LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Paris, le 16 juillet 2012.
Monsieur le Premier ministre,
Comme je m’y suis engagé devant les Français, je souhaite que le nouveau quinquennat qui vient de s’ouvrir soit marqué par un nouvel élan donné à la démocratie et par un fonctionnement exemplaire des institutions publiques.
C’est dans cette perspective que j’ai décidé de vous confier la présidence d’une commission chargée de la rénovation et de la déontologie de la vie publique.
Elle sera composée de personnalités représentatives de sensibilités diverses choisies à raison de leurs compétences universitaires, de leur expérience du fonctionnement de l’Etat ou de la vie publique. Elle proposera des réformes qui pourront trouver leur traduction dans une modification de la Constitution, mais aussi dans la loi organique ou dans la loi ordinaire. […] suite et source.
Le sujet du cumul des mandats, lui-même inclus dans le lourd débat sur la moralisation de la vie politique, est un problème sérieux, je dirais même majeur dans notre vie démocratique française. Nous connaissons tous autour de nous, localement, des cumulards à la fois associatifs, politiques ou professionnels. Quand ce ne sont pas les mêmes. Le fait de truster les places et les fonctions stratégiques permet en effet de maîtriser les processus de décision et d’assurer un contrôle sur l’évolution des principaux dossiers. Certains s’en servent sciemment et cyniquement pour satisfaire leurs intérêts et répondre à leurs enjeux personnels, tels que la soif de pouvoir ou l’appât du gain. Sans aller jusque là, ce phénomène empêche l’éclosion de nouveaux talents, de nouvelles personnalités, de nouvelles manières d’agir et de servir la collectivité. Aussi, le rapport Jospin, pour ce qui concerne le volet politique, était très attendu. Pourtant, il semblerait, de ce qui en a percé, que la montagne accouche d’une souris, selon les experts des journaux qui ont étudié la question. Voici les principales préconisations de ce rapport :
Non-cumul des mandats : un député ne pourra pas être maire ou président d’un exécutif local, mais seulement simple conseiller. Cette disposition serait valable également pour les sénateurs. Selon Libération, le débat sur le mandat unique, a été « clos après un échange entre Jospin et l’Elysée alors qu’une majorité au sein de la commission s’était prononcée en faveur de cette mesure radicale ». Et si un député ou un sénateur contrevenait à cette disposition en cumulant son mandat de parlementaire ou de sénateur avec un poste local non exécutif ? Il n’aurait alors plus droit à une rémunération pour cette deuxième fonction.
Réforme des parrainages : 150 000 signatures de simples citoyens et non 500 d’élus. Le fait qu’ils soient ou non rendus publics n’est pas encore tranché.
Proportionnelle : Une dose de 10%, ce qui signifie que seulement 10% des 577 députés seraient élus de cette manière. Les circonscriptions seraient alors redécoupées.
Statut pénal du chef de l’Etat : il pourrait être rendu responsable juridiquement des actes « détachables » de sa fonction (c’est-à-dire ceux relevant de sa vie privée), sur le plan pénal comme civil, commis avant ou pendant son mandat.
Conseil Constitutionnel : Les anciens présidents de la République ne bénéficieraient plus d’office d’un siège au Conseil constitutionnel. Mais rassurons d’emblée Nicolas Sarkozy, ce pauvre ancien président dans le besoin : il pourra continuer à toucher sa petite prime de 11500 euros, puisque l’actuel président, dans sa grande mansuétude a déjà fait savoir qu’il ne rendrait pas cette mesure rétroactive…
Ben moi, à la lumière de mon esprit probablement moins bien informé que ces experts, je me dis que si tout cela et rien que cela était déjà suivi d’effets, et que le gouvernement s’empressait de le mettre en œuvre aussi rapidement que ce fut le cas pour le rapport Gallois, voilà qui changerait significativement notre paysage politique dans le bon sens. Mais comme le fait remarquer Sophie Verney-Caillat, la journaliste de Rue89 grâce à laquelle j’ai gagné beaucoup de temps pour préparer ce billet, « Reste des questions non encore tranchées : la réduction du nombre de parlementaires et de leurs avantages fiscaux, et la prévention des conflits d’intérêt. » Et elles sont à mes yeux plus que fondamentales pour atteindre le but recherché par le Président de la république lorsqu’il a commandé ce rapport : je souhaite que le nouveau quinquennat qui vient de s’ouvrir soit marqué par un nouvel élan donné à la démocratie et par un fonctionnement exemplaire des institutions publiques. Nous l’attendons aussi. Impatiemment.