Kyoto
Octobre 2009
Myoshin-ji
Comme pour nous, la mémoire est pour Issa cette chose informe :
Souvenirs flottants
oui dans le fleuve du temps
alluvions dépôts
Des érables d'automne
je m'approche
la solitude me prend
Kobayashi Issa in Anthologie du poème court japonais
On me dit triste ; je suis juste fatiguée, lasse, ma mémoire semble même avoir été effacée.
Je voudrais être comme ces statues de pierre du jardin d'un des temples du Myoshin-ji à Kyoto, ce jour d'automne 2009 (le 23 octobre plus précisément m'indique mon ficihier ... la mémoire des machines a cet avantage sur nous ; elle est fiable), figée dans une bienheureuse sérénité.
Certes, ce n'est pas ainsi que doit aller la vie, j'en suis tout à fait consciente, et le fait de venir ici est peut être une bonne thérapie. Je n'aime pas me raconter, mais peut-être que là est la clé ; alors, désolée si vous aussi me trouvez triste, j'essaie juste de m'efforcer à sortir de l'ombre ...
Son tout premier poème, Issa raconte qu'il disait :
Viens joue avec moi
toi moineau sans ta maman
nous sommes tout seuls
L'enfance d'Issa est une belle histoire triste à laquelle il faut croire. Il ne manque rien à cette petite légende où vont se pencher sur le garçon perdu quelques figures tendres et secourables : la grand-mère lui trouvant le lait et les médicaments qui lui permettront de survivre, le poète qui lui enseigne ensuite à lire et à écrire - et cela est, sans doute, une manière aussi de survivre. A cinq ans, Issa sait tout du monde, de sa méchanceté et de son inépuisable beauté. Vivre va lui servir à vérifier ce savoir.
Extraits de Sarinagara de Philippe Forest (Histoire du poète Kobayashi Issa)