J’aime le soleil dans n’importe quel homme, quand je le vois luire entre ses deux sourcils, limpide et téméraire, même s’il est minuscule.
Mais quand je vois ces carriéristes grisâtres, aussi repoussants que des cadavres, totalement dépourvus de soleil, comme des esclaves carriéristes bien grossiers qui se dandinent mécaniquement, alors je deviens plus que radical: je veux actionner une guillotine.
Et quand je vois les ouvriers, pâles, mesquins et pareils à des insectes, allant et venant sans cesse, vivant comme des poux, la bourse presque vide et les yeux toujours rivés au sol, alors je voudrais, à l’instar de Tibère, que la populace n’eût qu’une seule tête, de sorte que je pourrais la trancher.
Quand les individus viennent à être totalement dépourvus de soleil, mon sentiment est qu’ils ne devraient plus exister.
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I am a democrat in so far as I love the free sun in men
and an aristocrat in so far as I detest narrow-gutted, possessive persons.
I love the sun in any man
when I see it between his brows
clear, and fearless, even if tiny.
But when I see these grey successful men
so hideous and corpse-like, utterly sunless,
like gross successful slaves mechanically waddling,
then I am more than radical, I want to work a guillotine.
And when I see working men
pale and mean and insect-like, scuttling along
and living like lice, on poor money
and never looking up,
Then I wish, like Tiberius, the multitude had only one head
so that I could lop it off.
I feel that when people have gone utterly sunless
they shouldn’t exist.
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D.H. Lawrence (1885-1930) – Traduction de Pierre Troullier