifier son pronostic erroné. Par contre, vous
verrez, en 2014, pas de souci, on y sera !
Et voilà comment la France aura gagné 1 an (minimum), grâce, encore une fois à une promesse non tenue à laquelle tout le monde aura feint de croire.