Dans les livres d’Olivier Adam, il y a toujours une perte irrémédiable, un trou dans la biographie. Il y a aussi l’importance des histoires de fratrie. Dans celui-ci, l’engagement qu’on peut lire dans ses précédents ouvrages prend un autre tour. Plusieurs questions traversent cette œuvre.
L’origine, pas seulement la famille, mais aussi la classe sociale, le lieu, tiennent dans ces lignes une grande place. Est-on constitué de cette origine ? Avoir quitté V. a-t-il influé sur le narrateur, voire sur ceux qu’il a quittés ? Quels liens peuvent subsister après ces années ? Paul évoque ici et là ce qui « distingue » les uns des autres, et s’interroge sur ce qui le distingue lui-même de son milieu familial, de ses copains d’adolescence, du milieu social dans lequel il doit évoluer.
Pourquoi écrit-il ? C’est une autre question qui traverse le livre. Pour survivre ? Pour lui-même donc. Et que fait l’auteur du lecteur ? Quand Paul centre ses livres sur ceux qui sont proches de sa propre existence (Sarah, Manon, Clément, l’alcool, l’éditeur, les voisins, les parents, la ville de V., la ligne D du RER, la Bretagne, etc.), il ne se soucie pas de ce que cela peut faire rejaillir sur les autres, nommés ou non dans ces pages. Devrait-il s’en soucier ? Il dit écrire comme un joueur de tennis de fond de court, en cognant.
Son statut d’écrivain vient aussi alimenter le roman. Ce statut le rend étranger à sa propre famille, à ses copains d’adolescence retrouvés ici. Il écrit sur leurs vies mais qu’est-ce qu’il en connaît à présent ? Mais il se sent lui-même étranger dans ce milieu où les classes populaires ne font pas recette.
La première partie du roman m’a captivé. La seconde un peu moins. La troisième m’a déçu : sorte de happy end japonisante, rappelant que le livre précédent d’Olivier Adam nous avait emmenés au Japon.